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Des cantines bio pour la santé des enfants

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Des cantines bio pour la santé des enfants et pour le respect de l'environnement est primordial. Terra Nova vient de rendre un rapport "Les enfants à table : accélérer la transition alimentaire dans les cantines scolaires".

Des cantines bio pour la santé des enfants et pour le respect de l’environnement est primordial. Terra Nova vient de rendre un rapport « Les enfants à table : accélérer la transition alimentaire dans les cantines scolaires ».

3,8 milliards de repas sont servis chaque année dans les restaurants collectifs français. Si on prend en compte les plats qui n’ont pas été consommés, ceux produits en trop grande quantité ou ceux écartés de la phase de production, le gaspillage alimentaire se situe le plus souvent entre 150 g et 200 g par personne et par repas ; soit entre 570 000 tonnes et 760000 tonnes de nourriture jetées chaque année dans la restauration collective152. Dans la restauration scolaire, il atteint 115g par repas. Des cantines bio pour la santé des enfants est primordial.

La qualité de l’alimentation servie aux enfants peut avoir un fort impact sur leur santé et leurs habitudes alimentaires. Servir une alimentation équilibrée et de qualité aux plus jeunes enfants permet de prévenir de nombreuses complications ultérieures, de réduire les inégalités de santé et, comme on le verra, de mettre les enfants dans une meilleure disposition pour apprendre.

Par le volume de repas qu’elle sert chaque année, la restauration scolaire a un fort impact sur l’environnement. Songeons que, à l’échelle nationale, la restauration collective représente 3,8 milliards de repas par an (une ville comme Paris servant à elle seule près de 30 millions de repas chaque année), dont une bonne partie dans les restaurants scolaires… Dans ce contexte, privilégier des produits issus d’une agriculture moins émettrice de GES et moins consommatrice d’intrants chimiques, c’est œuvrer de façon significative à la transition écologique.

Compte tenu des volumes concernés, les commandes publiques liées à la restauration scolaire forment un puissant levier économique. Elles peuvent notamment être utilisées pour stimuler un tissu productif plus responsable et favoriser des coopérations économiques vertueuses entre une commune et ses territoires voisins.

Enfin, les cantines sont aussi –ou devraient être –un lieu d’éducation au goût comme aux équilibres qui dépendent de nos choix alimentaires. Le jeune âge des publics concernés est une chance collective : c’est l’occasion d’installer des habitudes vertueuses, en réduisant notamment la consommation de protéines animales et en augmentant celle de protéines végétales. Transmettre aux enfants non seulement ces habitudes, mais aussi les compétences qui les sous-tendent, c’est en faire des agents actifs de la transition alimentaire à la fois dans leur famille et, plus tard, dans la société.

Le législateur a commencé à prendre conscience de ces enjeux. Les discussions lors des États généraux de l’alimentation l’ont montré, même si la focale principale de ces échanges a été mise sur le partage de la valeur entre les différents acteurs de la filière. Elles ont notamment débouché sur une loi connue sous le nom de « loi Egalim*». Dans son article 24, celle-ci prévoit que les structures chargées de la restauration collective devront atteindre au 1erjanvier 2022450 % de leurs achats en alimentation durable, définie par la loi comme devant regrouper 20 % de bio et 30 % d’alimentation sous signes de qualité, étant inclus ici des labels de qualité dont le cahier des charges ne comprend pas nécessairement de normes environnementales. Elle a également introduit à titre expérimental, et pour une durée de deux ans, l’obligation pour les cantines scolaires d’organiser un repas végétarien par semaine à compter du 1ernovembre 2019 (on sait en effet que la baisse de la consommation de viande contribue à réduire à la fois l’empreinte carbone de notre régime alimentaire et l’exposition à un certain nombre de risques sanitaires). Ce texte invite en outre à lutter activement contre le gaspillage et à limiter l’usage du plastique (contenants alimentaires, bouteille d’eau, etc.) qui feront l’objet d’interdictions formelles à partir de 2025.

