Un riverain gagne sa procédure contre une arboriculteur au motif que ce dernier n’a pas respecté la règlementation en matière de condition d’épandage de pesticides !

RAPPEL DES FAITS : Le 26 avril 2012 des gendarmes, sollicités par un inspecteur du service régional de l’alimentation suite à l’appel du riverain M. O., constatent, sur l’exploitation d’un arboriculteur M. R., la présence « d’un nuage de produit blanc, s’élevant à plusieurs mètres de hauteur et s’étalant sur plusieurs rangées de culture ». Il résulte de cette constations effectués que « le produit pulvérisé était du Merpan 80, pesticide, classé R 40 (suspecté cancérogène), R 43 (sensible pour la peau) et R 36 (irritant pour les yeux», et que du fait des conditions climatiques, « il dérivait sur un rayon d’une dizaine ou vingtaine de mètres, au gré du vent, dont la force était supérieure à 19 km/h et, selon le site de météo France, comprise entre 30 et 65 km/h, les gendarmes ayant pris des photos attestant de sa dérive ».

Suite à ce constat, M. O.  décide de déposer plainte. En 2016, Générations Futures ayant été contacté par le riverain, l’association le met en relation avec Maître Stéphane Cottineau qui le suit dans cette affaire. FNE a également rejoint la plainte en se portant partie civile.

Un riverain gagne sa procédure suite à des épandages de pesticides

UNE VICTOIRE JURIDIQUE QUI FERA DATE

Le parcours aura été long puisque le prévenu, M. R., a été condamné par le Tribunal Correctionnel du Mans en avril 2017, puis par la Cour d’Appel d’Angers le 2 octobre 2018. L’arboriculteur a alors formé un pourvoi en cassation de la décision de la Cour d’Appel qui le condamnait pour non-respect des règles d’épandage.

La cour de cassation a confirmé ce 3 décembre 2019 la décision de la Cour d’appel donnant raison au riverain. La Cour a appliqué l’article 253-17 du code rural (version de l’époque des faits 2012 et 2014) qui renvoie à l’article  55 du règlement CEE du 21 octobre 2009, lequel inclut l’application des bonnes pratiques phytosanitaires et donc la nécessité de s’assurer de l’absence de dérive…. Certes la cour de Cassation a cassé l’arrêt sur la question du niveau de l’amende due par le prévenu dans la mesure où elle considère que la Cour d’Appel d’Angers n’a pas assez motivé sa décision, notamment sur la question de ses revenus. Sur ce point le dossier est renvoyé à nouveau devant la Cour, mais uniquement sur ce point !

 « C’est une décision importante car c’est la première fois que la responsabilité pénale d’un agriculteur est retenue pour non-respect des règles d’épandage des pesticides. L’arrêt est définitif sur ce point. » déclare Maitre Cottineau.

Un riverain gagne sa procédure suite à des épandages de pesticides! «  Depuis que nous travaillons sur ce dossier des riverains victimes des pesticides et malgré les centaines de témoignages reçus chaque année, nous avons de très grandes difficultés à faire valoir devant la justice que les bonnes pratiques d’épandages ne sont pas systématiquement respectées, souvent au bénéfice du doute (les relevés météos par exemple n’étant pas fait sur la parcelle traitée). C’est donc une grande victoire que la confirmation par la Cour de cassation de cette règle. Il faut saluer ici la persévérance de M. O. le riverain concerné, le travail des gendarmes, de l’inspection régionale de l’Alimentation et des avocats sans qui rien n’aurait été possible. » déclare Nadine Lauverjat en charge de la campagne victimes des pesticides à Générations Futures. « C’est une belle victoire certes, mais combien de procédures encore, combien d’années encore, de constats si difficiles à faire, faudra-t-il pour obtenir que les riverains ne soient plus exposés à des pesticides dangereux qui, comme dans le cas présent, peuvent être des produits cancérogènes ? Nous attendons donc de ce gouvernement qu’il prenne enfin les décisions qui s’imposent et prennent des mesures véritablement protectrices pour ces populations vulnérables ! » conclut-elle.