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Touchant plus de trois millions de personnes en France, l’incontinence urinaire se définit simplement par la perte involontaire d’urine par l’urètre. Pour les patients chez qui elle se manifeste, elle pose un problème d’hygiène personnelle et de relations sociales d’autant plus important qu’il leur est souvent difficile d’en parler, y compris à leur médecin. Pourtant, les moyens de lutter contre ce trouble existent et sont de plus en plus variés. C’est pourquoi les urologues de l’AFU (Association Française d’Urologie) organisent chaque année depuis 2003 une Semaine d’information sur l’incontinence urinaire, ses origines, ses traitements, et les moyens de préserver la continence urinaire. À chaque semaine est associée un thème particulier. Cette année, la Semaine de la Continence urinaire, qui se tiendra du 7 au 12 avril, aura pour objet l’urgenturie.

Urgenturie : un symptôme faussement banal

L’urgenturie est un néologisme construit d’après la terminologie anglo-saxonne en urologie pour désigner une envie impérieuse et brusque d’uriner difficilement contrôlable et aboutissant le plus souvent à une perte d’urine. L’incontinence par urgenturie est distincte de l’incontinence d’effort dans laquelle la perte d’urine n’est pas précédée d’une sensation de besoin d’uriner, mais, comme son nom l’indique, consécutive à un effort, qui peut être modeste (toux, éternuement ; d’une manière générale, toute activité physique). Les deux types d’incontinence peuvent coexister chez le même patient, en proportion variable. On parle alors d’incontinence mixte.

Une affaire de spécialiste : l’urologue

L’incontinence urinaire par urgenturie existe à tout âge et dans les deux sexes. Bien qu’elle soit fréquente, elle ne doit jamais être considérée comme un symptôme banal : d’une part, parce qu’elle a un retentissement important en termes de qualité de vie, d’autre part, parce qu’elle peut être le signe d’une pathologie sous-jacente potentiellement grave : cystite, calcul vésical, tumeur de la vessie, maladie neurologique. Un avis spécialisé (urologue) est nécessaire avant de pouvoir l’attribuer chez l’homme à sa cause la plus fréquente, l’hyperplasie bénigne de la prostate, après s’être assuré de l’absence d’une pathologie sous-jacente. Pour la femme, chez qui l’incontinence urinaire d’effort est plus fréquente, il est important que l’urologue pose un diagnostic précis (IUE, incontinence par urgenturie ou incontinence mixte), afin de choisir un traitement adapté, une condition sine qua non de l’efficacité du traitement.

Un outil indispensable : le calendrier mictionnel

Ainsi, l’urgenturie doit faire l’objet d’une exploration spécialisée par un urologue. Celle-ci comporte toujours la réalisation par le patient d’un calendrier (ou catalogue) mictionnel : horaire de chaque miction, volume, caractère spontané ou à l’effort, éventuels symptômes associés (par exemple, brûlure à la miction). En fonction de la symptomatologie et des souhaits du patient, l’urologue proposera une prise en charge thérapeutique adaptée, dont il suivra les résultats.

Elargissement des alternatives thérapeutiques

Les moyens thérapeutiques sont proposés en fonction du bilan urologique, des souhaits du patient et des résultats des traitements essayés. Ce sont d’abord des mesures hygiéno-diététiques (boissons) et le traitement d’une cause éventuellement identifiée (y compris l’hypertrophie bénigne de la prostate). Le traitement peut être complété, notamment chez la femme, par la rééducation périnéale effectuée avec l’aide d’un kinésithérapeute spécialisé. Cette rééducation permet de renforcer le verrouillage des muscles du périnée1 afin de mieux résister aux envies pressantes ; elle permet aussi de jouer sur un réflexe qui agit, grâce à la contraction de ces muscles, sur la relaxation de la vessie.

Le traitement médical de référence de l’urgenturie est représenté par les anticholinergiques, dont l’utilisation chez l’homme doit absolument être précédée d’un avis urologique en raison de leur risque de défaut de vidange urinaire. Le traitement chirurgical est mini-invasif : pose d’une électrode de stimulation d’une racine nerveuse sacrée (S3) et d’un boitier sous-cutané de déclenchement. Cette neuromodulation sacrée a souvent de très bons résultats (+ de 50% de réponses). Cette gamme thérapeutique va s’enrichir prochainement de deux nouveaux outils. L’injection de toxine botulique devrait recevoir une AMM d’ici la fin du premier semestre 2014.

L’urgenturie se soigne de mieux en mieux

Les patients atteints d’incontinence urinaire par urgenturie ne sont donc pas démunis devant leurs troubles. Leur urologue dispose à la fois de moyens thérapeutiques éprouvés et bientôt de traitements innovants. Plus que jamais, ils doivent oser en parler à leur médecin généraliste, qui les orientera vers un spécialiste. Le site de l’Association Française d’Urologie – www.urofrance.org met à la disposition des patients et des professionnels de santé des informations utiles sur l’incontinence et ses traitements (fiches pathologies, fiches interventions, vidéos pédagogiques, etc.).

Place de l’urgenturie dans l’incontinence urinaire

Il existe trois types d’incontinence urinaire : d’effort, par urgenturie et mixte.

a)       Incontinence urinaire d’effort

Dans l’incontinence urinaire d’effort, la perte d’urine survient à l’occasion d’un effort physique plus ou moins intense (toux, éternuement, activité sportive, etc). Surtout fréquente chez la femme, même jeune, elle est souvent la conséquence d’un périnée fragilisé par divers traumatismes (accouchement difficile, chirurgie abdomino-pelvienne, constipation chronique, profession imposant le port de charges lourdes, pratique intensive de certains sports, perte de trophicité due à la ménopause, etc.).

