Vous avez perdu un être cher depuis des années et votre chagrin est toujours aussi intense ? Vous souffrez peut-être du trouble du deuil prolongé. Mais qu’est-ce exactement ? Comment s’en sortir ? Réponses.

Les deuils sont une étape naturelle de la vie, une réponse émotionnelle à la perte d’un être cher. Alors, pendant le « travail de deuil » on pleure, on crie (intérieurement). Mais que se passe-t-il lorsque cette douleur ne s’estompe pas avec le temps, prenant une place omniprésente dans notre quotidien? Connaissez-vous le  Trouble du Deuil Prolongé, une réalité méconnue mais cruciale à comprendre pour aider les personnes endeuillées qui en souffrent.

Quelles sont les différentes phases du deuil ?

Voici les différentes étapes du deuil. Attention, cela ne vaut pas pour tout un chacun ni dans le même sens indiqué car il n’y a pas de méthode miracle pour savoir comment faire son deuil.

Le déni

La phase de déni est souvent la première réaction après l’annonce d’une perte. Le monde devient soudainement étrange et sans sens. On a du mal à croire ce qui vient de se passer. Cette étape peut être vue comme une défense, permettant de tamponner le choc de la nouvelle.

La colère

Lorsque le déni s’estompe, la douleur refait surface, et pour la gérer, elle se manifeste souvent par de la colère. Cette émotion peut être dirigée vers des objets, des étrangers, des amis ou la famille. Elle reflète la douleur intense du deuil et de la souffrance de la perte.

La négociation

Pour éviter la douleur, la personne endeuillée peut tenter de négocier, souvent avec une puissance supérieure comme Dieu. C’est une étape pour faire son deuil, une étape de réflexion, de remise en question, où l’on cherche à trouver un sens ou un compromis à la situation.

La dépression

Contrairement à la colère, cette étape se caractérise par une sorte de tristesse et de regret. C’est le moment où l’individu prend réellement conscience de l’absence de l’être cher. Les sentiments de vide et de désespoir prédominent.

L’acceptation

C’est l’étape finale du deuil, mais cela ne signifie pas nécessairement le bonheur ou l’oubli. Il s’agit plutôt de l’acceptation de la réalité telle qu’elle est, permettant ainsi à la personne de trouver un moyen de continuer à vivre et à avancer.

Combien de temps pour faire son deuil ?

Après la mort de l’être aimé, le temps du deuil est très personnel car extrêmement douloureux et varie énormément d’une personne à l’autre. Il n’y a pas de durée fixe ou standard pour, comme on le dit vulgairement « faire son deuil », et il est essentiel de comprendre que chacun vit, ressent et traite le deuil à son propre rythme car rappelez-vous les pseudos phases du deuil sont une hérésie non reconnues par les psychologues et psychiatres.

En 2022, le DSM-5-TR de l’American Psychiatric Association a ajouté un nouveau trouble appelé « Trouble du Deuil Prolongé » à leur manuel. Beaucoup pensent que la pandémie COVID-19, qui a causé la perte de beaucoup de proches pour tant de gens, est une des raisons pour lesquelles l’association des psychiatres américains a décidé d’ajouter ce trouble. Selon le DSM-5-TR, si quelqu’un a un deuil qui dure plus d’un an, avec des sentiments très forts pour la personne disparue, un état dépressif qui perturbe (avec des envie de pleurer quotidiennement et parfois une culpabilité infondée mais bel et bien réelle pour la personne qui vit un deuil) et beaucoup de difficultés à continuer sa vie normalement, celui-ci souffrirait donc de ce Trouble du Deuil Prolongé.

L’idée d’avoir référencer ce trouble pathologique pour les personnes en situation de deuil cela est d’effectuer plus de recherches pour aider les endeuillés. De plus, quand un trouble est catalogué dans ce manuel, les assurances américaines peuvent aider à payer les traitements.

Cependant, tout le monde n’est pas d’accord avec cette décision. Certaines personnes pensent que le deuil est une réaction naturelle, même s’il est très intense ou dure longtemps, et qu’il ne devrait pas être considéré comme un problème médical. Il est important de ne pas mettre une étiquette sur tous ceux qui vivent un deuil intense.

Traditionnellement, la psychologie a décrit plusieurs étapes du deuil, notamment le déni, la colère, la négociation, la dépression et l’acceptation. Cependant, tout le monde ne passe pas nécessairement par toutes ces étapes et pas nécessairement dans cet ordre.

Plusieurs facteurs peuvent influencer la durée et la nature du deuil :

La nature de la perte : une mort soudaine ou inattendue engendre un deuil différent de celui d’une perte anticipée.

La relation avec la personne décédée : Perdre un conjoint, un enfant, un parent ou un ami proche a des répercussions différentes, plus intenses et donc plus longues.

Les circonstances entourant le décès : la mort par maladie, par accident, le deuil par suicide ou dans des circonstances traumatisantes affecte le processus de deuil le rendant particulièrement douloureux.

La santé mentale et émotionnelle : les personnes ayant des antécédents de dépression ou d’autres troubles mentaux peuvent vivre le deuil différemment après la mort de l’être cher et plus longuement que les autres.

Le soutien social : avoir des amis solides aide positivement le processus de deuil.

