Une nouvelle thérapie par ultrasons offre un espoir inédit pour traiter la dépression résistante, sans chirurgie ni médicaments.

 

Et si les ultrasons devenaient une nouvelle arme contre la dépression résistante ? Une équipe de chercheurs français vient de dévoiler une avancée scientifique majeure : une technologie non invasive, sans chirurgie, capable de stimuler en profondeur les zones du cerveau impliquées dans la dépression sévère. Testée pendant cinq jours sur des patients souffrant d’épisodes dépressifs résistants aux médicaments, cette méthode s’appuie sur des ultrasons focalisés de faible intensité. Les résultats, publiés dans la revue Brain Stimulation, sont prometteurs : réduction marquée des symptômes, excellente tolérance et espoir d’une solution rapide, personnalisée, et accessible.

 

Une révolution dans le traitement de la dépression résistante grâce aux ultrasons

 

La dépression sévère touche des millions de personnes à travers le monde. En France, une personne sur cinq en souffrira au cours de sa vie. Face à ce fléau, la recherche médicale explore des alternatives aux antidépresseurs classiques, souvent inefficaces pour certains patients. Une innovation récente ouvre de nouvelles perspectives : le traitement par ultrasons focalisés de faible intensité, non invasif, ciblant les régions cérébrales profondes impliquées dans la dépression.

12,5 % des adultes français touchés par un épisode dépressif majeur

 

D’après le Baromètre santé 2021 de Santé publique France, 12,5 % des Français âgés de 18 à 85 ans ont connu un épisode dépressif caractérisé dans l’année. Si les antidépresseurs restent le traitement de référence, leur délai d’action — souvent plusieurs semaines — et leur efficacité limitée (1 patient sur 3 ne répond pas bien aux médicaments) posent un réel problème de santé publique.

Pourquoi les approches classiques ne suffisent plus ?

La dépression résistante concerne environ un tiers des patients. Face à l’échec des médicaments, la stimulation cérébrale profonde représente une alternative, en particulier en ciblant la région cingulaire subcalleuse, connue pour son rôle clé dans les troubles de l’humeur. Mais jusqu’à présent, cette stimulation nécessitait une neurochirurgie lourde, avec implantation d’électrodes intracrâniennes. Une procédure invasive, risquée et réservée à une minorité de cas.

Des ultrasons focalisés pour stimuler le cerveau, sans chirurgie

C’est dans ce contexte que le GHU Paris, l’Inserm, le CNRS, l’Université Paris Cité et l’ESPCI Paris-PSL ont développé un traitement novateur utilisant des ultrasons transcrâniens de faible intensité. Publiée dans la revue Brain Stimulation, leur étude démontre la faisabilité d’un protocole non invasif sur cinq jours consécutifs, visant à moduler l’activité de structures cérébrales profondes.

« Les ultrasons ont la capacité de traverser les tissus humains et de stimuler à distance une zone cérébrale précise par action mécanique, en ouvrant des canaux mécano-sensibles », explique l’équipe de chercheurs.

Une technologie française au service de la santé mentale

Pendant des décennies, la variabilité de l’épaisseur du crâne humain rendait ce type de traitement impossible : les ondes ultrasonores se déformaient à travers l’os, empêchant toute focalisation précise. Mais des chercheurs français ont mis au point des lentilles acoustiques personnalisées, capables de compenser ces distorsions.

« Nous avons modélisé l’effet du crâne sur les ultrasons et conçu une lentille unique pour chaque patient », précisent Jean-François Aubry (CNRS), Thomas Tiennot (ESPCI) et Mickael Tanter (Inserm), co-auteurs de l’étude. Cette technologie brevetée est aujourd’hui portée par la startup SonoMind, qu’ils ont cofondée.

Un dispositif portable, non douloureux et bien toléré

Le dispositif développé est transportable, précis et parfaitement toléré. L’essai clinique mené au GHU Paris site Sainte-Anne par les psychiatres Marion Plaze et David Attali a porté sur cinq patients atteints de dépression sévère résistante. Chaque patient a reçu une séance d’ultrasons par jour pendant cinq jours.

