La recherche d’un vaccin contre le Covid-19 est en plein essor, et de nombreux candidats vaccins ont déjà atteint le stade des évaluations cliniques. La participation de la France aux essais cliniques est un impératif scientifique et stratégique pour garantir un accès à un vaccin sûr et efficace à sa population. C’est pourquoi l’Inserm, avec l’appui du réseau REACTing, de Santé publique France, des CHU et du collège des enseignants en médecine générale, lance une plateforme, baptisée COVIREIVAC pour l’évaluation des candidats vaccins contre le Covid-19 pour des essais de qualité.  

D’une ampleur inédite, la pandémie de Covid-19 a déjà causé plus de 500 000 décès à travers le monde. Alors que le nombre de nouveaux cas ralentit dans certaines régions, le virus continue sa progression, notamment aux États-Unis et en Amérique latine. Afin de le stopper, les espoirs de la communauté scientifique portent principalement sur le développement d’un vaccin. Plusieurs mois après l’identification du SARS-CoV-2 et son séquençage génétique, plus de 140 candidats vaccins ont été recensés par l’Organisation mondiale de la santé (OMS). Dix-sept d’entre eux sont déjà en développement clinique. L’Inserm met place une évaluation des candidats vaccins contre le Covid-19 pour des essais de qualité

Pour évaluer la sécurité et l’efficacité de ces vaccins potentiels, la mise en place d’essais cliniques rigoureux est plus que jamais nécessaire

Fondé par l’Inserm en 2007 et labellisé réseau d’excellence par son infrastructure nationale F-CRIN[1] en 2013, le réseau national d’investigation clinique en vaccinologie I-REIVAC bénéficie d’une grande expérience en recherche clinique vaccinale et d’une visibilité auprès des industriels, ce qui en fait un acteur incontournable pour l’organisation de tels essais.

Constitué de 24 centres cliniques hospitaliers répartis sur tout le territoire français, il permet en outre une participation étendue de la population française aux essais vaccinaux. Fort de cette légitimité, ce réseau sera la structure d’appui au projet baptisé COVIREIVAC, qui devrait permettre une évaluation clinique de qualité des différents candidats vaccins contre le Covid-19.

Un « guichet unique » pour la France

Ce projet part du constat que l’accès de la France aux candidats les plus prometteurs ne sera possible qu’en mettant en place un « guichet unique » au service des industriels et des académiques permettant d’évaluer ces produits, de garantir la faisabilité des essais cliniques auprès des industriels concernés et de négocier les conditions de production et de marchés. Cette approche implique à la fois l’instauration d’un « comité scientifique » chargé de réaliser une évaluation scientifique et stratégique des différents candidats vaccins, et le développement d’une plateforme nationale d’évaluation clinique des candidats vaccins Covid-19.

Présidé par la directrice de recherche Inserm et membre du comité CARE, Marie-Paule Kieny, le comité scientifique s’intéresse notamment aux caractéristiques des vaccins candidats qui pourraient donner des indications sur leur efficacité, leur sécurité et la capacité de production pour identifier les produits les plus intéressants. Il travaille en lien étroit avec la nouvelle plateforme vaccinale, sous la direction de la coordinatrice d’I-REIVAC Odile Launay, professeur en maladies infectieuses et tropicales à l’Université de Paris et coordinatrice du CIC Cochin Pasteur à l’hôpital Cochin (AP-HP), pour tester les vaccins lors d’essais cliniques rigoureux, pouvant inclure plusieurs centaines de participants.

Avec le soutien du réseau REACTing, de Santé publique France, des CHU et du collège des enseignants en médecine générale et afin d’accroître les capacités de participation du réseau aux essais vaccinaux Covid-19, la plateforme vaccinale aura pour objectif de constituer un pool de participants potentiels et d’augmenter le nombre de centres pouvant les accueillir.

Un suivi des potentiels effets secondaires, grâce à une collaboration étroite avec des réseaux de médecins généralistes et l’Agence nationale de sécurité des médicaments (ANSM), sera également proposé

« Faire face à la gravité de la pandémie de Covid-19 suppose d’assurer un accès aussi large que possible à la population française et européenne aux futurs vaccins. Grâce à un réseau vaccinal déjà existant, le projet COVIREIVAC peut conférer à la France l’attractivité nécessaire pour garantir une participation active aux grands essais vaccinaux et un accès précoce aux meilleurs candidats vaccins », précise Gilles Bloch, PDG de l’Inserm.

