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Nous savons depuis Hippocrate que le lien entre notre alimentation et notre santé est établit. Quels sont les aliments à privilégier ? Y en-a-t-il à bannir ? Le docteur Jean-Michel Lecerf du Service Nutrition de l’Institut Pasteur de Lille nous éclaire sur l’alimentation anti cancer.

 

Le lien entre l’alimentation et « le » cancer est l’objet de travaux depuis 40 ans environ avec les publications de Burkitt et de Trowell sur la relation inverse entre la consommation de fibres et le cancer colorectal et avec les études de Doll et Peto au début des années 80 sur le rôle du mode de vie dans la prévalence des cancers.

Depuis les données se sont considérablement enrichies et précisées.

Que sait-on aujourd’hui et qu’y a-t-il de nouveau ?

– La multifactorialité est une notion essentielle pour les cancers dans lesquels le mode de vie joue un rôle.

De très nombreux cancers, et pas seulement ceux du tractus digestif, peuvent être concernés.

Bien que la notion de facteurs protecteurs (notamment fibres, pré et probiotiques, « antioxydants », calcium…) soit de plus en plus évidente, il n’y a pas d’aliment « anticancer ».

Il existe une interaction entre les facteurs environnementaux et les facteurs génétiques qui modulent l’expression des premiers.

– Le rôle des additifs semble négligeable. Celui des contaminants en dehors des expositions professionnelles est probablement faible pour les cancers les plus fréquents ; l’exposition directe pourrait jouer un rôle pour certains cancers rares (lymphomes, tumeurs cérébrales,… ?

– Le sucre, les graisses ne « donnent » pas le cancer ; ni le saccharose, ni les graisses saturées. Mais en excès ils peuvent contribuer à la prise de poids.

Obésité abdominale, tabac, alcool en excès, sédentarité ont une responsabilité importante dans la survenue des cancers les plus fréquents.

– Il n’y a pas d’aliment cancérogène mais l’excès de consommation de viande est associé à un risque accru de cancer colorectal, surtout dans certaines conditions :

* cuisson inappropriée

déficit en fibres et en calcium

obésité, sédentarité associées

facteurs génétiques prédisposants

–  La consommation de yaourt et de produits laitiers joue un rôle protecteur vis à vis de la survenue du cancer colorectal.

La cuisson grillée des viandes et poissons induit la formation d’amines hétérocycliques et d’hydrocarbures aromatiques polycycliques (barbecue) cancérogènes : leur consommation augmente le risque de cancers digestifs mais aussi du poumon, du sein, du pancréas, des ovaires, de la prostate.

Les aliments sources d’antioxydants et de polyphénols (fruits, légumes, épices, thé, huile d’olive vierge, cacao, soja) jouent un rôle favorable, expliquant en partie le bénéfice d’une alimentation méditerranéenne.

– Les facteurs de croissance des aliments (lait en particulier) n’ont aucun effet délétère sur la mutagénèse, mais l’excès de protéines est un facteur de promotion de la croissance tissulaire connu.

– De nombreux travaux ont démontré de façon convaincante le rôle du soja dans la prévention et le pronostic du cancer du sein.

L’alcool est clairement impliqué, en faible excès, dans la survenue de nombreux cancers digestifs mais aussi du cancer du sein.

La prise de compléments alimentaires riches en antioxydants n’a pas d’effet défavorable démontré en prévention.

– Les études épidémiologiques montrent qu’une consommation moyenne (20-30 g/j) de charcuterie est associée à une plus faible prévalence de cancer colorectal qu’une consommation nulle ou élevée.

Nous insisterons particulièrement sur les points nouveaux ou sensibles : 

* rôle de la viande et des produits laitiers

* rôle des fibres et végétaux sources d’antioxydants

* effet de la cuisson

* intérêt du soja

Des voies de recherche s’orientent vers de nouveaux mécanismes (tels que l’inflammation et l’angiogenèse), de nouveaux acteurs tels que la flore intestinale et de nouveaux adjuvants tels que les acides gras Oméga-3. 

Cependant aucune étude humaine sérieuse ne montre l’intérêt du jeûne ni en prévention ni en thérapeutique. En prévention secondaire (récidives) l’augmentation des défenses immunitaires passe par un bon état nutritionnel, des apports nutritionnels suffisants, variés et équilibrés, un poids stable, une activité physique et la lutte contre la dénutrition. En cas de cancer avancé voire « dépassé » il peut être illusoire d’accroître les apports nutritionnels ; on maintient alors des apports de « confort ».