Le projet de loi agriculture et alimentation est sur le point d’être discuté dans l’hémicycle de l’Assemblée nationale entre mardi 22 mai et jusqu’au 25 mai. Ce projet de loi traduit un enfermement du gouvernement dans un modèle agro-alimentaire productiviste, négligeant l’urgence écologique et les enjeux de santé publique.

 

L’exemple le plus flagrant est le fait que la baisse, voire l’interdiction de l’utilisation des pesticides pour protéger la biodiversité et la santé de nos concitoyens n’est pas évoquée au sein des plans de filières présentés par le gouvernement malgré le récent rapport de l’IGAS. D’ailleurs, dans ces plans, la question de l’urgence climatique est éludée alors que l’agriculture et l’alimentation représentent un 1/3 des émissions de gaz à effet de serre et que l’accord de Paris exigeait une division par deux des émissions de CO2 dans le secteur agricole. Idem, pour l’interdiction des oeufs issus de poules en batterie. C’était pourtant une promesse de campagne du candidat Emmanuel Macron. Le bien-être animal peut toujours attendre !

De même, l’interdiction du glyphosate dans les 3 ans (énoncé par l’exécutif à l’automne dernier) ne figure plus dans la loi.

De grands principes sont énoncés comme l’objectif de 50% de produits de qualité (dont 20% de produits bio dans la restauration collective d’ici 2022), mais ils ne trouvent pas de concrétisation budgétaire.

On peut regretter aussi, le rejet par le gouvernement lors des commissions parlementaires de la mise en place d’un plat végétarien hebdomadaire. Je défends la réduction drastique de la part des protéines animales dans la restauration collective en suivant les préconisations de l’ANSES. Selon elle, les enfants jusqu’à 10 ans consomment en moyenne entre 200 et 400 % des apports nutritionnels conseillés). L’étude Elance a confirmé ce constat, concluant qu’un  fort apport en protéines animales, et en particulier celles issues des produits laitiers, est associé à des risques de surpoids et d’obésité plus tard.

Lors des Etats généraux de l’alimentation auxquels j’ai participé, j’ai demandé à plusieurs reprises que soient prohibés par la loi : les nitrites et les nitrates (cancérogènes selon le CIRC) présents dans la charcuterie industrielle et les plats cuisinés en commençant par la restauration scolaire.

J’avais aussi demandé une évaluation précise des nanomatériaux présents dans l’alimentation. On peut se féliciter de la suspension du dioxyde de titane (E171) mais pourquoi attendre 2020 alors que les dangers pour la santé sont avérés. On sait aussi que des risques existent avec le dioxyde de silicium (E551) utilisé dans l’alimentation comme antiagglomérant. Jusqu’ici, on le croyait inoffensif. Des scientifiques ont récemment montré qu’il peut influer sur le système immunitaire de l’intestin pouvant entraîner des pathologies inflammatoires du côlon. Je demande donc l’interdiction immédiate des nanoparticules (notamment de dioxyde de titane présentes dans le colorant E171 et le dioxyde de silicium E551) dont le bénéfice pour le consommateur est seulement esthétique pour des risques sanitaires aujourd’hui avérés. Nous sommes dans le cadre du principe de précaution avec des études scientifiques plus qu’alarmantes.
Mon regret est aussi l’absence dans la loi de dispositions pour qu’une fiscalité écologique soit mise en place pour orienter les consommateurs vers une alimentation de qualité.

Cette loi alimentation traduit de la part du gouvernement une continuité dans un modèle agricole qui nous conduit dans une impasse. Il est urgent avec les citoyens d’inventer un autre modèle agricole fondée  sur une agriculture paysanne et biologique, les filières courtes liant producteurs et consommateurs, la valorisation des produits du terroir, l’abandon des pesticides, le respect des éco-systèmes et la prise en compte du bien-être animal. Il y a urgence !

 

Michèle Rivasi