À plus long terme, l’initiative permettra aussi d’apporter des informations indispensables sur la sécurité de ces vaccins et sur la persistance de leur efficacité. Une collaboration avec d’autres pays européens, pour étendre le dispositif et permettre des essais cliniques de plus grande ampleur, est également envisagée. Évaluation des candidats vaccins contre le Covid-19 pour des essais de qualité pour une sécurité maximale est de mise.

Le Comité scientifique COVID-19 donne ses recommandations pour un vaccin contre le coronavirus

  • La mise à disposition du vaccin devra être simple. Il sera important donc d’alléger le circuit de vaccination (ordonnance, achat du vaccin, injection du vaccin) afin de que la vaccination soit perçue comme un geste facilement mis en œuvre et non chronophage.

 

  • La communication est une condition de réussite d’une campagne vaccinale. Elle doit être transparente sur les procédures ayant permis l’accélération de la mise sur le marché sans apparaitre comme ayant été menée au détriment de la sécurité, sur les incertitudes et les fondements scientifiques des recommandations. La communication devra explicitement

 

  • les « antibody-dependent enhancement (ADE) effects » observés pour certains coronavirus, responsables de rechutes graves de la maladie lors d’une deuxième infection.

 

  • préciser que l’accélération de la vitesse de développement des nouveaux vaccins ne concerne pas les étapes de sécurité, qui seront maintenues, mais les modes de développement et de production. Elle doit montrer, à partir de données vérifiables et quantifiées, éventuellement par des chiffres, l’intérêt de la vaccination en général pour que celle-ci reprenne sa place dans les schémas de prévention de santé. Les circuits de vaccination (prescription, mise à disposition, injection…) doivent apparaitre simples, sans multiples visites médecin-pharmacien-personnel vaccinant.

La communication institutionnelle ne doit pas ignorer une « contre-communication » hostile aux stratégies vaccinales. Elle doit être cohérente dans la durée, ainsi qu’avec les initiatives d’autres pays, notamment européens. La communication doit être réalisée en amont de la campagne, être différenciée selon les publics cibles et privilégier des valeurs positives, plus mobilisatrices. Une communication spécifique ciblant les « vaccinateurs » potentiels sera importante. Il sera également nécessaire de mettre l’accent sur l’aspect altruiste de la vaccination et évoquer une forme de « contrat social » en appelant à la responsabilité de chacun.

  • La stratégie vaccinale peut bénéficier de recherches en épidémiologie et en sciences sociales. Ces recherches permettent de mieux connaître les dynamiques de la vaccination et de d’identifier en particulier des réticences, des doutes et des sujets problématiques, pour y répondre avant qu’ils ne s’amplifient. Elles permettent aussi de préciser les moyens d’intervention en distinguant les publics visés (personnes âgées et vulnérables, personnes à risque, professionnels de santé…).

L’adhésion à la vaccination peut bénéficier d’une démarche participative, ouverte et transparente, de type « forum citoyen ». Les délais de mise à disposition d’un vaccin permettent d’en envisager l’organisation à horizon de quelques mois. Cette démarche peut favoriser la transparence, l’adhésion et la confiance, tout en favorisant la prise en compte d’exigences d’éthique, d’équité et de diversité des publics cibles. Elle peut constituer un espace partagé de débats contradictoires et pourrait être conduite en lien avec d’autres pays européens.

Point d’attention :

Un vaccin contre la COVID-19 offre de réels espoirs, mais l’adhésion de nos concitoyens à la vaccination est à construire. La communication, tout particulièrement, sera une des conditions de réussite de la campagne vaccinale. Elle doit être transparente sur les procédures ayant permis l’accélération de la mise sur le marché sans être au détriment de la sécurité, sur les incertitudes et les fondements scientifiques des recommandations. La communication doit être réalisée en amont de la campagne, être différenciée selon les publics cibles, et évoquer une forme de « contrat social » appelant à la responsabilité de chacun. Elle ne pourra que bénéficier d’une démarche participative, ouverte et transparente, de type « forum citoyen », associant en particulier les associations de patients.

Ces réflexions préliminaires devront être poursuivies par la HAS et le HCSP, avec des recommandations plus détaillées.

 

[1] French Clinical Research Infrastructure Network