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Les cystites sont des inflammations de la vessie, le plus souvent d’origine infectieuse. Touchant de façon quasi exclusive la femme, elles sont habituellement sans gravité, mais peuvent être handicapantes et nécessitent d’être prises en charge de façon idoine.

 

  

Une fréquence élevée

Une femme sur deux fera dans sa vie un ou plusieurs épisodes de cystite. En moyenne, ce sont plus de trois millions de cystites qui surviennent chaque année en France. Si la maladie peut se manifester à tout moment, depuis la prime enfance jusqu’à un âge élevé, elle connaît deux pics de fréquence : lors des premiers rapports sexuels et à la ménopause. La survenue de cystite chez l’homme est exceptionnelle. La majorité des cystites sont dites aigues. Elles apparaissent de façon ponctuelle. Mais dans un cas sur dix environ les cystites sont récidivantes (plus de 4 épisodes par an). Elles peuvent constituer alors un vrai handicap. Certaines femmes souffrent de 10 à 30 épisodes annuels…

 

 

La cystite pas grave… mais préoccupante

La cystite est, dans l’immense majorité des cas, d’origine infectieuse. C’est une souche d’Escherichia coli – un colibacille présent dans l’intestin – qui est responsable de l’infection des urines et des symptômes vésicaux associés. Contrairement à ce que l’on peut lire, il n’y a pas de complication grave à redouter. Et la fameuse pyélonéphrite, infection dramatique du rein due à un Escherichia coli, n’est pas induite par les cystites. Sauf dans des cas très particuliers de malformations et de reflux vésico-rénal.  « Même si on prend trop tardivement son traitement et même si la cystite dure longtemps, elle n’évolue jamais vers une forme grave » rassure le Pr Franck Bruyère.

En revanche, la cystite est une pathologie préoccupante en raison de l’augmentation des résistances aux antibiotiques. « Nous sommes les troisièmes consommateurs européens d’antibiotiques » regrette le Pr Bruyère. Cette utilisation excessive – et souvent inappropriée – d’antibiotiques favorise le développement de germes résistants.

 

La cystite post-coïtale

 

Certaines femmes développent des cystites après chaque rapport sexuel. Ces cystites sont traitées comme les cystites récidivantes. Il est également conseillé à ces femmes de pratiquer une miction post-coïtale et d’utiliser un traitement lubrifiant car ces cystites sont souvent associées à une sècheresse vaginale.

Pas de cause unique mais une multitude de facteurs de risque

À quoi sont dues les cystites ? Pourquoi le germe vient-il coloniser la vessie ? Un certain nombre de facteurs de risque ont été identifiés parmi lesquels, l’insuffisance des apports hydriques, la constipation, la grossesse, la ménopause, des antécédents d’affections urologiques (malformations, calculs, tumeurs de la vessie…), le fait de s’empêcher d’aller aux toilettes durant sa journée de travail, les maladies qui affectent l’immunité et les traitements immunosuppresseurs (médicaments antirejet, chimiothérapies…). De même, la consommation de certains aliments acides, comme les tomates ou les asperges, tend à favoriser les crises. En revanche, d’autres facteurs sont volontiers évoqués mais on manque de preuves quant à leur lien réel avec la cystite : le diabète, le port de vêtements serrés, un défaut d ‘hygiène intime…

 

Des signes qui ne trompent pas

 

Les deux symptômes majeurs sont des brûlures à la miction et une discrète fièvre (jamais au dessus de 39 °C). À ces deux signes, s’ajoute pour certaines femmes une pollakiurie, c’est-à-dire une fréquence des envies d’aller uriner supérieure à 8 fois par jour. Enfin, on peut trouver également des traces de sang dans les urines. La présence de sang inquiète souvent, elle n’est pas signe d’une cystite plus « grave ». En revanche, elle va éventuellement conduire le médecin à évoquer un diagnostic différentiel et poursuivre les investigations pour rechercher d’autres pathologies.

Le diagnostic de cystite est souvent simple et évident. L’ECBU (Examen Bactériologique des Urines), régulièrement et abusivement pratiqué est habituellement sans objet. « Pour les cystites aigues, l’ECBU est inutile. Car les traitements dont nous disposons sont efficaces sur 95 % des crises. Faire un ECBU ne changera en rien la prise en charge. L’examen n’a donc pas de sens. Pour les cystites récidivantes, il peut en revanche servir à vérifier la sensibilité du germe aux antibiotiques » précise le Pr Franck Bruyère.

 

Quels examens complémentaires ?

