Une semaine après la présentation par le Gouvernement du plan de Relance qui prévoit, entre autres, une enveloppe de 15 milliards d’euros pour « les relocalisations et l’innovation », le cabinet de conseil Kearney livre aujourd’hui les résultats de son analyse sur les impacts et enseignements de la crise du Covid-19 pour l’industrie du médicament en France. Voici leurs 12 recommandations pour redynamiser la politique du médicament.
Chargé par le Leem en mai 2020 de mener une réflexion globale portant à la fois sur les impacts de la crise du Covid-19 sur le secteur et sur la contribution des entreprises du médicament à la relance économique et à l’autonomie stratégique sanitaire de la France, le cabinet de conseil en stratégie Kearney livre son diagnostic et ses 12 recommandations pour redynamiser la politique du médicament.
Le coronavirus, révélateur des forces de l’industrie du médicament…
La crise du Covid-19 a été un révélateur de la capacité d’adaptation des entreprises du médicament pour :
- Accélérer la recherche et trouver, dans les plus brefs délais, des réponses thérapeutiques à la pandémie,
- Augmenter les capacités de production pour assurer la continuité d’accès à tous les traitements,
- Mobiliser les 100 000 collaborateurs du secteur au sein du système de santé (Réserve sanitaire…) pour augmenter la capacité d’intervention des soignants et garantir à l’ensemble de la population la meilleure prise en charge possible.
Les résultats de l’étude Kearney corroborent ce constat avec un focus sur le caractère polyvalent et stratégique de l’industrie pharmaceutique :
- Une dimension de santé publique – une industrie acteur essentiel du progrès thérapeutique et de la réponse à la crise du COVID–19,
- Une dimension d’efficience et de transformation du système de santé,
- Une dimension d’acteur majeur de la reprise économique et de la relance de la politique industrielle française dans les territoires.
…et de ses fragilités
Si la crise du COVID a fait apparaître la formidable capacité de résilience et d’engagement du secteur, elle a, dans le même temps, révélé la fragilisation du tissu industriel français sur lequel le Leem alerte depuis des années. En France, comme partout ailleurs en Europe et dans le monde, la crise a montré une forte dépendance des chaînes de production internationalisées vis-à-vis de pays situés hors d’Europe, en particulier de la Chine, mais pas uniquement. Après un demi-siècle de délocalisation à marche forcée vers des pays à faible coût, la crise du Covid-19 a fait émerger une demande forte de sécurité sanitaire et économique, notamment en approvisionnement de médicaments. La France est aujourd’hui le 4ème producteur européen de médicaments en valeur (21 milliards d’euros produits) derrière la Suisse, l’Allemagne et l’Italie, après avoir occupé la 1ère place de 1995 à 2008. Elle est talonnée de près par l’Irlande et le Royaume-Uni. L’analyse du cabinet Kearney confirme ce tassement de la production industrielle française en comparaison de ses grands voisins européens (- 0,9 % entre 2010 et 2017, contre + 2,8 % pour l’Italie ou + 1,6 % pour l’Allemagne).
Les causes de cette perte de compétitivité sont connues du Leem et, pour certaines, bien documentées par les équipes de Kearney : lourdeur de la régulation économique, délais d’accès au marché, fiscalité de la production ou encore complexité et instabilité des normes. Les propositions identifiées par le cabinet Kearney recoupent l’analyse du Leem. Leur mise œuvre relève de plusieurs leviers distincts. Ainsi, la fiscalité de production est un sujet transversal qui dépasse le médicament et dont le Gouvernement vient d’annoncer l’allègement dans le prochain PLF. L’accord cadre, le CSF ou le CSIS pourraient également être les supports d’autres mesures.
Une nouvelle donne pour le système de santé
Autonomie stratégique (R&D et industrielle), transformation des processus industriels pour une production respectueuse de l’environnement, accroissement des plateformes de données de santé, coopération européenne, évolution des processus de financement de l’innovation… La crise du Covid-19 fait apparaître des besoins nouveaux. De manière plus globale, les constats de Kearney invitent à repenser la gouvernance de la politique du médicament autour de deux axes : une simplification et une vision plus holistique intégrant l’ensemble des parties prenantes (administrations publiques, industriels, mais aussi professionnels de santé et patients).
Pour Frédéric Collet, Président du Leem, « ce rapport inédit doit nourrir activement notre réflexion stratégique et notre contribution pour les échéances qui s’annoncent (Plan de relance, CSIS 2021, nouvel accord-cadre, plateforme électorale du Leem en vue de l’élection présidentielle de 2022…). Certaines recommandations du cabinet Kearney font d’ailleurs écho aux engagements pris par le Leem avant la crise sanitaire (lutte contre les ruptures d’approvisionnement, financement des médicaments d’innovation majeure, transformation de l’appareil de production, digitalisation de l’écosystème de santé, coopération européenne…). S’il est important de capitaliser sur ces pistes de réflexion, un certain nombre d’entre elles ne relèvent pas de la responsabilité de notre organisation professionnelle, mais des entreprises ou des seuls pouvoirs publics. Quoiqu’il en soit ce rapport est un marqueur précieux pour le Leem qui entend participer activement à la reconstruction économique du pays. Les annonces récentes nous encouragent et nous voulons croire à la reconnaissance stratégique du secteur pour assurer la disponibilité des traitements en toute circonstance et pour développer l’attractivité de la France. C’est dans cet esprit que nous serons attentifs à la cohérence des mesures qui seront prises tout au long des prochains mois. »
12 recommandations pour redynamiser la politique du médicament :
- Assurer une autonomie sanitaire stratégique.
- Faire de l’industrie du médicament en France un leader européen en termes d’innovation et d’industrialisation.
- Améliorer la compétitivité et la résilience de l’outil industriel.
- Établir une stratégie de partage, d’accès et d’analyse de la donnée de santé.
- Accélérer la digitalisation de l’écosystème de santé.
- Développer la coopération européenne.
- Rénover les mécanismes opératoires de l’écosystème en santé (refonte de la gouvernance et de certains processus public/privé).
- Augmenter l’efficacité et compléter le financement de l’innovation.
- Développer le capital humain au sein de l’industrie du médicament et des biotechs.
- Tirer les leçons de la crise pour adapter certains cadres légaux et réglementaires.
- Inscrire les actions de l’industrie pharmaceutique dans un cadre de développement durable.
- Consolider et mettre en œuvre un pacte d’engagements de l’industrie du médicament pour contribuer à la sortie de crise.
Synthèse de l’étude Kearney à retrouver sur www.leem.org