Pour enrayer la pénurie de paracétamol, le gouvernement a décidé, par arrêté publié au JO du 4 janvier 2023, d’interdire la vente en ligne de ces produits jusqu’au 31 janvier. Une décision tardive « qui ne va rien régler », qui « crée une distorsion de concurrence avec les sites étrangers » et « met en danger les plateformes françaises » alors que « d’autres solutions existent », s’insurge Audrey Lecoq, fondatrice de la plateforme de vente en ligne Pharmazon.

Depuis plusieurs mois maintenant, les médicaments à base de paracétamol sont confrontés à une pénurie mondiale de leur principe actif, produit essentiellement en Inde et en Chine. Cette dernière, touchée par une violente reprise du Covid, a décidé de bloquer les exportations afin de répondre à ses propres besoins. Décision qui intervient alors que la France est confrontée à une reprise du Covid-19, une montée de l’épidémie de grippe et une explosion des bronchiolites.

Une décision qui ne règle rien

Interdire uniquement en France la vente en ligne des médicaments au paracétamol ne règle aucun problème, estime Audrey Lecoq qui dirige le site de vente en ligne Pharmazon : « Interdire la vente en ligne aux seuls distributeurs français ne va faire que favoriser les plateformes basées à l’étranger : Belgique, Hollande ou Allemagne. Cette distorsion de concurrence menace les entreprises Françaises, prédit Audrey Lecoq qui dirige la plateforme basée à Orléans. Je pourrais décider de déménager le siège de l’entreprise en Belgique. Soumise au droit européen j’aurais alors droit de vendre du paracétamol dans toute l’Europe ! Est-ce ce que cherche le gouvernement ? ».

La solution doit être européenne

Pour Audrey Lecoq qui souhaite rester en France, « La solution contre la pénurie de médicaments doit être européenne. Pour être efficace, il faut que la décision d’interdire la vente en ligne de certains produits soit prise pour l’ensemble des pays de l’UE. Cela réglerait l’essentiel du problème. Pour la distribution des médicaments, il faut raisonner européen aujourd’hui. », martèle la jeune cheffe d’entreprise.

 

Réhabiliter l’Ibuprofène

Il existe des alternatives au paracétamol, notamment l’ibuprofène. « Le problème, explique Audrey Lecoq, c’est qu’en plein Covid une étude[1] fantaisiste a remis en cause l’innocuité de cette molécule en cas de covid, du coup les consommateurs s’en sont détournés au profit du paracétamol. Un an plus tard, poursuit-elle une autre étude, sérieuse celle-là, a réhabilité l’ibuprofène. Mais le mal était fait, l’ibuprofène n’a jamais retrouvé son niveau de vente d’avant l’étude et celui du paracétamol a explosé. Il faut que les autorités sanitaires communiquent sur le recours à cette molécule qui ne souffre quasiment pas de pénurie ».

Pénurie de paracétamol, mieux anticiper les besoins

Durant le confinement lié au Covid-19, la consommation de nombreux médicaments a baissé. Parmi eux, l’amoxicilline, antibiotique essentiellement pédiatrique. « Il y a deux ans, les professionnels me disaient qu’on avait deux années de stock d’amoxicilline du fait de cette baisse de consommation, rapporte Audrey Lecoq. Du coup, personne n’a pensé à en recommander. Faute de commandes, les façonniers se sont trouvés en grande difficulté et se sont tournés vers d’autres productions. D’où la pénurie d’offre aujourd’hui. Les pouvoirs publics doivent anticiper ces phénomènes connus, organiser une meilleure veille sur les produits sensibles », suggère la fondatrice de Pharmazon.

 

Mieux encadrer certaines pratiques des laboratoires

À côté de certains médicaments remboursables, des laboratoires ont décidé de produire leurs propres médicaments « ombrelle » ou « me-too ». Véritables copies des premiers, mais dont le prix n’est pas administré/remboursé, ces produits sont vendus plus chers. On trouve par exemple des copies d’anti-maux d’estomac, des sirops… En période de pénurie des molécule concernées, certains laboratoires ne produisent plus que les versions « ombrelles ». « C’est beaucoup plus rentable, note Audrey Lecoq. Il faut interdire ces choix quand des molécules souffrent de pénurie. », dit-elle.

 

Problème du prix remboursé en France

Au fil des fortes baisses de tarifs imposées aux laboratoires depuis dix ans pour réduire la dépense de l’Assurance maladie, la France est devenue le pays d’Europe qui rembourse le moins bien les médicaments. « Résultat, les laboratoires, les façonniers préfèrent s’expatrier ou travailler pour des pays qui remboursent mieux leur production », déclare Audrey Lecoq qui suggère que la France revoit sa politique tarifaire « pour redevenir attractive ».

 

Penser aux alternatives

A côté du paracétamol et de l’ibuprofène, il existe des produits qui ont vocation à répondre aux mêmes maux. C’est notamment le cas de certaines huiles essentielles. Les vertus de certaines contre les maux de tête ou certaines douleurs, par exemple, sont connues. Des produits disponibles sur la plateforme Pharmazon où les conseils d’utilisation ne souffrent pas de pénurie…

 

Pénurie de paracétamol : « les solutions pour sortir de la crise », Tribune d’Audrey Lecoq, Fondatrice de Pharmazon