Le Sénat reconnaît la responsabilité de l’État dans le scandale du chlordécone. Loi historique pour les victimes en Guadeloupe et Martinique.
Ce 12 juin 2025, le Sénat a adopté en première lecture, par 318 voix contre 1, une proposition de loi majeure reconnaissant la responsabilité de l’État dans le scandale sanitaire du chlordécone aux Antilles. Ce texte marque une avancée historique pour les victimes du chlordécone en Guadeloupe et en Martinique.
Un pesticide toxique et persistant autorisé pendant 20 ans
Le chlordécone est un pesticide organochloré classé comme perturbateur endocrinien et cancérogène probable. Utilisé de 1972 à 1993 dans les bananeraies antillaises, il a été autorisé en France malgré des alertes scientifiques dès les années 1960 sur sa dangerosité et sa persistance environnementale.
Ce produit a entraîné une contamination massive des sols, des eaux, de la faune marine, des cultures vivrières et des cheptels. Aujourd’hui, il est encore présent dans l’environnement.
« C’est l’ensemble de l’environnement et du biotope qui est concerné par la contamination au chlordécone dans les Antilles », rappelle Nicole Bonnefoy, rapporteure du texte.
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Des conséquences sanitaires graves sur plusieurs générations
L’exposition au chlordécone est liée à :
– un risque accru de cancer de la prostate
– des troubles du développement cognitif chez les enfants exposés in utero
– une suspicion de baisse de fertilité chez les femmes
La communauté scientifique estime que la pollution au chlordécone constitue un scandale sanitaire d’ampleur comparable à celui de l’amiante.
« Le rôle de la science et de la recherche permettra, au fil du temps, d’affiner et de préciser le lien entre l’exposition au chlordécone et le développement d’un certain nombre de pathologies », ajoute la sénatrice Nicole Bonnefoy.
Une loi qui reconnaît officiellement la responsabilité de l’État
L’article 1er de la proposition de loi acte la responsabilité de l’État dans les préjudices causés par l’utilisation du chlordécone. Ce geste symbolique répond à une revendication ancienne des populations antillaises, des associations de victimes et des élus locaux.
Le texte prévoit également :
– un plan de dépollution des sols et des eaux
– la création d’un principe d’indemnisation des victimes du chlordécone
– le renforcement de la recherche sur les effets du pesticide, notamment chez les femmes
Une priorité nouvelle donnée à la recherche sur les femmes
Le texte enrichi en séance par les sénateurs insiste sur la nécessité d’intensifier la recherche sur les femmes exposées au chlordécone. Les études actuelles sont encore trop limitées, alors que les effets sur la fertilité, les grossesses et le système hormonal sont suspectés.
Cette avancée a été saluée par les collectifs féminins, qui réclamaient une prise en compte différenciée de l’exposition féminine.
Une victoire symbolique après des décennies de combat
Depuis plus de vingt ans, chercheurs, citoyens, journalistes et militants antillais alertent sur ce désastre environnemental et ses conséquences sanitaires. Cette loi est une première victoire, mais de nombreux collectifs rappellent que le combat ne fait que commencer.
« L’État savait. Il a continué. Et aujourd’hui, il reconnaît. C’est un début. Mais ce n’est pas encore une réparation », témoigne un militant guadeloupéen.
Une adoption au Sénat, mais un passage à l’Assemblée encore attendu
Après ce vote au Sénat, la proposition de loi doit être examinée par l’Assemblée nationale. Le texte pourra encore évoluer, notamment sur les modalités précises de l’indemnisation et le calendrier de dépollution.
Le vote du 12 juin 2025 est cependant une reconnaissance officielle de la responsabilité de l’État dans l’un des plus grands scandales sanitaires de la France d’outre-mer.
Ce qu’il faut retenir
Le chlordécone est un pesticide interdit depuis 1993 mais toujours présent dans les sols antillais
Il est reconnu comme dangereux pour la santé humaine et l’environnement
Le Sénat a adopté une loi reconnaissant la responsabilité de l’État
Le texte prévoit une indemnisation des victimes, la dépollution des sols et le soutien à la recherche
Il doit maintenant être voté par l’Assemblée nationale.
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