Le Kyudo, pratique encore méconnue en France, est un art martial millénaire originaire du Japon. Bien plus qu’une activité sportive, le Kyudo est un état d’esprit, qui grâce une pratique, amène les archers à un « lâcher prise », état mental et émotionnel qui permet de faire le vide pour mieux se concentrer. Découverte.
(Mise à jour le 7 juin 2023) Malgré son apparente lenteur, le Kyudo est une activité physique intense. La posture corporelle exigée lors de sa pratique fait travailler les muscles en étirement et renforce le maintien (gainage musculaire). Le mental, qui doit être présent au geste, est apaisé. Une posture corporelle précise et une attitude intérieure juste permettra d’atteindre la cible sans tensions inutiles.
Un art martial millénaire alliant précision, concentration et harmonie
Dans le monde des arts martiaux, le Kyudo occupe une place particulière en tant qu’expression gracieuse et spirituelle de la discipline. Originaire du Japon, cet art martial est profondément enraciné dans la culture et la tradition du pays. Le Kyudo, ou « voie de l’arc« , est bien plus qu’un simple sport de tir à l’arc ; il incarne une quête de perfection, de maîtrise de soi et d’harmonie avec l’univers.
L’histoire du Kyudo
L’histoire du Kyudo remonte à plusieurs siècles, et ses origines sont profondément enracinées dans la culture japonaise. Le tir à l’arc a d’abord été utilisé comme un moyen de défense et de chasse, mais il a évolué au fil du temps pour devenir un art martial empreint de spiritualité.
Les débuts du Kyudo remontent au XIIe siècle, à une époque où le Japon était plongé dans des guerres et des conflits fréquents. À cette époque, l’archerie était essentielle pour les samouraïs, la classe guerrière dominante de l’époque. Les samouraïs utilisaient l’arc non seulement comme une arme de guerre, mais aussi comme un moyen de développer leurs compétences martiales et leur discipline personnelle.
Le Kyudo a commencé à prendre une dimension plus spirituelle au XIVe siècle, avec l’influence du bouddhisme zen. Les moines zen ont introduit des pratiques méditatives dans l’art du tir à l’arc, encourageant les archers à se concentrer sur leur respiration, à calmer leur esprit et à trouver l’harmonie intérieure. Le Kyudo est ainsi devenu une pratique qui visait à cultiver à la fois les compétences physiques et les qualités mentales des pratiquants.
Au fil des siècles, le Kyudo a évolué, se transformant d’une pratique guerrière en un art martial codifié. Les écoles de Kyudo, appelées « ryūha », sont apparues, chacune avec ses propres techniques, philosophies et styles. Ces écoles ont transmis le savoir et les traditions du Kyudo de génération en génération, préservant ainsi son essence spirituelle et son héritage culturel.
Le Kyudo a également été influencé par des valeurs telles que la courtoisie, le respect, l’humilité et l’harmonie avec la nature. Ces principes fondamentaux ont façonné la pratique du Kyudo, en en faisant bien plus qu’un simple sport ou art martial. Le Kyudo est devenu une voie pour la recherche de l’équilibre intérieur, de la maîtrise de soi et de la connexion avec l’univers.
Aujourd’hui, le Kyudo continue d’être pratiqué au Japon et dans le monde entier. Il est reconnu comme un trésor culturel japonais et a même été inscrit sur la liste du patrimoine culturel immatériel de l’UNESCO. Le Kyudo est apprécié à la fois pour sa beauté esthétique et pour ses bienfaits sur le plan physique, mental et spirituel.
Que ce soit pour les pratiquants cherchant à approfondir leur quête spirituelle, pour les amateurs d’arts martiaux souhaitant développer leur discipline personnelle, ou simplement pour les curieux désireux de découvrir une pratique traditionnelle et riche en histoire, le Kyudo offre une expérience unique et profondément enrichissante.
Les principes fondamentaux
Le Kyudo repose sur des principes fondamentaux qui guident le pratiquant tout au long de sa quête de maîtrise de soi. L’un des principes essentiels est le « hassetsu », qui signifie « huit points ». Ces huit points sont les éléments clés de la posture et du mouvement lors du tir à l’arc. Ils comprennent la position des pieds, la tenue de l’arc, la position de la main d’arc, la position du corps et la visée.
La concentration et la respiration sont également des aspects cruciaux du Kyudo. Les pratiquants apprennent à se concentrer pleinement sur leur cible, à synchroniser leur respiration avec leurs mouvements et à libérer leur esprit de toute distraction. C’est dans cet état de concentration absolue que le pratiquant peut atteindre l’harmonie avec lui-même et l’univers qui l’entoure.