Il ne suffit pas de vouloir proposer aux enfants une alternative végétarienne, encore faut-il que les cuisiniers et préparateurs soient formés à ce type de cuisine et en connaissent les contraintes et les équilibres. Il ne suffit pas de trouver un prestataire extérieur en délégation de service public qui assure le niveau de qualité requis, encore faut-il être de capable de construire un cahier des charges pertinent et de suivre précisément l’exécution du contrat. Il ne suffit pas de vouloir lutter contre le gaspillage pour protéger l’environnement et dégager les marges budgétaires nécessaires à l’achat de produits de meilleure qualité, encore faut-il connaître les techniques permettant de le faire et mettre en place des indicateurs de suivi précis. Il ne suffit pas de vouloir sensibiliser les enfants, encore faut-il les accompagner et, pour cela, pouvoir compter sur des personnels formés et reconnus. Bref, dans la réalité, ici comme ailleurs, il ne suffit pas d’avoir de bonnes intentions…

Les aliments ultra-transformés (AUT)

Les AUT appartiennent au quatrième groupe de la classification Nova7. Ce sont des produits industriels composés de plusieurs ingrédients et/ou additifs à visée industrielle ou cosmétiques (colorants, exhausteurs de goût, épaississants…) : ce sont de nouvelles matrices alimentaires artificielles riches en sucres, en sel et/ou en matières grasses, facilement digestibles et absorbables du fait de leur texture déstructurée. Ils sont souvent riches en calories « vides » : leur densité énergétique est élevée mais avec une faible teneur en composés bioactifs protecteurs, telles que les fibres, les vitamines, les minéraux et autres antioxydants. Les chercheurs se sont intéressés à l’impact sur notre santé de ces procédés de transformation et de nombreuses études suggèrent une corrélation positive entre la consommation régulière d’aliments ultra-transformés et l’augmentation du risque d’obésité, d’hypertension, de diabète de type 2, de certains cancers.

Les cantines scolaires, un enjeu de santé publique

Les cantines scolaires ont d’abord un objectif de santé publique. Elles permettent de «contribuer à l’équilibre nutritionnel de la journée», et de «lutte[r] contre l’obésité». En effet, l’accès quotidien à un repas complet, varié et équilibré est une nécessité pour la santé et l’aptitude à étudier des enfants60. Le CNA résume cette fonction de la manière suivante : «La raison première de la mise en place de la restauration scolaire est de répondre aux besoins physiologiques et nutritionnels des enfants et des jeunes, leur permettant ainsi de pouvoir suivre les enseignements de l’après-midi. Pour cela, il est nécessaire de leur donner des aliments sûrs, sains, en quantité suffisante et à leur goût.» Le ministère de l’Éducation nationale rappelle à cet égard les principes qui doivent être respectés : «Proposer quatre ou cinq plats à chaque déjeuner ou dîner, dont nécessairement un plat protidique accompagné d’une garniture, et un produit laitier ; respecter les exigences minimales de variété des plats servis ; mettre à disposition des portions de taille adaptée ; définir les règles adaptées pour le service de l’eau, du pain, du sel et des sauces.»

Apprendre de nouvelles saveurs aux enfants

Les habitudes alimentaires s’acquièrent en grande partie dans les premières années de la vie. Mais, si l’étape de la diversification alimentaire compte beaucoup dans l’acquisition de la capacité à accepter des aliments nouveaux, tout n’est pas joué dès l’âge de 3ans,et d’autres périodes sensibles peuvent se faire jour. La maternelle et les premières années du primaire peuvent ainsi correspondre à une période de néophobie alimentaire. Néanmoins,cette période est souvent temporaire. Il convient alors de répéter la présentation des aliments nouveaux, de les présenter sous différentes formes et diverses associations. Cette répétition permet à l’enfant de goûter et de s’acclimater au nouveau produit. Plus l’enfant grandit et plus il devient autonome. Il ne se contente alors plus uniquement de ce qui lui est imposé, mais imite les autres. L’apprentissage devient un moyen d’intégration au sein du groupe. Le temps du repas en restauration collective redouble alors d’importance : à la fois parce qu’il intervient à une période clé de la construction de l’enfant mais aussi parce que, pris en groupe, le repas devient un temps social et que la découverte de nouveaux aliments peut être facilitée par leur acceptation par les autres.

L’école primaire est ainsi un temps privilégié pour l’apprentissage alimentaire. Cet apprentissage évolue dans le temps en fonction de l’âge des enfants, du sexe, du groupe de pairs auquel l’enfant appartient et des pratiques sociales. Tandis qu’entre 3 ans et 8 ans on observe une hausse de la quantité alimentaire consommée, entre 9 ans et 14 ans, les quantités consommées augmentent toujours mais avec une restriction au niveau de la diversité.

Les âges concernés par l’école primaire forment au total une étape particulièrement sensible pour le développement des goûts et des préférences alimentaires des enfants alors même que les trois quarts d’entre eux connaissent une période de néophobie alimentaire. L’école du premier degré couvre de ce point de vue un temps dont il faut profiter pour installer les meilleures habitudes au regard de nos objectifs nutritionnels, sanitaires et environnementaux.

