On parle très souvent de personnalité borderline dans la presse. Vous vous sentez concerné? Vous vous demandé si vous ne seriez pas atteint par ce trouble? Pour en savoir plus et répondre à la sacro-sainte question êtes-vous borderline, lisez-vite ce qui suit!

La personnalité est un ensemble de caractéristiques psychologiques stables qui définissent la personne dans son unité, sa singularité, vis-à-vis d’elle-même et des autres. Certaines difficultés[1] peuvent survenir au cours du développement de la personne et être à l’origine de traits de personnalité dysfonctionnels. Lorsque ces traits s’intensifient, submergée par les émotions, la personne n’est plus en mesure de gérer les émotions qui la submergent. Elle devient incapable de répondre efficacement aux stimulations de son environnement. La personnalité devient pathologique. Le terme borderline est apparu pour la première fois dans la littérature médicale en 1884 avec Hugues aux États-Unis pour désigner des cas de symptômes physiques survenant au cours d’affections psychiatriques. Tous les symptômes psychiatriques peuvent se rencontrer dans les états limites. Ce polymorphisme clinique et symptomatique trouve sa source dans l’incapacité du patient à mettre en place des mécanismes défensifs stables ou des compromis symptomatiques efficaces. Alors, êtes-vous borderline?

Le trouble borderline, également appelé trouble de la personnalité limite(TPL) ou état limite, est encore perçu par un grand nombre de praticiens comme un « état intermédiaire entre trouble névrotique et trouble psychotique ». Or il n’en est rien.

Etes-vous borderline?
Le diagnostic peut se conduire de deux façons différentes :

1/ Certains praticiens peuvent conclure qu’il s’agit d’un état clinique qui n’est ni une névrose, ni une psychose, ni une perversion, ni un trouble de la personnalité classique, ni un état dépressif typique. Cette approche par élimination qui revient à cerner le concept de l’extérieur ne permet pas d’en appréhender la réalité. Le patient se retrouve ainsi, en fonction du clinicien, affublé d’un diagnostic par défaut, à dimensions variables, fourre-tout, sans homogénéité apparente.

2/ L’autre manière, centrée sur l’histoire du patient (anamnèse) et les symptômes récurrents, permet de tenter de définir le concept d’état limite en repérant des constantes, des caractéristiques permettant un diagnostic positif, et non un diagnostic d’élimination.

Les travaux effectués dans ce sens par Bergeret et ceux de Kernberg, sont une synthèse en 1975, de l’ensemble des recherches effectuées dans ce domaine depuis le début du 20ème siècle. Ils ont permis de dégager quelques éléments cliniques évocateurs du diagnostic, mais aussi et surtout des éléments psychopathologiques spécifiques du fonctionnement psychologique du patient borderline. Pour ces auteurs, les éléments cliniques sont des éléments de présomption diagnostique, et trouvent confirmation avec l’analyse structurelle du patient.

Dès lors, ce diagnostic ne peut être posé que dans le cadre particulier de consultations plutôt répétées qu’unique où le praticien s’ouvre au fonctionnement psychique du patient.

  • Des consultations répétées, cela signifie qu’un seul entretien ne permet pas de « cerner » la pathologie tant elle est polymorphe. En effet, le praticien peut ainsi imaginer, à la faveur des plaintes recueillies lors l’entretien que le patient exprime les symptômes d’un état dépressif profond. Il sera alors tenté de conclure à  un trouble bipolaire. Une autre fois, ce sont l’expression de symptômes liés à un comportement addictif (boulimie, anorexie…alcoolisme) qui retiendront son attention et entraineront une prescription de cure de désintoxication, alors que les comportements addictifs sont justement le moyen choisi par une personne borderline pour combler le sentiment de vide intérieur à l’origine de ses crises suicidaires.
  • S’ouvrir au fonctionnement psychique du patient ne se décrète pas[2]. Cela implique en premier lieu que le praticien prenne le temps de créer l’alliance thérapeutique. Il serait bien illusoire de croire qu’une seule séance suffise à réaliser cet élément indispensable au processus thérapeutique avec un patient borderline. S’ouvrir au fonctionnement psychique du patient implique également et surtout, la capacité du praticien à gérer les situations de transfert et de contre-transfert qui caractérisent les échanges avec ces patients.

Les personnes souffrant du trouble de la personnalité borderline éprouvent des états émotionnels intenses, (peur, colère, tristesse, honte…) qui s’accompagnent de sentiments de désespoir, de solitude, d’irritation ou d’anxiété survenant brusquement, envahissants et souvent difficilement contrôlables. Il s’agit du trouble le plus associé à la survenue d’idées de suicide et de comportements suicidaires, stratégies de dernier recours pour éviter la souffrance ressentie.