Les bénéfices du Kyudo sur la santé
La pratique du Kyudo offre de nombreux bénéfices sur les plans physique, mental et spirituel. Voici quelques-uns des principaux avantages que l’on peut tirer de la pratique de cet art martial japonais :
Bien-être physique
Le Kyudo est une activité grand public. Sans risque pour le corps, elle est ouverte aux hommes et femmes de tout âge et de pratiquement toute condition physique. Cette discipline apporte à ses pratiquants une meilleure compréhension de leur corps. Ils apprennent à mieux gérer leur énergie, à développer leur souplesse et leur musculature profonde à travers les mouvements du tir et les déplacements qu’il implique.
La posture nécessaire à la pratique du Kyudo représente le principal intérêt « santé ». Elle demande au pratiquant une grande stabilité et un certain maintien qui renforce le squelette et les muscles, notamment ceux de l’axe du corps (dos, cervicales, épaules…). La gestuelle comprend des postures à genoux mais peut aussi se faire en restant debout pour ceux qui ont des problèmes de chevilles, de pieds, ou de genoux.
Comme dans tous les Arts Martiaux, la respiration tient une place prépondérante. C’est elle en effet qui donne le rythme tout au long du tir. Les pratiquants apprennent à maîtriser la respiration consciente et à respirer avec l’abdomen.
Développement de la posture et de la coordination : Le Kyudo met l’accent sur une posture correcte et équilibrée, ce qui favorise le développement d’une bonne posture corporelle. Les mouvements précis et fluides nécessaires pour tirer à l’arc aident à améliorer la coordination des mouvements du corps.
Renforcement musculaire et souplesse : La pratique régulière du Kyudo sollicite les muscles du dos, des épaules, des bras et des jambes. Cela contribue au renforcement musculaire global et à l’amélioration de la souplesse.
Bien-être psychologique
Le Kyudo permet aux pratiquants de développer concentration et attention aux autres. Une pratique régulière conduit à plus d’épanouissement et de sérénité et ouvre à l’harmonie entre le corps et l’esprit. « Quand je sors d’un tir de Kyudo, je me sens moi, je sens que j’existe et que c’est bon pour moi. » Régine Graduel (Renshi 6ème dan).
Parfois appelé « Zen debout » et depuis qu’il a perdu son orientation guerrière, le Kyudo est devenu un instrument de réalisation pour une meilleure connaissance de soi. Le « hara », centre énergétique qui se situe dans le ventre sous le nombril, est à l’origine du geste auquel il donne puissance et énergie. Une respiration bien maîtrisée puis intégrée dans la pratique contribue ainsi à un « lâcher prise », état mental et émotionnel recherché pour un bien-être quotidien.
Développement de la confiance en soi : En maîtrisant les techniques du Kyudo, en surmontant les défis et en améliorant leurs compétences, les pratiquants acquièrent une confiance en eux-mêmes et en leurs capacités. Cette confiance se répercute également dans d’autres aspects de leur vie.
Connexion avec la nature et la tradition : Le Kyudo est imprégné de la culture japonaise et de son lien profond avec la nature. Les pratiquants développent une sensibilité à l’environnement, une appréciation de la beauté naturelle et une compréhension des principes d’harmonie avec leur entourage.
Concentration et calme mental : Le Kyudo requiert une concentration totale et une attention focalisée sur le moment présent. En se concentrant sur la visée et le tir, les pratiquants développent leur capacité à éliminer les distractions et à atteindre un état de calme mental.
Discipline et maîtrise de soi : La pratique du Kyudo nécessite une discipline rigoureuse et une volonté de s’engager dans une quête d’amélioration personnelle. Les pratiquants apprennent à se fixer des objectifs, à persévérer et à cultiver la patience et la maîtrise de soi.
Tranquillité d’esprit : Le Kyudo est considéré comme une voie vers la méditation en mouvement. Grâce à la pratique régulière, les pratiquants peuvent calmer leur esprit, se libérer du stress et de l’anxiété, et trouver une tranquillité intérieure.
La pratique du Kyudo aujourd’hui
Aujourd’hui, le Kyudo est pratiqué dans le monde entier, tant par les Japonais que par les amateurs d’arts martiaux du monde entier. Des compétitions et des démonstrations sont organisées régulièrement, offrant aux pratiquants l’occasion de se mesurer les uns aux autres et de partager leur passion.
Le Kyudo est également apprécié pour sa beauté esthétique. Les mouvements fluides et gracieux du tireur à l’arc, associés aux costumes traditionnels et aux cérémonies rituelles, créent une atmosphère empreinte d’élégance et de respect.
La grande beauté de l’arc de Kyudo (asymétrique) implique une technique d’ouverture particulière. Quand le geste est réalisé correctement, l’archer et l’arc forment au moment de la pleine extension une figure circulaire d’une très grande beauté. Bien que ce soit le résultat à la cible qui détermine le classement pour les tournois, l’aspect compétitif au sens sportif n’est pas la motivation des maîtres et pratiquants. Il s’agit avant tout de réaliser une unité entre le corps, l’esprit, le cœur, l’arc, la flèche et la cible.
Sophie Madoun