 

En cas de cystite récidivante, d’autres examens sont indiqués, notamment la recherche de facteurs de risques urologiques. Ainsi, une échographie peut mettre en évidence la présence de calculs ou d’un résidu post-mictionnel. Ce « résidu »  indique que la femme ne parvient pas à vider complètement sa vessie. Cela peut être dû à de multiples causes : vessie neurologique (SEP, traumatisme médullaire, parkinson…), sténose de l’urètre, mauvaises habitudes mictionnelles…

Un vaccin contre la cystite ? Un vaccin anti Escherichia coli, qui cible spécifiquement les souches responsables des cystites est en développement. Les premières études semblent prometteuses.

Les antibiotiques, principal traitement de la cystite

Les cystites aigues simples sont soignées par des cures courtes d’antibiotiques soit en monodose, soit pendant 3 jours ; les cystites aigues à risque de complications (femme enceinte, femme en ménopause…) par des antibiothérapies plus longues de 5 à 7 jours.

Les cystites récidivantes associent un traitement antibiotique d’attaque (pendant 5 à 7 jours) et un traitement de fond. « On essaye de prescrire le moins souvent possible des antibiotiques au long cours, en raison de la mauvaise tolérance du traitement et du risque de développement de résistances » précise le Pr Bruyère. On traite en parallèle les autres agents causaux éventuels (pathologies urologiques).

Enfin, des modifications hygiéno-diététiques viennent en appui : boire de manière abondante, uriner régulièrement, apprendre à vider complètement sa vessie. La consommation de cranberry (canneberge) et de probiotiques (lactobaccilus pour rééquilibrer la flore), et pour les femmes en ménopause, la prise d’un TSH peuvent améliorer la situation. De même que la phytothérapie (bruyère, busserole…).

Pour aller plus loin : Les nouvelles recommandations pour la prise en charge des cystites aiguës simples

 

Les autres infections et les cystites non infectieuses

 

Il existe également des cystites non infectieuses, dont les cystites interstitielles. Celles-ci sont aussi appelées « syndrome de la vessie douloureuse ». Elles se manifestent par des envies pressantes, des brûlures à la miction, des douleurs vésicales parfois très importantes et pourtant… un bilan biologique montre qu’il n’existe aucun germe. La cause de ces cystites est probablement immunologique.

« On connait mal l’origine de ces cystites, on a du mal à les soigner » explique le Pr Bruyère. Heureusement ces cystites interstitielles sont rares. Le principal traitement vise à distendre la vessie qui est souvent de petite capacité chez ces femmes. La technique consiste à pratiquer une hydrodistension (gonflement de la vessie sous anesthésie). Cette intervention permet de calmer le syndrome pour plusieurs mois.

Autre situation : les infections qui ne provoquent pas de cystites. Ces « colonisations urinaires », totalement asymptomatiques, sont découvertes par hasard à l’occasion d’un ECBU. « Ce sont des femmes qui n’ont aucun symptôme urinaire et qui, à l’occasion d’une fièvre vont faire un ECBU…« . Le souci : alors qu’elles n’ont pas de cystite et ne devaient donc pas être traitées, elles se voient le plus souvent prescrire inutilement des antibiotiques. « Le principe de précaution à la française devient vraiment dangereux » déplore le Pr Bruyère et l’on voit se développer aujourd’hui des germes qui sont résistants à tous les antibiotiques. Un défi pour demain !

 

Cranberry, on choisit bien la dose ! 

 

Le composé actif de la canneberge doit être présent dans les compléments alimentaires à hauteur de 36 mg. Deux laboratoires d’analyse français ont mené des tests quantitatifs et qualitatifs pour contrôler la présence de ces principes actifs. L’un situé à Nîmes et l’autre, à Tours. Il s’avère que la majorité des compléments sont insuffisamment dosés, ou qu’ils ne comportent pas le proanthocyanidine qui a fait ses preuves (il en existe plusieurs dont un seul est actif).

Certains compléments ont néanmoins passé les tests avec succès : Cys-control, DUAB, Cys-regul, Gyndelta, Urell… Une nouvelle étude est en cours : elle vise a évaluer le bénéfice d’une association cranberry / propolis. La propolis (extrait de la ruche) a en effet la potentialité d’augmenter la sensibilité des germes aux antibiotiques et donc de rendre ces traitements plus efficaces.

 

 Pr Franck Bruyère, urologue au CHU Bretonneau de Tours, membre du comité d’infectiologie de l’’Association Française d’Urologie