D’après l’Institut de veille sanitaire 24 % des hommes et 37 % des femmes subissent un harcèlement moral au travail. Chuchotements, attaques répétées, brimades,… Chaque jour, des salariés hésitent à aller au travail, ne sachant pas comment ils vont pouvoir faire face au collègue ou au chef qui petit à petit brise leur vie. Mise au point.
Le harcèlement moral comprend des attitudes répétées et d’attaques régulières. Ces attitudes peuvent dégrader l’équilibre physique et psychologique et compromettre l’avenir professionnel du salarié. Ces procédés abusifs portent atteintes à la santé de la victime. Il ne faut pas oublier qu’harceler une personne c’est la détruire : mentalement, physiquement, professionnellement, familialement.
Repérez le harcèlement moral de votre boss
12 actes de harcèlement psychologique
Suite au suivi d’une centaine de patients, 12 actes de harcèlement moral au travail ont pu être identifiés. Ces actes ont été recensés par Marie Grenier-Pezé, Marie-Christine Soula, Paul Bouaziz, Martine Imbeaux, Catherine Roche, Nicolas Sandret, Sylvie Rondet.
1 – Les propos camouflés : remarques apparemment anodines, mais qui laissent planer un reproche, un doute, voire une accusation sans fondement.
2 – Le refus de communiquer : il vous délivre un minimum d’explications, vous transmet ses ordres par note de service et laisse vos dossiers sur son bureau.
3 – Le discours partial et mensonger : atteinte à votre réputation.
4 – Le refus de formation professionnelle.
5 – Le refus de soutien professionnel : il vous reproche d’avoir mal fait votre travail, même s’il aurait été impossible que vous le fassiez seul.
6 – Les compétences sont mises en doute : vos dossiers sont retirés sans raison avec l’exigence que votre travail soit vérifié et approuvé par un tiers. Il est ainsi sous entendu que vous n’êtes pas à la hauteur.
7 – Le manque de respect : il vous fait des commentaires sur votre apparence, vous parle avec mépris, dénigre vos façons de faire.
8 – Le harcèlement administratif : vous êtes bombardée de notes de service, d’évaluations, d’avertissements, et avez la nette impression qu’un dossier est monté contre vous. Et vous avez à tous les coups raison.
9 – Le contrôle excessif : votre travail est sélectionné et minuté, vos heures d’arrivée et de départ sont enregistrées, même vos déplacements aux toilettes sont notés.
10 – Les menaces : il n’arrête pas de vous dire que d’autres seront ravis de prendre votre place.
11 – L’intimidation : il crie, lance des objets, envahit votre bureau,…
12 – L’exclusion : on vous change de bureau, bien à l’acrt des autres ou vous met dans un mini local.
A savoir : Il n’existe pas de statistiques fiables pour déterminer précisément le nombre de tentatives de suicide au travail. D’après les prises en charge médicales on l’estime à 150 000 par an. D’après le psychiatre Christophe Dejours, « c’est un phénomène assez récent (…) qui correspond à des changements importants dans l’organisation du travail ».
Les conséquences du harcèlement moral au travail
Cette violence cause des dégâts psychologiques et physiques, sans que cela soit toujours repéré et reconnu par la personne elle-même. L’exposition prolongée aux attaques du harcèlement va entraîner une atteinte parfois irréversible (santé physique et psychique, déstabilisation familiale, exclusion sociale). Et comme nous l’entendons trop souvent dans les médias, certains se suicident pour y mettre fin.
Une personne victime de violences est d’abord déstabilisée sans en prendre conscience. C’est alors que des problèmes voient le jour :
– troubles psychosomatiques,
– irritabilité,
– manque de motivation,
– état anxieux permanent.
– état dépressif, lié à l’impossibilité de trouver une solution,
– abus d’alcool, de drogues ou de médicaments psychotropes,
– suicide.
Comment vous en sortir ?
Avant de réagir, vous devez
– analysez la situation le plus objectivement possible, afin de voir de si les choses peuvent s’arranger ou non.
– prenez conscience des abus.
– tentez de repérer chaque agression et à y mettre des limites.
– conservez une très bonne image de vous-même, car cette violence vous dévalorise.
Puis :
– consultez le médecin du travail
– adressez-vous à l’inspection du travail
– consultez votre médecin traitant et, en cas de besoin un psychiatre ou un psychologue
– consultez un syndicat
– consultez une association spécialisée dans le droit des victimes ou le harcèlement
– consultez un avocat spécialisé
– en cas de besoin, arrêtez-vous de travailler
– prenez note de tous les propos disqualifiant, de la charge abusive ou du manque de travail, des humiliations, de la dépréciation du travail, dévalorisation, pression, menace, tentatives d’isolement,… puis faites les parvenir par lettre au DRH.
– procurez-vous un magnétophone et enregistrez les dires de votre bourreau. C’est inutile juridiquement mais vous vous ferez mieux comprendre par votre entourage.
Que dit la loi ?
Les lois de mars 2002 et du 3 janvier 2003 prévoient qu’un employeur ayant eu ce genre de pratique s’expose à de gros soucis au niveau pénal. La haute autorité si elle est prévenue à temps peu contacter l’employeur, nommer un médiateur et faire en sorte que le harcèlement cesse. Si le salarié le souhaite elle peut l’aider à constituer un dossier pour entamer une procédure judiciaire. En effet, d’après l’article L.122-49 alinéa 1 du code du travail : » Aucune personne ne doit subir des agissements répétés qui dégradent ses conditions de travail, portent atteinte à ses droits et à sa dignité, altèrent sa santé physique ou mentale ou compromettent son avenir professionnel » . De plus, la loi L-122-51 du Code du travail met à la charge de l’employeur privé une obligation de prévention de harcèlement moral au sein de son entreprise. Le salarié, dès lors que sa santé physique ou mentale est menacée, peut s’adresser à un délégué du personnel ou à un syndicat qui bénéficie d’une action en substitution pour lui permettre d’agir en justice en cas de harcèlement moral au lieu et à la place du salarié moyennant son accord écrit.
A savoir : le conseil de prud’hommes peut statuer en urgence. En cas de carence ou de divergence d’appréciation entre l’employeur et le délégué, ce dernier ou le salarié concerné peut saisir le bureau de jugement du conseil de prud’hommes, qui statue en urgence.
Suite aux 25 suicides chez France Telecom, le gouvernement s’attaque aux risques psycho-sociaux dans les entreprises. Si d’ici le 1er février 2010, les sociétés de plus de 1000 salariés n’ont pas engagé de négociations pour prévenir le stress, elles seront sanctionnées. Dans un premier temps, le ministère du Travail rendra leurs noms publics. Plus tard « Nous feront un bilan en février et nous verrons à ce moment là » a déclaré Xavier Darcos, le ministre du Travail.
A lire :
Le malaise dans le travail – Marie-France Hirigoyen – Editions Pocket, 6,90 euros.
ABC de la victimologie – Sophie Madoun ; Gérard Lopez – Editions Grancher – 15,00 euros.
A voir :
J’ai (très) mal au travail – coffret de 2 DVD – Jean-Michel Carré – 30 euros.