Noël est  en pleine mutation, il nous faut repenser la façon de célébrer les fêtes de noël ? Comment réinventer un rituel ancré dans les traditions et aussi indissociable de la notion de famille noël revient chaque année avec les mêmes espoirs, l’espoir du miracle qui ne s’accomplit malheureusement pas.

On tentera cette année encore d’actualiser le mythe de l’harmonie familiale. Le père noël illuminera les yeux des enfants et leur en mettra plein la vue… Noël, la famille dans tous ses états! Pascal Anger psychothérapeute familial et de couple nous éclaire sur ce moment que l’on attend autant qu’on le rejette.

Sophie Madoun : Alors noël cette année sera comment ?

PASCAL ANGER : Noël sera sous le signe de la prudence, mais noël sera toujours noël avec ses rituels et ses évolutions… Par peur de la contamination certains renonceront à noël. Il est vrai que c’est un noël un peu spécial ?

Comme chaque année, Noël ne suffira  malheureusement pas à calmer les turbulences de la famille.

Noël est un moment qu’on attend et qu’on redoute, on est pris dans une excitation et dans un rejet.

Beaucoup de chose se joue autour de ce paradoxe.

Reformer la famille nucléaire faire noël chacun de son coté, inviter les ex ?

Aucune solution n’est à écarter  l’important est d’éviter les tiraillements mais ce n’est pas toujours possible.

On peut se réunir à noël parce qu’on s’aime mais aussi pour donner du sens à la famille.

Les rituels familiaux sont utiles car ils donnent un sentiment d’appartenance et joue un rôle important dans la structuration de l’identité.

Noël c’est important pour les enfants ?

PASCAL ANGER : oui, Noël est important pour les enfants , mais pas que pour les adultes aussi, c’est le moment des retrouvailles de la joie et des cadeaux.. Noël ce n’est pas toujours le 24 Décembre,  Ce qui n’est pas toujours sans faire grincer des dents. Il faut parfois renoncer à l’idée de recevoir ses enfants ce jour-là, pour certains parents ce renoncement fait mal.

Noël rime avec famille, mais ce jour est souvent source de jalousie et de rancœurs.

La famille on le sait bien est par nature le lieu des pulsions et des passions. Difficile de pacifiée dans ses conditions de réunir toute la famille à moins que chacun soit prêt à trouver un consensus.

Noël est une tradition certes mais rare sont les familles qui permettent de gommer les dissensions.

Difficile de faire de noël une parenthèse dans les conflits familiaux, on le voit bien chez les personnes qui ne vivent plus ensemble. Les enfants passent noël chez l’un puis noël chez l’autre mais cela nécessite un accord entre les parents pour le choix des dates et des cadeaux cela nécessite un maximum de communication… Sans compter le noël chez les grands parents.

Noël n’est pas sans difficultés pour les parents séparés, qui ne doivent rien laisser paraitre de leur solitude et de leur tristesse s’ils ne peuvent pas voir leur enfant ce jour-là. Il faut jongler avec la famille maternelle et la famille paternelle.

Peut-on déplacer le jour de noël ?

PASCAL ANGER : Vous savez, Le père noël se moque bien de la date, ce qui est important c’est que ce moment soit intense et magique.

C’est l’envie d’être ensemble autour du repas et des cadeaux qui l’emporte sur le reste, réunir toute la famille semble être une bonne idée sous certaines conditions, il faut qu’il y est du plaisir à être ensemble.

Respectons le rythme et la place  de chacun cela aide à passer un bon moment.

Lorsqu’on n’est pas en bon terme avec sa famille et que l’on est obligé de passer noël ensemble cela semble difficile les conflits latents risquent de se raviver, cela peut sembler artificiel et sans intérêt.

il y a des sujets à éviter le jour de noël en famille ?

PASCAL ANGER : oui, Pour que noël se passe le mieux possible, évitons les sujets qui fâchent et les reproches.

L’éducation des enfants, le niveau de vie de chacun, la politique sont des sujets à bannir ce jour-là.

Essayons de vivre le moment présent sans penser au lendemain.

Noël doit rester un moment de paix et de joie dans les cœurs.

Noël nous invite au partage, cela peut-être l’occasion de mieux connaitre les autres d’aller à la rencontre de ceux qui sont seuls et de les inviter à la fête.

Les lendemains de noël il est fréquent que le téléphone sonne chez les psychothérapeutes pour prendre un rendez-vous en urgence. Les patients ont besoin de parler de quoi de noël bien sur !

Et pour raconter quoi ?

Organiser noël en famille recomposée est un casse tète cette année ?