« Les patients ne ressentaient ni douleur ni gêne durant les séances », rapporte l’équipe médicale. Mieux encore, une diminution moyenne de 60 % de la sévérité de la dépression a été observée au cinquième jour de traitement.

Prudence scientifique et espoirs mesurés

« Bien que les résultats soient encourageants, il faut les interpréter avec prudence, car il s’agit d’une première étude de sécurité sur un nombre limité de patients et sans groupe placebo », insistent les chercheurs.

Des essais cliniques complémentaires sont déjà prévus, sur des cohortes plus larges. Si les effets thérapeutiques sont confirmés, la stimulation cérébrale par ultrasons pourrait transformer la prise en charge de la dépression, mais aussi être utilisée en psychiatrie, neurologie, et addictologie.

25 ans de recherche pour une avancée médicale majeure

Ce traitement est le fruit de 25 années de recherche sur la focalisation ultrasonore, de 15 années sur la modulation cérébrale et de 7 ans de collaboration entre les équipes du GHU Paris, de l’Institut de Psychiatrie et Neurosciences de Paris, de l’ESPCI Paris-PSL et du CNRS.

Un projet soutenu par les plus grandes institutions scientifiques

Cette recherche a été rendue possible grâce au soutien de l’Inserm, du CNRS, de l’Université Paris Cité, ainsi que des financements de la Fondation Bettencourt Schueller, de l’Agence nationale pour la recherche, et du programme Focused Ultrasound Foundation (USA). L’Inserm a également soutenu le projet via son Accélérateur de Recherche Technologique en Ultrasons.

Une piste thérapeutique d’avenir pour des millions de patients

À terme, si les résultats sont confirmés, le traitement par ultrasons pour la dépression résistante pourrait être proposé dans de nombreux centres hospitaliers, de manière rapide, ciblée, indolore et sans chirurgie. Une nouvelle ère thérapeutique s’ouvre pour les troubles mentaux, et peut-être, demain, pour bien d’autres pathologies neurologiques.

Traitement par ultrasons pour la dépression résistante

 

Le traitement par ultrasons contre la dépression est-il douloureux ?

Non. Le protocole testé par les chercheurs du GHU Paris a été parfaitement toléré par les patients. Aucun d’entre eux n’a ressenti de douleur ou d’inconfort pendant les séances de stimulation transcrânienne par ultrasons focalisés. Il s’agit d’une technologie non invasive, indolore, et sans anesthésie.

Combien de temps dure une séance d’ultrasons ?

Dans l’essai clinique mené sur cinq jours, chaque patient recevait une séance par jour. La durée exacte varie selon les protocoles, mais les chercheurs soulignent que le traitement est rapide, ciblé et facilement réalisable en milieu hospitalier. Les dispositifs utilisés sont transportables, ce qui laisse entrevoir des applications en ambulatoire.

Quand ce traitement sera-t-il disponible en France ?

Pour l’instant, il s’agit d’une étude de phase préliminaire visant à évaluer la sécurité de la méthode. Des essais cliniques de plus grande ampleur sont déjà planifiés. Si les résultats se confirment, cette thérapie pourrait être accessible d’ici quelques années dans les services de psychiatrie et neurologie.

Est-ce une alternative aux antidépresseurs ?

Oui, potentiellement. Ce traitement par ultrasons s’adresse aux patients souffrant de dépression résistante, c’est-à-dire qui ne répondent pas ou peu aux médicaments. Il ne s’agit pas encore d’un remplacement des traitements classiques, mais d’une solution complémentaire pour les cas sévères ou chroniques.

Peut-on utiliser les ultrasons dans d’autres troubles psychiatriques ?

C’est l’un des objectifs à moyen terme. Si l’efficacité est confirmée dans la dépression, cette technologie de stimulation cérébrale non invasive pourrait s’étendre à d’autres domaines, comme les addictions, les troubles anxieux ou certaines pathologies neurologiques.

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