L’Autorité nationale des jeux a présenté le 23 février ses nouvelles « lignes directrices et recommandations » sur les publicités pour les jeux d’argent. Ces mesures vont dans le bon sens, notamment en ce qui concerne l’utilisation d’images de jeunes mineurs. Elles restent cependant peu contraignantes, faute de disposer de l’autorité légale nécessaire. Il est temps pour le législateur de prendre ses responsabilités.
Les opérateurs de paris sportifs ont mis en place des stratégies marketing agressives pour conquérir de nouveaux joueurs. Ce constat a notamment été mis en lumière par la coupe du monde de football en 2018 puis l’Euro en 2021. De fait les publicités pour les jeux d’argent doivent être mieux encadrées.
À quelques mois de la coupe du monde 2022, l’Autorité nationale des jeux a publié le 23 février de nouvelles lignes directrices et recommandations sur ce sujet, à la suite d’une consultation publique à laquelle la Fédération Addiction a participé. Ce document va dans le bon sens mais sa portée reste limitée par le cadre légal, qui doit donc évoluer.
Un contrôle accru du contenu des messages publicitaires
Les lignes directrices de l’ANJ (Autorité nationale des jeux) restreignent le contenu des publicités pour les jeux d’argent et de hasard. L’Autorité interdit ainsi toute représentation de mineurs dans les publicités mais également le fait de faire croire à « la possibilité de changer de statut social » grâce au jeu ou les « signes extérieurs de richesse ou de produits de luxe ».
Ces interdits sont conformes à certaines des recommandations que la Fédération Addiction avait communiquées à l’ANJ en novembre dernier. Il est cependant nécessaire d’aller plus loin : la Fédération souhaite notamment que les publicités pour les jeux d’argent et de hasard ne puissent pas utiliser l’image des sportifs1. C’est une mesure nécessaire afin de casser l’association entre joueurs et supporters que le marketing des opérateurs de jeu tente de créer.
Des recommandations pertinentes mais limitées par le cadre législatif et réglementaire
L’ANJ propose en outre des recommandations pour « limiter la pression des messages publicitaires ». Ces recommandations évitent la stigmatisation des publics ce qui est une bonne chose. Toutefois, comme l’Autorité le note, ces « recommandations ne revêtent pas de caractère impératif ».
Ainsi, par exemple, « les régies publicitaires sont invitées à limiter à trois, au sein d’un même écran publicitaire, le nombre de communications commerciales pour les jeux d’argent et de hasard, tous opérateurs confondus ». La Fédération Addiction propose d’aller beaucoup plus loin en mettant en place un Whistle to whistle ban : une interdiction des publicités pour les paris sportifs 5 minutes avant un match et jusqu’à 5 minutes après le coup de sifflet final qui a fait ses preuves au Royaume-Uni en réduisant de 97 % le nombre de pubs TV vues par des mineurs de moins de 17 ans. Cette mesure nécessite une adaptation du cadre légal : il faut que gouvernement et législateur prennent leur responsabilité !
Renforcer les dispositifs d’auto-exclusion et le repérage des joueurs problématiques
Autre point positif : l’ANJ recommande aux opérateurs de jeux d’exclure, avec leur accord, les joueurs identifiés comme joueur pathologique et ne bénéficiant pas d’une mesure d’auto-exclusion ou d’interdiction. Malheureusement, l’ANJ ne reprend pas notre proposition qu’un joueur qui s’auto-exclut chez un opérateur puisse l’être de tous les autres opérateurs de jeux. De même, elle ne recommande pas non d’utiliser des logiciels pour repérer les pratiques à risques ni d’utiliser des modérateurs de jeu.
L’addiction aux jeux d’argent et de hasard est la seule addiction comportementale reconnue par l’OMS. Et elle touche de plus en plus de jeunes mineurs, comme l’a montré une récente étude2.
Alors que la coupe du monde de football 2022 se profile, la Fédération Addiction continue de demander une plus forte réglementation de la publicité pour les jeux d’argent.