La mission éducative des cantines

la cantine doit être pensée comme partie intégrante d’une mission éducative, un lieu où, en cohérence avec les connaissances et compétences transmises en classe, on apprend à goûter et à aimer de nouveaux aliments, à manger ensemble, à heures fixes (on sait que la déstructuration des repas augmente les risques d’obésité et de surpoids71), en quantité raisonnable, en prenant le temps et en évitant que leur attention ne soit captée par des écrans. Naturellement, cet apprentissage du «bien manger» est aussi et d’abord de la responsabilité des parents : donner à ses enfants un repas équilibré, pris ensemble et dans le respect de ces règles, est la première chose que l’on peut faire chez soi pour préserver la santé de ses enfants. Mais la cantine « à la française » y contribue, elle aussi, car c’est là également que les enfants apprennent à se conformer, très tôt, à ces bonnes pratiques. La cantine,telle qu’elle est organisée dans notre pays, joue, de fait, un rôle très important dans l’éducation alimentaire des enfants. Et,pour certains, au même titre que les parents, puisque cette institution est la seule qui puisse se substituer à l’environnement familial ou social si nécessaire.

Le Conseil national de l’alimentation (Avis n° 77) prend d’ailleurs au sérieux l’objectif éducatif de la cantine en affirmant que la découverte, l’apprentissage de l’équilibre alimentaire, la transmission culturelle, la lutte contre le gaspillage et la formation citoyenne font partie de ses missions. Les cantines scolaires sont par ailleurs un lieu irremplaçable de socialisation et d’acquisition de règles d’hygiène et d’autonomie. Le déjeuner est un temps de socialisation et d’apprentissage des civilités et des codes sociaux (respect des règles de vie, partage de l’espace, etc.). Mais comme elle permet aussi aux enfants de découvrir et de manger ensemble de nouveaux plats et de nouveaux aliments, elle est aussi l’un des lieux privilégiés de la «construction de la sensibilité enfantine».

Enfin, il faut souligner que la mission éducative des cantines ne saurait faire oublier que le repas doit rester un moment de plaisir et que la qualité gustative des plats qui y sont proposés facilite les apprentissages qui y sont faits. Plus les repas seront appétissants, plus les cantines seront en situation de relever les défis de la transition alimentaire.

Des cantines locavores

Quand consommer bio n’est pas possible en raison d’une offre insuffisante, une étape intermédiaire consiste à adopter une consommation locavore, c’est-à-dire de saison et régionale. Ce choix est même parfois préférable à celui qui consiste à consommer des fruits et légumes bio importés, lorsque ceux-ci ont été produits sous serre de manière quasi industrielle, dans des conditions de travail peu exemplaires et avec une empreinte environnementale importante. Quant aux fruits et légumes bio produits en France hors saison, il faut avoir conscience qu’ils ont été souvent, eux aussi, cultivés sous serre chauffée et hors sol, entraînant d’importantes émissions de GES. La tendance à l’industrialisation du bio, entretenue par de grandes enseignes qui veulent pouvoir disposer de grandes quantités et casser les prix, comporte un réel risque de dévoiement des visées et principes originels de l’agriculture biologique. La vigilance doit donc rester de mise sur les pratiques adoptées lors de ce passage à l’échelle du bio, afin que ce label reste fiable, crédible et source de progrès environnementaux. Le temps qu’une production bio suffise à satisfaire la demande domestique, consommer local, de saison et des produits issus de filières de qualité (label rouge, élevage en plein air, AOC, etc.) permet également d’enclencher une transition alimentaire. De même, concernant la viande, des filières qualité semblent se développer (label rouge), en particulier pour les volailles(fermières, élevage en plein air, etc.).

Quoi qu’il en soit, dans le cas de la restauration scolaire, le mouvement de transition va devoir s’accélérer. L’article 24 de la loi Egalim prévoit, on l’a vu, que les structures publiques chargées de la restauration collective atteignent 50 % de leurs achats en alimentation durable, principalement bio et sous signes de qualité, au 1erjanvier 2022. Cet objectif n’est pas inaccessible. Quand le sujet est pris avec énergie et conviction, des solutions existent d’ores et déjà. Mais il faut accompagner et former le personnel119, les élèves et leurs parents, acheter des produits de saison, supprimer les achats à la portion, etc.

