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L’urticaire est l’une des affections dermatologiques les plus fréquentes à ce jour : 15 à 20 %1 de la population en présente au moins une poussée aiguë au cours de sa vie. Or cette pathologie qui peut être aiguë mais aussi chronique a un impact souvent sous-estimé sur la qualité de vie : 73 % des patients souffrant de façon chronique d’urticaire, disent éviter les sorties ou événements sociaux et ont une vie sexuelle altérée, 63 % souffrent d’anxiété et 38 % ont un sommeil perturbé2. Explications et traitements.

 

 

 

Une dermatose fréquente

L’urticaire est l’une des affections dermatologiques les plus fréquentes : 15 à 20 % de la population fait au moins une poussée aiguë au cours de sa vie, motivant 1 à 2 % des consultations de dermatologie et d’allergologie en France1. Elle est plus fréquente dans sa forme aiguë chez les personnes atteintes de maladies dites « atopiques », comme la rhinite allergique, l’asthme allergique ou la dermatite atopique4.
Cette maladie inflammatoire de la peau se présente sous la forme de boutons, de papules/plaques rouges et de démangeaisons pouvant être intenses (prurit) ressemblant à ceux provoqués par des piqures d’ortie. Cette maladie se manifeste par des symptômes « affichants » et invalidants. Les papules sont des lésions visibles et palpables de la peau. Elles se caractérisent par un gonflement de la peau (œdème), une rougeur (érythème) et provoquent des démangeaisons importantes (prurit). Ces plaques ont la particularité d’être mobiles et évoluent habituellement en moins de 24h1. Ces plaques apparaissent le plus fréquemment sur les bras et les jambes des patients5.
L’angioedème correspond à une urticaire plus profonde. Il se caractérise par un gonflement soudain et prononcé des tissus sous-cutanés. Les lésions sont pâles, plus douloureuses que prurigineuses et se résolvent spontanément dans les 72 heures qui suivent leur apparition 1,6 1,6. Il est généralement localisé au niveau du visage (paupières, lèvres), des mains ou des pieds2,4 .

La cellule clé de l’urticaire est le mastocyte. Il appartient au système immunitaire et est présent dans les tissus tels que la peau.
L’activation du mastocyte peut être :
Immunologique, si elle implique les effecteurs de l’immunité acquise : anticorps (IgE ou IgG), associations antigène-anticorps (complexes immuns circulants) ou lymphocytes T,
Non-immunologique : neuropeptides, cytokines, chimiokines, micro-organismes, froid ou chaleur, certains aliments ou médicaments

Lorsque le mastocyte est activé, une réaction inflammatoire se met en place. On peut considérer que cette réaction se déroule en trois temps : la phase immédiate, la phase intermédiaire et la phase tardive, chacune responsable d’un ou plusieurs symptômes de l’urticaire.

On distingue différents types d’urticaire en fonction de leurs durées et de leurs causes :

Les urticaires aiguës se caractérisent par l’apparition de symptômes d’une durée inférieure ou égale à 6 semaines. La crise d’urticaire aiguë consiste le plus souvent en un épisode unique. Les médicaments (anti inflammatoires non stéroïdiens, β-lactamines…), certains aliments (poisson, oeufs, crustacés…) absorbés dans les heures ayant précédé l’éruption et un grand nombre d’infections virales sont les principales causes d’urticaire aiguë 8.

Les urticaires chroniques évoluent depuis plus de 6 semaines1. La prévalence de l’urticaire chronique est autour de 1 % dans la population adulte 9. Ce type d’urticaire se divise en deux catégories selon l’identification de facteurs déclenchants :

– La majorité (66 à 93 %)2 des urticaires chroniques est dite spontanée car son apparition a lieu sans cause identifiée. L’urticaire chronique spontanée est caractérisée par la survenue de crises dont l’apparition et la durée sont imprévisibles2.
La durée de l’urticaire chronique spontanée est estimée en moyenne à 3-5 ans1 (ANAES).
L’urticaire chronique spontanée se manifeste principalement entre 20 et 40 ans. Elle touche deux fois plus les femmes que les hommes 2.
– L’autre catégorie d’urticaires chroniques, dites inductibles sont induites par des facteurs déclenchants déterminés – chaud ou froid, pression, friction cutanée, solaire, vibratoire. Elles représentent 4 à 33 % des urticaires chroniques2.

 Du diagnostic à la prise en charge : des patients parfois désorientés

Dans le cas de l’urticaire chronique spontanée, la cause n’en est souvent pas identifiée et les terrains favorisants, auto-immunité et atopie ne peuvent pas être facilement modifiés2.
Pour tous les patients atteints d’urticaire chronique spontanée, la recherche d’allergies a été la première démarche infructueuse et le diagnostic d’urticaire spontanée est souvent vécu comme insuffisant. Cela incite alors les malades à réclamer la répétition ou l’élargissement du bilan étiologique, et pose alors au médecin le problème du choix de la meilleure stratégie diagnostique et thérapeutique à adopter.
Le suivi de ces patients se révèle souvent compliqué. Ces derniers sont alors en recherche d’informations sur les causes et les solutions envisageables. Ainsi, une partie des patients se sent parfois isolée. Pour toutes ces raisons, la compréhension de la maladie devient une part importante de la prise en charge.