Elle est la cause de la moitié environ des incontinences féminines (environ les deux tiers chez les femmes jeunes). Chez l’homme, elle est le plus souvent liée à une hypertrophie bénigne de la prostate.

b)      Incontinence urinaire par urgenturie

L’urgenturie désigne le besoin brusque et difficilement contrôlable d’uriner (impériosité dans l’ancienne nomenclature). Elle peut exister seule, mais s’accompagne le plus souvent d’incontinence par impossibilité de retarder la miction. On parle d’incontinence par urgenturie.

Elle a quatre types de causes :

une atteinte vésicale, quelle qu’elle soit : cystite (le plus souvent infectieuse et chez la femme ; parfois inflammatoire ou à la suite d’une radiothérapie), tumeur de la vessie, calcul vésical ;

certaines pathologies neurologiques (traumatisme de la colonne vertébrale, spina bifida, sclérose en plaques, accident vasculaire cérébral, neuropathie diabétique, maladie de Parkinson, etc.) ; l’incontinence en est parfois le premier signe clinique, pouvant révéler la maladie grâce à une exploration spécialisée ;

un obstacle à la vidange vésicale, par exemple une sténose de l’urètre chez la femme ou une hyperplasie bénigne de la prostate chez l’homme ; cette étiologie représente la majorité des incontinences masculines ;

il arrive qu’aucune cause ne soit trouvée : on parle d’incontinence idiopathique. L’incontinence par urgenturie peut exister seule, mais elle est le plus souvent elle est associée à d’autres symptômes : mictions fréquentes (pollakiurie) et/ou mictions nocturnes (nycturie – se produisant chez un patient éveillé, elle est distincte de l’énurésie, qui survient pendant le sommeil). Elle est le symptôme central du syndrome d’hyperactivité vésicale. Ce syndrome est la conséquence d’un trouble de la régulation consciente de la vidange vésicale. En effet celle-ci obéit à des mécanismes doubles, végétatifs (inconscients) et corticaux (conscients) : normalement, le besoin d’uriner augmente progressivement, depuis la sensation de vessie pleine jusqu’à celle de nécessité d’uriner ; le contrôle conscient permet de différer la miction pour des raisons de convenance sociale et d’environnement.

Il n’existe pas d’étude récente sur le retentissement de l’incontinence urinaire par urgenturie sur la qualité de vie. Mais il n’y a aucune raison pour que les résultats des études plus anciennes, assez rares, ne soient plus valables aujourd’hui : diminution des activités sociales (domestiques, professionnelles, sportives), par intermittence ou en permanence ; risque d’isolement ; perturbations émotionnelles ; troubles du sommeil. Ces troubles sont accentués par la difficulté ressentie par la plupart des patients à en parler à leur entourage, voire à leur médecin. Beaucoup d’entre eux attendent une résolution spontanée de leurs symptômes ou les minimisent, voire les trouvent « normaux ». « La difficulté pour les patients, c’est d’admettre leur incontinence urinaire, déclare le docteur Ariane Cortesse (Service d’Urologie de l’hôpital des Diaconesses et de l’hôpital Saint-Louis).

L’enjeu, c’est donc le dépistage,auquel est confronté le généraliste. Nous urologues, nous rencontrons des patients qui sont prêts à parler de leur incontinence, qui l’ont, en quelque sorte « avouée » et qui témoignent de la difficulté de vivre avec leur trouble. Ainsi, les patients les plus sévèrement touchés nous disent qu’ils n’ont plus de vie sociale, qu’ils ne sortent plus, qu’ils ne vont plus chez leurs amis, et parfois, même plus chez leurs enfants ».

c) Incontinence urinaire mixte

Très fréquemment, les deux types d’incontinence (d’effort et par urgenturie) coexistent chez le même patient. C’est le cas chez 30 à 40 % des femmes. Chez l’homme, les données épidémiologiques sont moins précises. En général, si la prévalence de l’incontinence – tous types confondus – augmente avec l’âge, il faut se garder de penser qu’il s’agit d’une pathologie de la personne âgée.

d) Le recours nécessaire à l’urologue

Afin de ne pas méconnaître une cause d’irritation de la vessie, voire une origine neurologique, tout patient atteint d’incontinence urinaire par urgenturie devrait être orienté par son médecin généraliste vers un urologue qui, en fonction de la symptomatologie, pratique ou prescrit les examens complémentaires susceptibles d’aider à poser le bon diagnostic.

L’urologue propose alors au patient de tenir un calendrier mictionnel : horaire des mictions, volume, caractère spontané ou à l’effort, sensation de vidange vésicale, gouttes résiduelles, pose de protection urinaire, symptômes associés (urgence mictionnelle, brûlures, douleurs, etc). Il l’interroge également sur son hygiène de vie : fréquence des boissons, horaires. Ce bilan oriente le diagnostic et permet souvent de donner quelques conseils hygiéniques de bon sens (par exemple, ne pas trop boire avant de se coucher). Pour le professeur Aurélien Descazeaud (service d’urologie chirurgicale de l’hôpital Dupuytren, CHU de Limoges), « le simple fait de remplir leur catalogue mictionnel améliore les troubles d’un certain nombre de patients.