Rappelons-nous qu’il faut respecter le deuil, qu’il est courant pour certains de ressentir une douleur aiguë pendant les premiers jours et les premières semaines après la perte de l’être aimé, qui peut s’estomper, très progressivement, avec le temps. Cependant, pour d’autres, le deuil peut devenir chronique ou prolongé, nécessitant parfois un soutien thérapeutique.

L’important est de se rappeler qu’il n’y a pas de « bon » ou de « mauvais » deuil.

Qu’est-ce que le Trouble du Deuil Prolongé ?

Le Trouble du Deuil Prolongé, également connu sous l’acronyme TDP, se caractérise par une durée excessive et une intensité anormalement élevée du chagrin suite à la mort d’un proche. Il diffère du processus de deuil habituel par sa persistance et la détresse qu’il provoque. Ce trouble peut durer des mois, voire des années après le décès de la personne aimée (surtout lorsque la mort a été brutale due à un accident ou au suicide d’un proche), empêchant l’individu de faire face à la perte de l’être perdu à jamais et d’avancer dans sa vie.

Symptômes : comment le reconnaître ?

Reconnaître le TDP est la première étape vers la guérison. Les signaux d’alarme comprennent :

  • Difficulté à accepter le concept de la mort.

  • Émotions profondes et bouleversantes telles que la tristesse, la colère ou la rancœur à la suite du décès.

  • Confusion quant à son propre soi (comme ressentir qu’une partie de soi n’existe plus).

  • Une obsession ou fixation sur le défunt.

  • Tendance à fuir les souvenirs rappelant le décès.

  • Une difficulté à accepter le décès.

  • Le sentiment d’être isolé, loin des autres.

  • Problèmes d’adaptation après le décès, comme des défis à renouer avec ses amis, à retrouver ses passions ou à envisager le futur. Insensibilité émotionnelle.

  • Impression que l’existence est dénuée de finalité.

  • Isolement accablant, se ressentant comme étant coupé ou éloigné des autres.

Les facteurs favorisant le Trouble du Deuil Prolongé

Même si les causes exactes demeurent floues, certains éléments semblent accentuer le risque de TDP :

  • Un décès inattendu ou traumatique.
  • Une relation extrêmement proche ou complexe avec le défunt.
  • Des antécédents de troubles psychologiques.
  • Un manque de soutien émotionnel après le décès.

Impact de la pandémie COVID-19 sur l’augmentation des risques de Trouble du Deuil Prolongé (TDP)

La crise sanitaire de la COVID-19 a bouleversé le processus de deuil à travers le monde. L’absence de contact physique, l’impossibilité de rendre visite aux malades en fin de vie, et les restrictions entourant les funérailles ont rendu les adieux d’autant plus difficiles. Combien de personnes n’ont pas pu aller aux obsèques ? La nature soudaine de la pandémie a privé un grand nombre d’individus de la possibilité d’offrir ou de recevoir du soutien au moment le plus critique, que ce soit physiquement, par le biais des services hospitaliers, ou via les rituels de deuil traditionnels.

Statistiques alarmantes liées au TDP pendant la COVID-19

Selon les données préliminaires, environ 10 % des personnes confrontées à un décès « naturel » sont susceptibles de développer un TDP. Toutefois, des recherches récentes indiquent que la gravité du deuil ressenti à la suite d’une perte due au COVID-19 est nettement plus douloureux et intense. En tenant compte des décès en France, qui s’élevaient à plus de 230 000 en avril 2023, le nombre potentiel de cas de TDP pourrait se compter par dizaines de milliers dans les années à venir.

Recommandations pour gérer la hausse du Trouble du Deuil Prolongé post-COVID-19

Face à cette réalité, il est crucial d’alerter les professionnels de santé et la population sur l’ampleur du phénomène. Une formation adaptée permettrait aux soignants de détecter rapidement les signes du TDP et d’offrir une prise en charge adaptée aux personnes endeuillées. Il sera essentiel de porter une attention particulière aux groupes les plus vulnérables, tels que les personnes âgées et les jeunes ayant perdu un proche durant la pandémie.

Solutions et traitements disponibles

La bonne nouvelle ? Le Trouble du Deuil Prolongé, bien qu’ardu, n’est pas une fatalité. Il est possible de faire traverser le deuil, d’avoir un accompagnement d’un deuil après la mort d’un être cher par un psychologue ou psychothérapeute. Diverses thérapies, telles que la thérapie cognitivo-comportementale, ont prouvé leur efficacité contre la douleur du deuil et ce trouble. Dans certains cas, des médicaments peuvent aussi être prescrits pour soulager les symptômes et arriver à l’acceptation de la mort, l’acceptation de la perte, et donc la fin du deuil.

Ne stigmatisons pas les personnes souffrant de TDP

Quand on parle du « trouble du deuil prolongé« , il faut faire attention. Tout le monde vit la perte d’un proche différemment. Ce que l’on ressent après avoir perdu quelqu’un est souvent une réaction normale face à cette grande tristesse. Ce n’est que si quelqu’un n’arrive pas à avancer ou commence à avoir de gros problèmes mentaux qu’on pourrait dire qu’il y a un souci.

 

 

Sophie Madoun