Une opération majeure en France aboutit au démantèlement d’une secte de yoga, avec 41 personnes arrêtées, y compris son gourou. Voici les détails de cette intervention policière sans précédent et les accusations portées contre le groupe.

La police française a réussi à démanteler une secte internationale de yoga, mardi 28 novembre 2023, menant à l‘arrestation de 41 individus, dont le gourou.

Le gourou arrêté

Gregorian Bivolaru, 71 ans, un gourou roumain et fondateur d’un mouvement international de yoga, le « Mouvement pour l’Intégration Spirituelle vers l’Absolu » (Misa), fait partie des personnes arrêtées lors de cette vaste opération policière. Opération, qui a impliqué 175 policiers à Paris et dans d’autres régions françaises, a permis de sauver 26 femmes vivant dans des conditions précaires dans la maison de Bivolaru.

Qui est Gregorian Bivolaru ?

Gregorian Bivolaru, surnommé « Grieg », « Grig » ou « Magnus Aurolsson » par ses adeptes, est listé parmi les individus recherchés par Interpol.

Son Mouvement pour l’intégration spirituelle vers l’absolu (Misa), qui compte de nombreuses écoles de yoga et autres branches dans 31 pays, est connue pour rassembler des centaines de personnes. L’organisation, rebaptisée Atman lors de son expansion en dehors de la Roumanie, est accusée d’endoctriner et d’exploiter sexuellement ses adeptes féminines.

L’histoire du mouvement fondé par Gregorian Bivolaru remonte aux années 1970. Après avoir créé la première école de yoga en Roumanie en 1972, Bivolaru a fait face à des poursuites et a même été interné en hôpital psychiatrique alors qu’il était encore jeune. Avec la chute de la dictature communiste en 1989 et une ouverture culturelle dans le pays, il a officiellement fondé la Misa en 1990. Ce mouvement a rapidement développé un culte de la personnalité autour de Bivolaru, incluant des pratiques extrêmes comme des orgies.

Cependant, des problèmes légaux ont rapidement surgi. En 2004, Bivolaru a été inculpé en Roumanie pour agression sexuelle sur mineur, pédophilie et trafic de mineurs. Fuyant la Roumanie, il a été arrêté en Suède en 2005. La Suède a refusé son extradition, lui accordant le statut de réfugié politique et un nouveau nom, « Magnus Aurolsson« .

Malgré ces accusations, la secte a continué de croître, bien que l’association du gourou ait été exclue des fédérations internationales de yoga en 2008 pour des activités jugées inappropriées. La fédération Atman a réagi en affirmant que les services secrets roumains avaient torturé des membres pour obtenir des témoignages contre Bivolaru.

En 2013, la justice roumaine l’a condamné à six ans de prison pour viol sur mineur. Mais il a contesté cette décision. Il est devenu une cible d’Europol et de la justice européenne, et a fui la Roumanie en 2017.

En 2016, il a été arrêté à Paris avec de faux papiers et une somme importante d’argent. Extradé en Roumanie, il a été emprisonné pendant un an et trois mois. Libéré sous condition en septembre 2017, il a de nouveau fui la Roumanie. Des plaintes de viols et d’agressions sexuelles par ses adeptes finlandaises ont entraîné un avis de recherche international en 2017.

Sa localisation est restée inconnue jusqu’à son arrestation et sa mise en examen ce 28 novembre 2023.

Des manipulations mentales pour contraindre les victimes à avoir des relations sexuelles

Les stages dirigés par Bivolaru avaient pour objectif de pousser les participantes à avoir des relations sexuelles. Les femmes sous emprise étaient victimes et contraintes de participer à des vidéo-chats sexuels et les hommes à faire des travaux manuels pour payer leur séjour.

Ce mouvement, centré sur le tantra yoga Atman, est donc accusé d’utiliser des techniques de manipulation mentale pour contraindre les victimes à des relations sexuelles non consenties, à savoir des viols et agressions sexuelles. L’Office central de répression des violences aux personnes (OCRVP) a recueilli les plaintes de trois femmes qui affirmaient avoir été séquestrées et forcées à des pratiques sexuelles.

Gregorian Bivolaru est aujourd’hui accusé de crimes graves, notamment la traite de personnes, la séquestration en bande organisée, le viol, et l’abus de faiblesse en bande organisée par des membres d’une secte.

La justice française a ouvert une information judiciaire en juillet 2023, enquêtant sur ces infractions. Bivolaru risque jusqu’à 30 ans de prison si ces accusations sont avérées.

D’après l’AFP, les pratiques du gourou étaient de« conditionner les victimes à accepter des relations sexuelles via des techniques de manipulations mentales visant à supprimer toute notion de consentement ». Cette secte obligeait aussi les femmes « à accepter des relations sexuelles avec le dirigeant du groupe » et/ou à « s’adonner à des pratiques pornographiques tarifées en France et à l’étranger ».

La Miviludes avait fait un signalement

La Miviludes (Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires) avait fait un signalement de ce groupe spirituel au parquet de Paris en juillet 2022, suite aux informations fournies par la Ligue des droits de l’Homme. Ces informations provenaient d’anciens membres du mouvement Misa.