Le corps humain est constitué non seulement de cellules humaines, mais aussi de microbes, 10 fois plus nombreux que nos propres cellules. Parmi ces communautés, le microbiome intestinal1 semble associé à certaines maladies inflammatoires et métaboliques, comme l’obésité. Il a récemment été montré que la composition de ces bactéries intestinales est modifiée par l’industrialisation, entrainant notamment une baisse de diversité bactérienne, ce qui peut poser un problème de santé publique. Cependant, l’influence respective de l’alimentation, du climat, des parasites intestinaux ou encore des pratiques sanitaires (dont la consommation d’antibiotique) n’est pas élucidée.
Dans une étude récente menée par Laure Ségurel (CNRS – Muséum national d’Histoire naturelle / Musée de l’Homme), une équipe de chercheurs2 a séquencé le microbiome intestinal de 64 individus vivant au Cameroun dans un même écosystème (en forêt tropicale humide) mais différant par leur mode de vie (chasseurs-cueilleurs vs agriculteurs vs pécheurs).
En accord avec de précédentes études, ils ont trouvé que l’alimentation constitue un déterminant majeur du microbiome intestinal. Cependant, ils ont également montré, pour la première fois, que le fait d’être ou non porteur d’un parasite intestinal, ici une amibe (Entamoeba), est fortement et significativement associé à la composition et à la diversité bactérienne intestinale. La présence de parasites eucaryotes semble donc importante à prendre en compte dans l’étude des microbiomes et la compréhension de leur biodiversité. Ces amibes pourraient directement influer sur le microbiome du fait qu’elles se nourrissent de certaines bactéries ou indirectement à travers une modification du système immunitaire de l’hôte.
Référence : Morton ER, Lynch J, Froment A, Lafosse S, Heyer E, Przeworski M, et al. (2015) Variation in Rural African Gut Microbiota Is Strongly Correlated with Colonization by Entamoeba and Subsistence. PLoS Genet 11(11): e1005658.
doi:10.1371/journal.pgen.1005658
Note :
1- Le microbiome intestinal est l’ensemble des micro-organismes du système digestif.
2- Elise R. Morton, Joshua Lynch et Ran Blekhman sont affiliés au Département de « génétique, cellule de biologie et développement » et au Département « écologie, évolution, et comportement » de l’Université du Minnesota, Minneapolis, États-Unis.
-Alain Froment, Sophie Lafosse, Evelyne Heyer et Laure Ségurel appartiennent à l’unité Eco-anthropologie et Ethnobiologie (UMR 7206 CNRS-MNHN-Université Denis Diderot) du Museum national d’Histoire naturelle, Paris, France.
-Molly Przeworski travaille au Département de Sciences biologiques de l’Université de Columbia, New York, États-Unis.
MNHN