Des chercheurs de l’École nationale vétérinaire de Toulouse et de l’Inra et leurs collègues de l’université de Cambridge montrent, pour la première fois, que des prions de mammifères peuvent se propager chez un organisme modèle, la mouche du vinaigre, Drosophila melanogaster, tout en conservant l’ensemble de leurs propriétés biologiques. Ces travaux, publiés dans la revue Brain, le 08 juillet 2018, font de cet insecte un nouvel hôte d’intérêt pour étudier les mécanismes de réplication des prions afin de mieux comprendre les processus qui conduisent aux maladies neurodégénératives.

Responsables de maladies neurodégénératives mortelles qui affectent les animaux d’élevage, la faune sauvage et également l’homme, les prions sont des particules protéiques infectieuses, dépourvues de matériel génétique. La protéine du prion existe sous deux conformations, une forme normale (PrPC) et une forme mal repliée infectieuse (PrPSc) capable de transformer les formes normales (PrPC) en particule infectieuse.

Comprendre les mécanismes moléculaires et cellulaires de l’infection par le prion représente un défi auquel se sont attachés des chercheurs de l’Ecole nationale vétérinaire de Toulouse et de l’Inra et leurs collègues anglais. Ils viennent de franchir une étape importante, découvrant que des prions de mammifères sont capables de se propager chez un insecte, la mouche du vinaigre.

Organisme modèle bien connu des biologistes, facile à manipuler, la mouche du vinaigre, Drosophila melanogaster, ne possède pas de gène codant pour la protéine de prion ou pour une protéine apparentée. Les scientifiques ont exprimé chez cet insecte le gène codant pour la protéine prion ovine et ont exposé ses larves à différents prions affectant naturellement les ovins. Ils ont observé que ces prions se répliquent activement chez les mouches adultes, causant une neuro-dégénérescence associée à une baisse de l’activité locomotrice des insectes. De manière surprenante, les prions propagés chez la mouche du vinaigre conservent l’ensemble de leurs propriétés biochimiques et biologiques, y compris leur capacité à se propager chez des mammifères.

Ces travaux montrent pour la première fois que la réplication de prions de mammifères chez un invertébré est possible. Ils démontrent que les co-facteurs indispensables à la réplication des prions de mammifères ne sont donc pas spécifiques de ces derniers. Entre les modèles cellulaires in vitro et les mammifères, D. melanogaster constitue un modèle d’exploration biologique de choix pour lequel de très nombreux outils d’investigation existent. Il offre la possibilité de pouvoir s’affranchir de l’utilisation d’animaux de laboratoire pour étudier des maladies complexes qui jusqu’à présent ne pouvaient l’être que chez des mammifères A terme, l’étude de l’infection par les prions de mammifères, chez la drosophile, pourrait permettre de décrypter les mécanismes responsables de la neurodégénérescence dans les maladies à prions et de tester l’efficacité de composés thérapeutiques pour ces maladies.

 

Reference

Mammalian prion replication in Drosophila

Alana M. Thackray, Olivier Andreoletti and Raymond Bujdoso
Brain, awy183, https://doi.org/10.1093/brain/awy183

 

 

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