Un essai clinique[1] mené sur un échantillon de 276 adultes, paru en novembre 2022 dans la revue scientifique américaine JAMA Psychiatry, réalisé sous la conduite du docteur Elizabeth A. Hoge du département de psychiatrie de l’université de Georgetown et l’appui d’Eric Bui, psychiatre, chercheur à l’université de Caen, sur la diminution du stress grâce à un programme de méditation de pleine conscience comparée à une psychopharmacologique de première intention montre que les résultats de la méditation de pleine conscience sont équivalents à ceux d’un antidépresseur.

La méditation de pleine conscience plus efficace qu’un anxiolythique

Cet essai clinique est la première étude qui établit scientifiquement que les résultats de la méditation de pleine conscience sont comparables à ceux de pharmacothérapie pour le traitement des troubles anxieux. La méditation de pleine conscience étant, en outre, mieux tolérée, avec moins d’effets indésirables, que la pharmacothérapie, sachant qu’il est démontré que, comme le montrent d’autres études, notamment celle de Davidson et al[2], la réduction des symptômes obtenue grâce à l’escitalopram est plus efficace que le placebo.

La méditation de pleine conscience s’avère donc être une option de traitement bien tolérée et d’une efficacité comparable à celle d’un médicament de première ligne pour les patients souffrant de troubles anxieux. La formation à la pleine conscience concentre l’attention sur le moment présent. Les individus s’entraînent à considérer les pensées et les sensations comme des phénomènes transitoires qui ne sont pas nécessairement le reflet de la réalité. Ce processus améliore la régulation des émotions et les patients deviennent moins réactifs aux pensées et aux sensations. En outre, la pleine conscience est pratiquée avec une attitude de non-jugement et d’acceptation qui, avec le temps, semble accroître l’acceptation de soi et l’auto-compassion .

Le programme de méditation de pleine conscience

Le programme méditation de pleine conscience (MBSR) suivi par les patients est un protocole de 8 semaines comprenant des cours hebdomadaires de 2,5 heures, une retraite d’une journée en cinquième ou sixième semaine et des exercices quotidiens de 45 minutes à faire individuellement à la maison. Les participants ont suivi des cours de MBSR dans des cliniques et des sites communautaires. Des instructeurs qualifiés leur ont enseigné la théorie et la pratique de plusieurs formes de méditation de pleine conscience, telles que la conscience de la respiration (focalisation de l’attention sur la respiration et sur les mouvements du corps), le balayage du corps (diriger l’attention sur une partie du corps) et le mouvement en pleine conscience (étirements et mouvements destinés à faire prendre conscience du corps et à augmenter la conscience interoceptive). Un instructeur de méditation de pleine conscience qualifié a examiné un enregistrement audio d’une séance de chaque instructeur afin de garantir l’homogénéité du traitement. L’assiduité des participants a été suivie par les instructeurs ou grâce aux déclarations des participants.

La médication à l’Escitalopram

La dose d’escitalopram était initialement de 10 mg par jour par voie orale, portée à 20 mg par jour dès la deuxième semaine si le médicament était bien toléré ou retardée dans le cas contraire. Le respect du traitement était mesuré par le comptage des pilules et le rapport du patient. Des points réguliers étaient réalisés avec un clinicien en semaines 1, 2, 4, 6 et 8. A l’issue de l’essai, les patients souhaitant continuer à prendre de l’escitalopram ont été accompagnés pour ce faire.

La méditation de pleine conscience réduit l’anxiété autant qu’un antidépresseur

Les patients ont été recrutés entre juin 2018 et février 2020. 276 adultes souffrant d’un trouble anxieux, diagnostiqués dans 3 centres médicaux universitaires urbains des USA ont participé à l’essai, 208 ont terminé l’essai. Les participants ont été randomisés pour recevoir pendant 8 semaines soit le programme de méditation de pleine conscience (MBSR) soit un antidépresseur, l’escitalopram[3]. Le principal résultat mesuré était le niveau d’anxiété évalué sur l’échelle d’impression clinique globale de la gravité (CGI-S), avec une marge de non-infériorité prédéterminée de -0,495 point.

L’échantillon primaire se divisait en 2 groupes : 102 pour la MBSR et 106 pour l’escitalopram. L’âge moyen des patients était de 33 ans. 156 participants (75 %) étaient des femmes. 32 participants (15 %) étaient afro-américains, 41 (20 %) étaient asiatiques, 18 (9 %) étaient hispaniques/latinos, 122 (59 %) étaient blancs et 13 (6 %) étaient d’une autre origine. Le score CGI-S moyen au départ de l’essai était de 4,44 pour le groupe MBSR et de 4,51 pour le groupe escitalopram. Au terme de l’étude, le score CGI-S moyen a été réduit de 1,35 pour le groupe MBSR et de 1,43 pour le groupe escitalopram. La différence entre les deux groupes était de -0,07, la limite inférieure de l’intervalle se situant dans la marge de non-infériorité prédéfinie de -0,495, indiquant la non-infériorité de la MBSR par rapport à l’escitalopram. Parmi les patients qui ont commencé le traitement, 10 (8 %) ont abandonné du groupe escitalopram et aucun du groupe MBSR en raison d’événements indésirables. Au moins un événement indésirable lié à l’étude est survenu chez 110 participants randomisés à l’escitalopram (78,6 %) et 21 participants randomisés à la MBSR (15,4 %). La méditation de pleine conscience réduit l’anxiété autant qu’un antidépresseur.

 

 Sources :

[1] Mindfulness-Based Stress Reduction vs Escitalopram for the Treatment of Adults With Anxiety Disorders – A Randomized Clinical Trial. Elizabeth A. Hoge, MD; Eric Bui, MD, PhD; Mihriye Mete, PhD; Mary Ann Dutton, PhD; Amanda W. Baker, PhD; Naomi M. Simon, MD, MSc

[2] Davidson JRT, Bose A, Korotzer A, Zheng H. Escitalopram in the treatment of generalized anxiety disorder: double-blind, placebo controlled, flexible-dose study. Depress Anxiety. 2004;19(4): 234-240. doi:10.1002/da.10146

[3] L’escitalopram, commercialisé, suivant les pays, sous différents noms, est un antidépresseur inhibiteur sélectif de la recapture de la sérotonine. L’escitalopram est utilisé dans le traitement de la dépression et de l’anxiété.

 

 

Université de Caen