« L’urticaire chronique altère la qualité de vie. La plupart du temps, l’urticaire chronique est spontanée et n’a pas de cause identifiée. La prise en charge des patients atteints d’urticaire nécessite l’expertise clinique dermatologique permettant d’affirmer le diagnostic et de prescrire le traitement nécessaire. La majorité des urticaires chroniques spontanées sont sensibles aux antihistaminiques anti-H1. Les urticaires chroniques spontanées résistantes ont d’autres solutions thérapeutiques. » explique le Pr Annick BARBAUD, MD, PhD, Département de Dermatologie et d’Allergologie au sein des Hôpitaux Brabois à Vandoeuvre-les-Nancy, présidente du GERDA.

« L’urticaire est une maladie qui n’est pas toujours diagnostiquée et quand elle est chronique, les patients ne sont pas toujours bien orientés. Une consultation dédiée à l’urticaire dans des centres prenant en charge cette pathologie est importante pour éviter le nomadisme médical. Le développement d’ateliers d’éducation thérapeutique permettant au patient de mieux comprendre et maitriser sa maladie est primordial. Enfin le traitement de l’urticaire doit être adapté à chaque situation et à son retentissement sur la qualité de vie » ajoute le Dr Angèle Soria, MCU-PH, Service de dermatologie et d’allergologie – Pôle Spécialités Médicales à l’Hôpital Tenon.

« La cause de l’urticaire chronique spontanée est souvent inconnue, ce qui représente une réelle difficulté. La réponse apportée par le médecin aux patients est perçue comme insuffisante, le patient se sent alors désorienté, seul. » commente Christine Rolland.
III. … les jours avec et les jours sans : l’impact au quotidien

 

Une qualité de vie altérée

Comme le souligne Christine Rolland « Cette maladie fréquente, visible, a des répercussions physiques et psychologiques. Elle est source d’isolement car les malades ont une image d’eux même dégradée et souffrent du regard des autres ».
Une répercussion sur le bien-être à la fois physique et moral des patients
L’urticaire chronique interfère avec le bien-être physique et émotionnel des patients. La maladie, du fait de l’aspect inesthétique des lésions, de l’imprévisibilité des crises et de l’intensité des symptômes a notamment un retentissement significatif sur l’humeur, la résistance au stress et l’image de soi2.
Une étude sur 20 mois incluant 100 patients atteints d’urticaire chronique spontanée a montré que 48% des patients présentent un trouble psychiatrique, en particulier de l’anxiété (30%) ou de la dépression (17 %)10. En effet, le caractère parfois impressionnant de l’angioedème et de la survenue de nouvelles crises est un facteur très anxiogène pour le patient11.

Une répercussion sur la vie quotidienne et professionnelle

Les symptômes de l’urticaire affectent la vie quotidienne avec un impact physique et émotionnel pour les patients. D’après une enquête menée auprès de 321 patients atteints d’urticaire chronique en France et en Allemagne, on constate que les démangeaisons qui caractérisent les lésions d’urticaire sont source d’inconfort majeur. Celles-ci étant plus importantes le soir et la nuit, une partie des patients souffrant d’urticaire chronique voit la qualité et la quantité de leur sommeil diminuées :
• Les patients sont davantage gênés par leurs symptômes le soir (34 %) et la nuit (23 %)
• Un patient sur 5 (21 %) est dérangé par ses symptômes 3 nuits par semaine
• Pour 28 % des patients, les crises d’urticaire affectent de manière très importante le sommeil 5

Enfin, l’urticaire chronique interfère aussi avec la vie sociale des patients en impactant les relations avec les autres 2.
L’urticaire chronique a un impact sur les performances des patients au travail ou à l’école. Les patients sont souvent fatigués et anxieux et ont donc plus de difficulté à se concentrer.
D’après une étude menée aux USA sur 50 patients :
• Plus de la moitié d’entre eux avaient besoin de s’absenter à cause de leur maladie, avec en moyenne 1,5 jour d’absence par an par personne.
• Plus d’un quart étaient absents plus de 3 jours par an à cause de leur urticaire 13

 

 

Source

1 Agence Nationale d’Accréditation et d’Evaluation en Santé. Société française de dermatologie. Prise en charge de l’urticaire chronique. Conférence de consensus (texte long). Ann Dermatol Venereol 2003;130(Spec No 1):182-92.

2 O’Donnell BF, Lawlor F, Simpson J, Morgan M, Greaves MW. The impact of chronic urticaria on the quality of life. Br J Dermatol. 1997;136(2):197-201

3 Maurer M, Weller K, Bindslev-Jensen C, Giménez-Arnau A, Bousquet PJ, Bousquet J, Canonica GW, Church MK, Godse KV, Grattan CE, Greaves MW, Hide M, Kalogeromitros D, Kaplan AP, Saini SS, Zhu XJ, Zuberbier T. Unmet clinical needs in chronic spontaneous urticaria. A GA²LEN task force report. Allergy. 2011;66:317-30.

4 http://news.doctissimo.fr/Sante/Urticaire-chronique-des-symptomes-difficiles-a-tolerer-39514. (page consultée le 09/07/2015).
5 Maurer M, Magerl M, Metz M, Zuberbier T. Revisions to the international guidelines on the diagnosis and therapy of chronic urticaria. J Dtsch Dermatol Ges 2013;19:971-78.)
6 Maurer M, Ortonne JP, Zuberbier T. Chronic urticaria: an internet survey of health behaviours, symptom patterns and treatment needs in European adult patients. Br J Dermatol. 2009;160(3):633-41.
7 Staubach P, Dechene M, Metz M, Magerl M, Siebenhaar F, Weller K, Zezula P, Eckhardt-Henn A, Maurer M. High prevalence of mental disorders and emotional distress in patients with chronic spontaneous urticaria. Acta Derm Venereol. 2011;91(5):557-61.