Le trouble de la personnalité borderline – ou état limite, est responsable aujourd’hui de plus de 2000 suicides par an et touche plus de 3,5% de la population. Les causes sont multiples : Le poids des secrets de famille et les incidences génétiques des ascendants mais aussi l’incidence de la perte de repères familiaux (divorces, familles recomposées…). Il est également prouvé que le processus biochimique d’une grossesse difficile peut prédisposer à une hypersensibilité émotionnelle de l’enfant. Enfin, les violences conjugales, les abus et les dévalorisations en famille ou à l’école, sont également pointées comme autant d’éléments susceptibles de participer à l’émergence du TPL (trouble de la personnalité limite) chez l’être humain en devenir.Incapables de gérer les situations génératrices de stress post-traumatique, les personnes qui souffrent du trouble de la personnalité limite compensent par les addictions (alcool, jeux en ligne), adoptent des conduites sexuelles à risques. Elles banalisent les drogues (cannabis, cocaïne, et autres drogues de synthèse) et tentent de combler leur faille narcissique par le culte de l’image et l’allégeance aux réseaux sociaux participant ainsi à la disparition d’un tissu social déjà défaillant au profit des relations virtuelles.Confrontés aux conséquences d’un délabrement psychologique d’un enfant ou d’un conjoint, les proches vivent un drame permanent tout comme certains soignants. Alors que faire, et surtout que dire lorsqu’on est confronté à une menace de suicide, à une crise de colère disproportionnée et souvent destructrice. L’hospitalisation est-elle la solution. Si oui, y a-t-il des services plus adaptés que d’autres ? Que faut-il attendre des différents traitements ? Si la solution de la psychothérapie ambulatoire s’avère la plus efficace, laquelle choisir ? Quel est le meilleur thérapeute ? Le trouble borderline, un trouble qui se soigne!

Les 4 grandes dimensions du trouble de la personnalité borderline

1- Une dysrégulation émotionnelle, c’est-à-dire la difficulté à réguler ses émotions. Les personnes borderlines sont hyper-sensibles. Surtout quand il réactive un ancien traumatisme, un évènement souvent anodin, peut prendre des proportions importantes et avoir des conséquences inattendues, souvent disproportionnées. Les personnes borderline peuvent adopter en une fraction de seconde des comportements d’une intensité émotionnelle importante, et avoir besoin de temps pour retrouver un semblant d’apaisement.

Elles s’enflamment facilement pour des causes, excessives dans leurs attitudes et dans leurs propos, elles excellent dans l’art de la rumination et adoptent des comportements « tout noir ou tout blanc ». Souvent dépourvues du sens de l’humour elles pratiquent plus volontiers l’autodérision.

2- Des actes impulsifs et autodestructeurs. Les personnes borderline adoptent souvent des comportements addictifs, hétéro ou auto-agressifs. Elles souffrent de troubles du comportement alimentaires (boulimie ou anorexie). Les automutilations (scarifications, tatouages, piercings…), les relations sexuelles à risques (non protégées avec des partenaires multiples…), les conduites de véhicules dangereuses, les idées ou les tentatives de suicide, font également partie de la panoplie des symptômes du trouble borderline.

  • Du point de vue neuropsychique, hypersensibilité et impulsivité vont de pair chez la personne borderline. L’impulsivité est la manifestation du laps de temps infime entre le moment où il ressent (une pensée ou une émotion) et le moment où il passe à l’acte pour y répondre. En faisant l’impasse de toute réflexion ou analyse de la situation, face à une tension émotionnelle qu’elle vit comme insupportable, la personne borderline adopte une réaction qui va la soulager très rapidement (prise de drogue, alcoolisation excessive et rapide, crise de boulimie, agressivité verbale ou physique, menaces de suicide…). Ce type de réponse démesurée correspond à une sorte de  comportement réflexe, s’avère inefficace sur le long terme parce que non raisonnée.

3 – Une grande instabilité dans les relations interpersonnelles. Dictées par la peur de l’abandon, l’angoisse du vide intérieur insupportable, les relations interpersonnelles sont généralement vécues comme intenses, conflictuelles, chaotiques et instables. Plus la personne borderline s’attache, plus la relation à l’autre devient difficile à gérer. Dans la relation intime, la personne est en quête d’avidité et de fusion mais tout en ayant des craintes très fortes (de se perdre dans l’autre ou d’être abandonnée). La relation est généralement destructrice et constitue souvent une mise en danger pour les deux protagonistes. Afin d’éviter la rupture (réelle ou imaginée), la personne borderline mettra alors tout en œuvre pour l’éviter. Les personnes borderlines vont avoir tendance à être hyper-entière dans les relations, à s’investir rapidement, et pleinement (voire trop). La relation nouvellement investie est généralement idéalisée. Et comme, au fur et à mesure du temps, l’autre ne répond pas à ses attentes, la personne borderline va devoir faire face à la déception. La relation va souvent être intense et instable, marquée par une alternance entre idéalisation de la relation, et dévalorisation. La personne borderline ne cesse de tester les limites de la relation, voire des comportements pour se faire aimer de l’autre au détriment du respect de soi.