Manger 100 % bio, majoritairement local, et au même prix ; le pari réussi de Mouans-Sartoux

La commune de Mouans-Sartoux dans les Alpes-Maritimes compte 10 500 habitants. Après la crise dite de la «vache folle» en 1999, ses élus ont fait le choix de prendre en main la restauration scolaire (sous forme de régie municipale) et décidé d’introduire des produits bio dans les trois cantines de la commune (1 100 repas par jour, 143 500 par an). Aujourd’hui, Gilles Pérole, adjoint au maire en charge de l’éducation indique que 100 % des repas sont bio, que le gaspillage par repas servi est passé de 147 grammes à 30 grammes (une réduction d’un facteur 5), qu’il n’y a pas de plastique dans sa cantine, que les enfants consomment essentiellement des produits de saison, que pas un fruit n’est gaspillé et que les élèves sont globalement satisfaits de leur alimentation ; le tout sans contestation confessionnelle.Dans le même temps, les coûts ont été tenus. Le prix du repas en 2017 revient à 8,39 € TTC (y compris les coûts de personnel, d’administration, de culture, d’énergie, etc.) hors frais d’animation. Et il est facturé aux familles entre 2 € et 6,80 €, selon le quotient familial.

Pour parvenir à ces résultats, il a fallu aux élus de fortes convictions et beaucoup de volontarisme :

– création d’une régie agricole sur 6 hectares de terrain communal,avec l’installation de trois «agriculteurs communaux »;

– création d’une unité de conservation/congélation des fruits et légumes;–création de 3 cuisines intégrées aux 3 groupes scolaires;

– engagement de 21 agents travaillant au service restauration (un animateur pour 10 enfants en maternelle). Au final, 85 % des familles auraient modifié leurs pratiques alimentaires120, et les enfants sont éduqués autour des aliments qui proviennent de leur territoire. Plus récemment, une Maison d’éducation à l’alimentation durable (Mead) a été créée pour approfondir le projet en créant un lieu d’éducation, de recherche et de partage, afin d’essaimer le projet dans d’autres territoires.

Mettre en place une prime à l’investissement pour les cantines qui s’engagent dans la transition alimentaire

Voici les propositions de Terra Nova

Mettre en place une aide financière à l’entrée dans la transition alimentaire pour les collectivités qui doivent se plier à la loi sur le bio et le local. Passer au bio dans les cantines engendre une évolution des coûts en cloche, avec une hausse suivie d’une stabilisation, puis d’une baisse. Cette aide permettrait d’absorber une partie de la hausse initiale et donc, en accélérant la transition, de hâter ses bénéfices ultérieurs. Rappelons que, selon l’Ademe 176, pour 1euro investi par exemple dans les actions de lutte contre le gaspillage alimentaire, 2euros sont rapidement économisés.

Proposer une alternative végétarienne quotidienne à partir de 2022 dans les communes de plus de 100 000 habitants et diversifier les sources de calcium

Pour les raisons sanitaires et environnementales développées dans ce rapport, il apparaît urgent de diversifier davantage les apports en protéines dans les assiettes des enfants. En imposant à titre expérimental un menu végétarien par semaine dans les cantines scolaires à compter du 1ernovembre 2019, la loi Egalim permet de faire une partie du chemin179. Mais il nous semble qu’il faut aller plus vite et plus loin. Pour cela, un bon objectif serait de viser pour 2022 l’obligation de proposer à chaque repas servi une alternative végétarienne dans toutes les communes de plus de 100 000 habitants, ou dans celles proposant déjà deux choix de plateaux enfants, en privilégiant dans le plat principal le «fait maison» avec des produits bruts, les associations légumineuses-céréales et la diversification des sources de calcium (amandes, légumes verts…). Pour atteindre un tel objectif dans le respect des équilibres nutritionnels, il importera, comme il a été dit, de mieux former les cuisiniers aux équilibres d’une cuisine plus végétale ainsi que de diffuser une information cohérente auprès des enfants et de leurs familles. Cette option végétarienne quotidienne marquera un progrès sanitaire et environnemental. Mais elle assurera également un progrès culturel en garantissant le pluralisme alimentaire et la liberté de choix.

Réfléchir à une exception alimentaire de 30 % de produits régionaux dans les cahiers des charges

Nous proposons d’étudier la possibilité d’introduire dans le code des marchés publics une exception alimentaire permettant de conclure des marchés de gré à gré avec des petits producteurs locaux qui répondent rarement à un marché public, faute de moyens ou de compétences, et avec lesquels il peut être difficile voire impossible d’anticiper des approvisionnements à six mois alors même que les acteurs privés agissant dans le cadre d’une délégation de service public ont, eux, la possibilité de s’ajuster au dernier moment en fonction des quantités et des prix proposés. Cette exception alimentaire pourrait justifier l’introduction d’une marge de 30% de produits régionaux dans les cahiers des charges. Terra Nova. Les enfants à table Accélérer la transition alimentaire dans les cantines scolaires. Ces perspectives devraient être instruites sans attendre au niveau national comme au niveau européen.

* Loi pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous.

 

 

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