Les bactériophages, souvent plus simplement appelés phages, sont des virus qui attaquent les bactéries, (phénomène appelé lyse). La phagothérapie est l’utilisation de ces virus particuliers pour traiter certaines maladies infectieuses bactériennes. Bien que largement utilisée avant la découverte des antibiotiques, la phagothérapie a été abandonnée par les pays occidentaux séduits par les avantages de l’antibiothérapie. Mais depuis 10 ans, les recherches reprennent. Explications.

Où en est la phagothérapie ? Depuis environ une décennie, la réintroduction des phages est repensée face à un double constat :
– l’évolution de la multirésistance des bactéries
– l’absence de développement de nouveaux antibiotiques
Cette situation est responsable de nombreuses impasses thérapeutiques et appelle des solutions nouvelles.

La recherche s’accélère et les résultats s’accumulent. Avec l’aide de la biologie moléculaire qui s’est développée grâce aux phages, on découvre aujourd’hui des propriétés intéressantes chez ces virus bactériens, “mangeurs de bactéries”.

Outre leur action naturelle destructrice et sélective des bactéries, signalons les deux effets supplémentaires associés les mieux étudiés à ce jour : la destruction d’une barrière protectrice, véritable gangue appelée et le renforcement de l’activité l’activité de certains antibiotiques. Dans ce contexte, il est envisagé de réhabiliter la phagothérapie dans le domaine médical mais aussi, vétérinaire, agricole ou même environnemental.
Il est important de signaler que les phages sont présents partout où il y a des bactéries c’est-à-dire dans tous les milieux naturels. Ainsi vivons-nous en permanence dans « un océan de phages » et tout organisme vivant héberge plus de phages qu’il ne comporte de cellules.

Qu’est-ce que les phages ?

Les phages ont été découverts pendant la Première Guerre Mondiale. Leur utilisation thérapeutique a été appliquée pour la première fois en France en 1919 par Félix d’Hérelle. En quelques années il a été montré qu’il est possible de lutter contre le staphylocoque doré, responsable de la furonculose ou des infections ostéoarticulaires.
Dès lors leur utilisation thérapeutique s’est propagée dans le monde entier dans de nombreuses indications. Les antibiotiques, apparus après la Seconde Guerre Mondiale, ont fait naître l’espoir que les bactéries seraient définitivement maitrisées par des trainements chimiques sophistiqués.

Aujourd’hui, il faut bien se rendre à l’évidence que ces espoirs ont été plus que décevants. Des souches difficilement décelables se propagent dans le monde entier, les échecs thérapeutiques sont de plus en plus nombreux. La situation des infections bactériennes devient préoccupante. Des solutions sont réclamées tant par des instances médicales que des responsables administratifs (Ministère, Agences du Médicament, etc.).

Les phages ont une action bien plus spécifique que les antibiotiques. Un phage lytique ne détruira que certaines souches d’une espèce bactérienne (Staphylococcus Aureus, par exemple). Contrairement aux antibiotiques dont certains ont un spectre très large, la spécificité des phages impose que l’on l’on connaisse précisément la bactérie responsable de l’infection avant de les utiliser comme traitement. Les diagnostiques rapides et la formulation de mélanges (cocktails) de phages peuvent répondre à cette problématique.

AVANTAGES DE LA PHAGOTHÉRAPIE

Les cellules qui constituent les organismes vivants (humains, animaux, plantes) sont complètement négligées par les phages.
Uniquement adaptés aux bactéries pathogènes que l’on souhaite attaquer, les phages thérapeutiques ne détruisent que les bactéries nuisibles et respectent les bactéries utiles. Ainsi les bactéries utiles dans l’organisme sont intégralement respectées. C’est pourquoi il n’a jamais été signalé d’effets secondaires graves dans l’organisme soigné. Les rares réactions, s’il y en a, sont la conséquence de la destruction bactérienne au début du traitement : maux de tête, élévation de la température, douleurs du foie. Les phages agissent rapidement et se répliquent en présence de bactérie cible. Une petite dose initiale suffit tandis que les antibiotiques métabolisés dès leur administration doivent être renouvelés périodiquement. En l’absence de la bactérie pathogène, les phages incapables de se multiplier sont détruits et/ou éliminés. La résistance aux antibiotiques des bactéries n’a aucun effet sur l’activité lytique des phages. La phagothérapie pourrait donc être utilisée dans le cas d’infections bactériennes en impasse thérapeutique pour cause de multirésistance aux antibiotiques.

INCONVÉNIENTS DE LA PHAGOTHÉRAPIE

Dans la mesure où certains phages, dits « tempérés », sont capables de s’intégrer au génome bactérien, il leur est reproché d’apporter des propriétés indésirables aux bactéries (résistances aux antibiotiques, virulence, toxines, etc.). Mais les phages thérapeutiques utilisés sont strictement lytiques. Enfin il est plus facile et plus rapide de rechercher et de trouver dans l’environnement de nouveaux phages actifs que de découvrir de nouveaux antibiotiques. Ce serait un avantage pour les pays en voie de développement.