4- Une perturbation au niveau de l’identité. Il s’agit d’un problème relatif à l’image de soi. La personne en souffrance possède une image très fragile, et très instable d’elle-même. Malmené par des traumatismes de l’enfance (abus, violences verbales ou physiques sur soi ou les autres) dévalorisations, moqueries, échecs… le borderline est entièrement dépendant du contexte, de la qualité, de l’intensité des relations et de l’environnement. Un seul mot, un seul regard, peut le détruire ou le réjouir.

Certains troubles cognitifs peuvent également surgir en cas de stress très intense tel que la dépersonnalisation, la dissociation ou bien encore le délire. Généralement ces symptômes sont de courte durée et ne dépassent pas quelques heures.

Les 9 symptômes pour diagnostiquer le trouble de la personnalité borderline

En reprenant les 4 grandes dimensions présentées ci-dessus, le DSM V (répertoire américain des maladies mentales) propose 9 symptômes (dont 5 au moins suffisent) pour diagnostiquer le trouble de la personnalité borderline :

1- Peur de l’abandon 
La personne fait des efforts effrénés pour ne pas se sentir seule, rejetée ou abandonnée, qu’il s’agisse d’un scénario réel ou imaginé.

2- Actes impulsifs

Conduites à risques : addictions (alcoolisation massive, drogues, jeu vidéo, relations sexuelles à risque), troubles du comportement alimentaires (anorexie et/ou boulimie)

3- Sensation de vide intérieur 
Impression douloureuse de ne plus rien ressentir, de ne plus exister, sentiment chronique de vide

4- Actes autodestructeurs

Répétition de comportements, de gestes ou de menaces suicidaires, ou d’automutilations

5 – Hétéro-agressivité

Colères intenses et inappropriées, souvent incontrôlables, qui s’expriment par des violences verbales sur les personnes ou physiques sur les objets

6- Perturbation de l’identité

Instabilité de l’image, de la notion de soi

7- Une dysrégulation émotionnelle 

Sensibilité exacerbée, vision dichotomique (tout blanc ou tout noir), changements d’humeur subits et imprévisibles, réactions émotionnelles intenses, dépression et anxiété, difficulté (à trop ou pas assez) gérer sa colère

8- Sentiment de paranoïa

Dans une situation de stress, la personne a le sentiment que l’on cherche à lui nuire ou a l’impression d’être déconnectée de la réalité

9- Problèmes relationnels

Modes de relations interpersonnelles instables et intenses


L’APPLICATION BORDERLINE ANONYMES

Déjà disponible en version test sur Google Play, et dans quelques semaines sur l’Apple Store, cette application a été spécialement conçue pour aider les personnes qui se reconnaissent dans le trouble de la personnalité borderline, également appelé trouble de la personnalité limite (TPL).

1. Entrez les informations demandées sur l’écran d’accueil.

2. Notez votre mot de passe sur un autre support pour ne pas l’oublier.

3. Choisissez le nombre d’alertes quotidiennes aléatoires ainsi que la sonnerie associée.

4. À chaque alerte, prenez quelques instants pour exprimer la nature de votre ressenti émotionnel à l’instant « T », indiquez, le ou les comportements associés ainsi que la ou les formes de compensations que vous adoptez ou non pour y faire face.

À la fin de la journée, cette application vous indiquera par un graphique la nature de l’émotion qui a dominé votre quotidien.

À la fin de la semaine, vous serez en mesure d’apprécier quelle est l’émotion dominante et déciderez d’y apporter les réponses adaptées pour trouver ou retrouver un mieux-être.

Au fil des mois il vous sera possible de constater vos progrès dans votre démarche de gestion des émotions et de les communiquer à votre thérapeute, si vous le souhaitez. Toutes les informations contenues dans cette application sont strictement anonymes.

A lire :

etes-vous-borderlineLes Borderlines, Bernard Granger, Daria Karaklic – Odile Jacob

Une personnalité borderline, c’est quelqu’un qui est d’humeur changeante, qui a des émotions intenses et excessives, une altération de la perception et du raisonnement. Elle peut éprouver un sentiment d’abandon, de persécution, voire de vide, s’automutiler, et même attenter à sa vie. Que faire alors si on est soi-même borderline ou si un proche l’est ? À qui s’adresser ? Quel doit être le comportement de l’entourage ? Dans ce livre, Bernard Granger et Daria Karaklic montrent que la dégradation, la violence et l’autodestruction ne sont pas une fatalité. Des solutions sont possibles et ce trouble a même de grandes chances d’être surmonté à condition que l’on soit bien soigné

 

[1] Le système borderline, histoires de familles – Pierre Nantas (l’Harmattan, 2019)

[2] La bienveillance, quand elle s’invite en psychothérapie – Pierre Nantas (l’Harmattan 2016)

 

Pour en savoir plus : www.aforpel.org