Est-ce que les poissons souffrent quand on les pêche ? Ce que dit la science sur leur douleur, leur stress et les moyens de limiter leur souffrance.
Est-ce que les poissons souffrent quand on les pêche ? Cette question, souvent considérée comme secondaire, suscite aujourd’hui un intérêt croissant parmi les scientifiques, les consommateurs et les défenseurs du bien-être animal. Si l’idée que les poissons ressentent la douleur semblait autrefois improbable, les recherches récentes montrent qu’il en va tout autrement.
Un rapport publié en juin 2025 par le consortium européen Carefish/catch, ainsi que plus de vingt ans d’études en neurobiologie animale, confirment que les poissons peuvent non seulement ressentir la douleur, mais aussi vivre un stress physiologique intense lors de leur capture. Cette souffrance, longtemps ignorée ou minimisée, peut durer plusieurs dizaines de minutes si aucune précaution n’est prise.
Des poissons qui semblent calmes… mais souffrent intensément
Est-ce que les poissons souffrent quand on les pêche ? Sur les marchés, les poissons fraîchement pêchés paraissent inertes, froids, silencieux. Mais ce calme apparent cache souvent une agonie prolongée.
D’après les observations des chercheurs à bord des bateaux, « bien que de nombreux poissons aient semblé actifs au moment de leur sortie de l’eau, leur vitalité a rapidement diminué ». En moyenne, les pageots devenaient inertes après seulement une heure. Ce comportement, associé à des marqueurs sanguins de stress (tels que le cortisol, le glucose ou le lactate), démontre un état de souffrance intense dès la capture.
« Le niveau de stress était déjà élevé au moment de la capture, probablement en raison de la lutte prolongée sur l’hameçon », indiquent les auteurs du rapport.
Combien de temps souffrent-ils avant de mourir ?
Lorsqu’un poisson est pêché à la ligne, le temps passé à lutter sur l’hameçon, puis le temps d’exposition à l’air sur le pont du bateau, sont des étapes critiques. Le stress monte en flèche dès les premières minutes. Dans certains cas, la mort peut prendre plusieurs dizaines de minutes si aucun étourdissement n’est effectué.
Il faut savoir que les poissons peuvent rester conscients durant cette période, tout en ressentant la douleur et l’asphyxie.
Est-il possible de pêcher sans faire souffrir les poissons ?
La bonne nouvelle, c’est que des solutions existent pour réduire leur souffrance. Le rapport met en avant plusieurs recommandations concrètes et faciles à mettre en œuvre :
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Réduire le temps passé sur l’hameçon, en relevant les lignes plus fréquemment.
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Utiliser des hameçons circulaires ou sans ardillon, qui blessent moins.
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Former les équipages à une manipulation plus douce des poissons à bord.
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Étourdir rapidement les poissons avec un coup précis sur la tête, suivi d’une saignée.
« Les pêcheries artisanales peuvent jouer un rôle moteur dans l’amélioration du traitement des poissons », affirme Fausta Borsani, du consortium Carefish/catch.
« Avec des ajustements relativement simples des équipements et des procédures, il est possible de réduire considérablement la souffrance – tout en améliorant la qualité du produit et la confiance des consommateurs. »
Est-ce que les poissons souffrent quand on les pêche
Ce que dit la science sur la douleur chez les poissons
Longtemps, on a cru que les poissons ne ressentaient ni douleur ni émotions, faute d’expressions faciales. Or, de nombreuses études récentes contredisent cette idée.
Les poissons possèdent des récepteurs sensoriels similaires à ceux des mammifères, capables de détecter les stimulations douloureuses. En laboratoire, ils modifient leur comportement lorsqu’ils sont blessés : ils mangent moins, évitent certaines zones, ou frottent leurs plaies sur des surfaces dures — autant de signes compatibles avec une expérience de douleur.
Vers une pêche plus éthique et responsable
Ce nouveau rapport s’inscrit dans une tendance globale : intégrer le respect du bien-être animal comme critère essentiel de la pêche durable. Le projet Carefish/catch collabore notamment avec Friend of the Sea, un organisme de certification, pour que ces bonnes pratiques deviennent la norme.
Le message est clair : mieux traiter les poissons, c’est possible, sans nuire aux pêcheurs. Au contraire, cela pourrait même renforcer la confiance des consommateurs et valoriser les produits issus de la pêche artisanale.
Faut-il arrêter de manger du poisson pour éviter la souffrance animale ?
C’est une question de choix personnel. Mais si vous consommez du poisson, vous pouvez déjà privilégier les espèces issues de pêcheries engagées dans des démarches de respect du bien-être animal. Des labels comme Friend of the Sea ou Fair-Fish commencent à intégrer ces critères.
« Ce rapport montre qu’en modifiant seulement quelques gestes, on peut épargner beaucoup de souffrance », rappelle Fausta Borsani.
Est-ce que les poissons souffrent quand on les pêche ? Ce qu’il faut retenir (et comprendre)
Les poissons ressentent la douleur de manière consciente, leur stress est mesurable scientifiquement, et leur souffrance peut durer plusieurs dizaines de minutes après leur capture. Pourtant, des gestes simples permettent de réduire considérablement cette douleur, sans nuire à la qualité de la pêche.
Voici les réponses aux questions les plus fréquentes sur ce sujet encore trop peu connu :
Les poissons ont-ils un système nerveux capable de ressentir la douleur ?
Oui. De nombreuses études ont démontré la présence de nocicepteurs chez les poissons, ainsi que des comportements spécifiques liés à la douleur (retrait, frottement, évitement, perte d’appétit).
Combien de temps un poisson peut-il souffrir après avoir été pêché ?
S’il n’est ni étourdi ni abattu rapidement, un poisson peut rester conscient entre 20 et 40 minutes, voire plus, selon la méthode de pêche. Durant ce temps, il subit une asphyxie et un stress intense.
Est-ce qu’on peut pêcher sans faire souffrir ?
Oui. En réduisant le temps passé sur l’hameçon, en manipulant les poissons plus doucement, en utilisant des hameçons sans ardillon et en procédant à un étourdissement rapide avant l’abattage, on limite fortement leur souffrance.
Comment agir en tant que consommateur ?
Vous pouvez favoriser les poissons issus de pêcheries certifiées respectueuses du bien-être animal (Friend of the Sea, fair-fish), éviter les espèces capturées avec des techniques traumatisantes, et vous informer sur les méthodes de pêche.
Sophie Madoun