PASCAL ANGER : ce n’est pas plus un casse-tête cette année que les autres années… Il y a une organisation, une ambiance et des contraintes. Il est vrai que plane sur nous tous de grandes incertitudes mais gardons l’esprit positif. Être séparé, c’est accepter de voir moins son enfant et l’aider à se construire dans chaque foyer qu’il soit monoparental ou recomposé. Si la séparation a été expliquée à l’enfant, il pourra s’adapter aisément dans les deux foyers. En revanche, il peut perdre ses repaires lorsque les séparations ne sont pas franches ou lorsqu’un parent dicte la conduite à l’autre parent. Ou lorsque noël fait naître l’espoir d’une réconciliation…

Pourra-t-on se rassembler en clan familial cette année ?

PASCAL ANGER : Cela semble compliqué mais pas impossible sous certaines conditions. Il faut faire preuve de diplomatie. Noël doit se célébrer dans un esprit de paix, hors on le sait par nature, la famille est le lieu des pulsions et des passions. Pour se réunir de manière pacifiée, il faut trouver un consensus. Un respect mutuel, permettra aux protagonistes de gommer les dissensions. Pour se réunir, il faut en avoir vraiment envie. Noel, n’est pas une fête improvisée, c’est une cérémonie contraignante, où chacun doit faire des efforts dans l’intérêt des enfants. On peut se réunir parce qu’on s’aime mais aussi pour donner du sens à la famille. Chaque noël laisse un souvenir indélébile à l’enfant.

Les fêtes ce n’est pas une thérapie familiale, dans une famille recomposée il y a trois choses importantes à prendre en compte,  la communication, la planification et l’implication.

Reformer la famille  d’origine le soir de noël est-elle souhaitable ?

PASCAL ANGER : Prudence. Il ne faut que les uns ou les autres imaginent recoller les morceaux. Je crois qu’il est préférable que les enfants puissent aller un jour chez leur père, un jour chez leur mère. Ce qui nécessite au préalable, un accord entre les deux pour le choix d’une date et des cadeaux. Il est important qu’il n’y ait pas de surenchère autour des cadeaux. Il faut aussi penser aux grands parents et aux autres membres de la famille.

L’enfant comprend avec des mots simples, que la situation sanitaire actuelle, il ne pourra pas forcément voir son père ou sa mère. Il est important d’organiser an amont une rencontre du parent absent en visio. L’important est d’arranger les choses de façon la plus souple et sans stress, en privilégiant le bien-être des enfants.

Certains EX restés en bon terme peuvent envisager le noël ensemble, mais attention il est important de ne pas créer de confusion dans la tête des enfants, cela reste un moment exceptionnel on doit pouvoir l’expliquer aux enfants, ce n’est pas parce qu’on passe noël tous ensemble,  que papa et maman revivront sous le même toit. Les parents ne se remettront pas ensemble c’est clair ! La déception pourrait être trop difficile post-noël. Si tel est le cas, par ailleurs, il faut tenir compte des nouveaux conjoints qui ne doivent pas se sentir léser. Doit-on les inviter ? à chacun d’y répondre, il n’y pas de modèle familial

A quoi nous renvoie noël ?

PASCAL ANGER : Noël renvoie à la famille et à sa propre enfance plus ou moins bien vécue. Au-delà de la fête religieuse ou de la joie des enfants, c’est l’occasion de faire le point. Certains acceptant plus ou moins bien ce moment.  Il ne faut jamais oublier que noël est avant tout la fête des enfants. Pour cela, on se doit de mettre de côté nos relations plus ou moins bonnes avec les membres de la famille. Le lien enfant/ grands parent est parfois différent de celui connu avec nos parents.

Est-ce que la Covid peut-être un frein à Noël

PASCAL ANGER : Même si la santé reste la priorité, il ne faut pas à l’inverse que la Covid devienne un prétexte. N’oublions pas que cette fête est là pour resserrer la cellule familiale. Donc on peut envisager même une rencontre avec les mesures sanitaires existantes, telle qu’à l’extérieur, un court moment de la journée sans embrassade. Et pourquoi  ne pas profiter de cet état pour imaginer un noël différent des autres.

Et si les enfants ne sont pas enthousiastes de ce premier noël en famille recomposée ?

PASCAL ANGER : On garde en tête que les enfants ont besoin de faire le deuil de la famille nucléaire, qu’il faut du temps pour s’adapter. On reste attentifs l’un et l’autre à leur besoins et on respecte leur rythme. Inutile d’insister pour passer noël ensemble si c’est trop compliqué.

En fonction de l’âge des enfants, de la façon dont nous nous sommes quittés mais aussi du nouveau lien que nous avons tissé ensemble nous pourrons trouver des solutions pour que ce moment soit le plus supportable pour les uns comme pour les autres.

Quel conseil donneriez-vous pour un noël anti-stress ?

PASCAL ANGER : Si noël doit se passer chez vous, posez-vous la question : qui j’invite, dans quel but ? Et lancer les invitations sans trop tarder. Si votre projet comporte des incertitudes prévoyez un pal de rechange. Ne laissez pas de place au chantage affectif, soyez dans la souplesse et dans l’écoute. N’ayez pas trop d’ambition. On parvient rarement à satisfaire tout le monde.

Et enfin, si vous avez envie de bouger les rituels, osez !