Ce 8 décembre, la Cour d’appel d’Aix-en-Provence a tranché dans l’affaire qui opposait la société ABC Industrie (appartenant au vice-président de la FICT – Fédération française des industriels charcutiers traiteurs) et l’application Yuka. Pour la première fois, les juges reconnaissent ainsi le droit d’informer et d’alerter sur les risques pour la santé des nitrites dans la charcuterie.

Yuka, foodwatch et la Ligue contre le cancer ont uni leurs forces depuis trois ans pour alerter sur les risques pour la santé des additifs à base de nitrites et nitrates (E249, E250, E251, E252). Leur pétition commune demandant l’interdiction des nitrites ajoutés dans l’alimentation a connu une forte mobilisation et compte à ce jour plus de 370 000 signataires. Suite à cette pétition, l’application Yuka a fait l’objet d’attaques coordonnées de la part du lobby de la charcuterie industrielle. Après avoir été condamnée en première instance par le Tribunal de commerce d’Aix-en-Provence, la Cour d’appel reconnaît aujourd’hui la légitimité de l’application à alerter sur les risques liés aux additifs nitrés et indique que « le fait de proposer aux utilisateurs de l’application de signer une pétition entre de toute évidence dans le cadre de la liberté d’expression».

« Cette décision met un coup d’arrêt à la tentative de bâillonner Yuka et de museler l’information sur les risques associés aux nitrites ajoutés. Nous sommes soulagés que les juges aient fait passer la santé des consommateurs avant les intérêts financiers des industriels », commente Julie Chapon, cofondatrice de Yuka.

En juillet dernier, l’Anses (Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail) a confirmé « l’existence d’une association positive entre l’exposition aux nitrates et/ou aux nitrites via la viande transformée et le risque de cancer colorectal ». Cet avis scientifique est venu appuyer encore davantage l’ensemble des études qui mettaient déjà en lumière les risques pour la santé de ces additifs.

Le verdict attendu est désormais politique : suite au rapport de l’Anses, le gouvernement s’est engagé à proposer des mesures avant la fin de l’automne.

« Au vu des risques pour la santé, le principe de précaution exige une interdiction de ces additifs, en France puis en Europe. Le gouvernement disait attendre le rapport de l’Anses, il est enfin là, il est maintenant urgent qu’il joue son rôle pour protéger la population », insiste Karine Jacquemart, directrice générale de foodwatch.  « Et ce d’autant plus que les industriels prouvent tous les jours dans les rayons des supermarchés qu’ils parviennent à se passer de ces additifs avec de larges gammes « sans nitrites » dont ils se vantent régulièrement dans des publicités, et qu’ils vendent souvent plus cher. Ce marché à deux vitesses est inacceptable. Une interdiction des additifs nitrés y mettrait fin définitivement », insiste-t-elle.

Enfin, Daniel Nizri, Président de la Ligue contre le cancer, met en garde : « Attention aux fausses solutions ! Une simple réduction des doses de ces additifs dans l’alimentation sur base volontaire des entreprises, idée défendue par certains, n’est pas du tout une solution acceptable pour la protection de la santé publique, particulièrement pour les populations les plus vulnérables. On parle de milliers de cancers évitables, à condition de ne plus être exposés à ces additifs dans la charcuterie et à leurs conséquences. »

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