Jusqu’à présent, seuls les pharmacies avaient le droit de vendre des plantes médicinales. Le Sénat a donné aujourd’hui son accord pour que ce savoir ancestral se transmette au mieux grâce aux herboristes.
La mission d’information du Sénat sur le développement de l’herboristerie et des plantes médicinales, une filière et des métiers d’avenir, constituée en avril dernier à l’initiative du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen (RDSE), a adopté le 25 septembre 2018 son rapport final présenté par Joël Labbé (RDSE – Morbihan), rapporteur.
Au cours de 36 auditions, tables rondes ou visioconférences complétées de deux déplacements en Maine‑et‑Loire et Drôme, qui lui ont permis de rencontrer une centaine de personnes (producteurs, cueilleurs, herboristes, pharmaciens, médecins, universitaires, chercheurs, entreprises industrielles ou artisanales de transformation, etc.), la mission a procédé à une large mise à plat de la « filière plantes », au cœur d’enjeux sociétaux liés à la santé, à l’environnement et au développement des territoires.
Pour sa présidente Corinne Imbert (Ratt. Les Républicains – Charente‑Maritime), « les échanges avec des acteurs passionnés et enthousiasmants ont souligné l’intérêt de la filière pour le développement des territoires et ses atouts en faveur de la préservation de la biodiversité végétale. Sa dynamique s’appuie sur des marchés porteurs : le recours à des soins perçus comme plus naturels fait écho à des attentes de nombre de nos concitoyens sur la façon dont ils souhaitent aborder leur santé au quotidien, rappelant que tout ce qui est naturel n’est pas sans danger. »
La mission d’information formule 39 propositions, qui marquent, pour son rapporteur Joël Labbé, « un point de départ » : « cette mission a mis en lumière l’incroyable potentiel de la filière des plantes médicinales notamment pour les territoires ruraux et les outre‑mer. Elle a aussi permis de poser les enjeux de la reconnaissance des métiers d’herboristes. Si nous ne sommes pas sortis avec des solutions clés en main sur ce sujet sensible, au carrefour du bien-être et de la santé, pour moi ce rapport n’est qu’une première étape : la mission a proposé la constitution d’un groupe de travail afin de poursuivre la réflexion. Je souhaite à titre personnel qu’il aboutisse à une proposition de loi. »
Les principales propositions visent à :
– assurer la transmission d’un patrimoine vivant, notamment en appuyant une démarche en vue de l’inscription des connaissances et savoir‑faire liés à la culture et à l’usage traditionnels des plantes médicinales sur la liste du patrimoine culturel immatériel de l’Unesco ;
– consolider la dynamique de la filière de production, en accompagnant le développement de formations agricoles spécialisées, la structuration des acteurs, les échanges et mutualisations ;
– valoriser une production française d’excellence et écoresponsable : la mission propose notamment de créer un label « Plantes de France », de fixer un objectif ambitieux de 50 % des surfaces cultivées en « bio » et de faire du soutien à la recherche en agronomie une priorité en particulier pour anticiper les effets du changement climatique ; elle préconise également de faire de la richesse végétale exceptionnelle des outre‑mer un levier de développement économique pour ces territoires ;
– adapter le cadre réglementaire sans transiger sur la sécurité des consommateurs : la mission propose notamment d’adapter certaines normes au caractère artisanal de l’activité de petits producteurs en vente directe, ou encore de réexaminer la liste des 148 plantes médicinales sorties du monopole pharmaceutique pour y intégrer des plantes des outre‑mer ou des plantes ne présentant pas de risque d’emploi, tout en étudiant la possibilité d’y associer leurs usages traditionnels reconnus et validés concernant des « petits maux du quotidien » ;
– intégrer les plantes médicinales à leur juste place au sein du système de santé, en consolidant les prérogatives des pharmaciens, en sensibilisant les médecins et l’ensemble de la chaîne du soin, tout en ciblant ces formations, dans les outre‑mer, sur les plantes et traditions locales ; la mission propose en outre de renforcer, dans le cadre d’un institut spécialisé, la recherche sur le potentiel des plantes en santé humaine comme animale.
Sur le sujet sensible de la renaissance d’un ou de plusieurs métiers d’herboristes, tels que les « herboristes de comptoir » ou « paysans‑herboristes », la mission propose que la concertation se poursuive avec l’ensemble des parties prenantes pour envisager les conditions d’une reconnaissance éventuelle de métiers d’herboristes et les contours des formations adaptées.
L’actualité de la mission d’information sur le site internet du Sénat :
http://www.senat.fr/commission/missions/herboristerie_et_plantes_medicinales.html