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Le tabagisme a des effets sur l’immunité à long terme

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 Selon les chercheurs de l’Institut Pasteur, le tabagisme affecte l’immunité sur le long terme. Explications.

Le tabagisme est reconnu depuis longtemps pour ses effets délétères immédiats sur la santé, allant des maladies cardiovasculaires au cancer. Toutefois, une étude conduite par l’Institut Pasteur met en lumière une dimension plus insidieuse de ces effets : leur persistance et leur impact sur le système immunitaire bien après avoir cessé de fumer. Cette découverte, publiée dans la prestigieuse revue Nature le 14 février 2024, pourrait révolutionner notre compréhension des mécanismes par lesquels le tabagisme endommage durablement la santé.

Impact du tabagisme sur l’immunité à long terme

L’étude s’appuie sur les données recueillies auprès de la cohorte Milieu Intérieur, qui a suivi les variations des réponses immunitaires chez 1 000 volontaires sains. Elle révèle que le tabagisme affecte non seulement l’immunité de manière immédiate mais aussi sur le long terme, modifiant durablement certains mécanismes de défense de l’organisme. Ces altérations, observées chez les fumeurs, persistent pendant de nombreuses années après l’arrêt du tabac, soulignant une forme de « mémoire » immunitaire des effets nocifs du tabagisme.

Les scientifiques ont exposé des échantillons sanguins prélevés chez les individus de la cohorte à une grande diversité de microbes et observé la réaction du système immunitaire via la mesure des niveaux de cytokines sécrétées. En analysant ces données, l’équipe de recherche a pu identifier que, parmi une multitude de variables, le tabagisme, l’infection latente au cytomégalovirus, et l’indice de masse corporelle étaient les facteurs ayant le plus d’influence sur les réponses immunitaires étudiées.

Les cytokines sont des protéines sécrétées par un grand nombre de cellules immunitaires pour communiquer entre elles et participer aux défenses immunitaires. Les cytokines jouent un rôle crucial dans la coordination de la réponse immunitaire, influençant la croissance, le mouvement et l’activation des cellules immunitaires.

Les cytomégalovirus (CMV) sont des virus souvent asymptomatique mais dangereux pour le fœtus et qui appartient à la famille des Herpès. Le CMV peut causer des infections latentes chez l’adulte, mais chez les femmes enceintes, l’infection peut entraîner des complications graves pour le développement fœtal.

L’analyse des données a révélé que la réponse inflammatoire était accrue chez les fumeurs, et l’activité de certaines cellules impliquées dans la mémoire immunitaire était altérée. Plus précisément, l’étude a démontré que si la réponse inflammatoire tend à revenir rapidement à la normale après l’arrêt du tabac, l’impact sur l’immunité adaptative perdure pendant 10 à 15 ans.

Mécanismes épigénétiques en jeu

L’un des aspects les plus fascinants de cette recherche est la mise en évidence de mécanismes épigénétiques sous-jacents à ces effets à long terme. Les modifications épigénétiques sont des modifications de l’ADN qui impactent sur l’expression des gènes, c’est-à-dire comment ils vont être utilisés par les cellules. Ces modifications ne changent pas la séquence d’ADN elle-même, mais influencent la manière dont les gènes sont activés ou désactivés.

Les chercheurs ont découvert que les différences dans la méthylation de l’ADN entre fumeurs, ex-fumeurs, et non-fumeurs pourraient expliquer ces changements persistants dans les réponses immunitaires. La méthylation est une modification chimique. Des groupements dits « méthyles » se positionnent sur l’ADN, ce qui modifie la façon dont le génome va être lu dans la cellule. C’est un exemple de modification épigénétique qui peut affecter l’expression génique sans altérer la séquence nucléotidique de l’ADN.

Ces modifications chimiques de l’ADN affectent l’expression de gènes impliqués dans le métabolisme des cellules immunitaires, induisant ainsi des changements durables dans le fonctionnement du système immunitaire.

 

Sources :

Smoking changes adaptive immunity with persistent effects, Nature, 14 février 2024
Institut Pasteur
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