La proposition de loi des sénateurs socialistes, qui prévoit d’ajouter le covid-19 à la liste des vaccins obligatoires, n’a pas été adoptée ce 6 octobre en commission des affaires sociales. Dans ces conditions, le texte a peu de chances d’être adopté en séance le 13 octobre.

Après les soignants, faut-il étendre la vaccination obligatoire contre le covid-19 à l’ensemble de la population ? Dans sa grande majorité, la commission des affaires sociales du Sénat a considéré que ce n’était pas nécessaire. Réunie ce mercredi 6 octobre dans la matinée, elle n’a pas adopté la proposition de loi déposée par le groupe socialiste le 31 août. Une majorité de sénateurs a considéré qu’il fallait continuer à convaincre les dernières personnes, plutôt que d’imposer une obligation.

Aucun texte n’étant sorti de la commission, c’est donc la proposition de loi initiale qui sera débattue dans l’hémicycle, le 13 octobre. Logiquement, les mêmes rapports de force devraient se reproduire, les groupes LR et Union centriste ayant voté contre le texte dans leur majeure partie.

« Il faut continuer à augmenter la couverture vaccinale, sans aller à cette obligation », explique à l’issue de la réunion la présidente de la commission, Catherine Deroche (LR), qui préfère continuer à « convaincre ». La mise en œuvre concrète de la loi fait aussi partie des réserves qui ont été exprimées. « L’obligation doit s’assortir d’un contrôle. Si on oblige sans contrôle, on ne voit pas comment cela peut fonctionner », insiste Catherine Deroche. Le seul amendement en discussion, qui prévoyait de mettre en place des sanctions en cas de non-respect de l’obligation vaccinale, n’a pas été adopté non plus.

René-Paul Savary (LR), fait partie des membres de la commission qui ont choisi de s’abstenir. Il estime que la question mérite « beaucoup d’humilité ». « Il y a eu autant d’arguments convaincants pour l’obligation que d’arguments convaincants pour ne pas la rendre obligatoire. »

La vaccination, « seul moyen d’atteindre une protection collective suffisante », selon le rapporteur Bernard Jomier

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La vaccination, « seul moyen d’atteindre une protection collective suffisante » et de « transformer l’épidémie en un phénomène à bas bruit avec d’éventuelles résurgences saisonnières, tout en conciliant l’impératif de protection de la santé publique et un traitement égalitaire de nos concitoyens ». C’est la principale conclusion du rapport de Bernard Jomier, présenté à ses collègues ce matin. Le sénateur rappelle que le variant Delta, avec son plus haut degré de transmissibilité, a changé la donne et nécessite désormais un taux d’immunité de la population (vaccinale ou acquise après infection) compris entre 90 % et 95 %.

Si le rapport reconnaît que l’instauration du passe sanitaire a permis d’accélérer la campagne vaccinale en France, il s’inquiète surtout de la chute du nombre de premières injections depuis le 31 juillet. « Rapportée à la population éligible, c’est-à-dire âgée de plus de 12 ans, la couverture vaccinale atteint, le 1er octobre 2021, 84,1 % de schémas vaccinaux complets », détaille le rapporteur.

Bernard Jomier épingle également les « difficultés pratiques » du passe sanitaire, « notamment s’agissant des modalités de son contrôle à l’entrée de certains lieux collectifs, comme les établissements de santé, les Ehpad et les restaurants ». « L’impact du passe sanitaire sur la circulation du virus reste ainsi discutable », ajoute-t-il. Le rapport évoque la possibilité que des personnes non vaccinées et non testées puissent « être tentées de se reporter en plus grand nombre sur des lieux collectifs non soumis au passe sanitaire ».

9 millions de personnes non vaccinées

Le sénateur relève « la permanence dinégalités préoccupantes dans la diffusion de la vaccination ». Au 29 septembre 2021, le nombre de personnes éligibles non encore vaccinées est estimé à 9,2 millions, selon son rapport. Parmi les autres gros réservoirs de classes d’âges à atteindre : les 12-17 ans (environ 1,8 million de personnes restent à vacciner), ou encore les 30-39 ans (environ 1,75 million de personnes).

Bernard Jomier met notamment en avant la situation de personnes isolées, « éloignées » de la vaccination. 84 % des personnes de plus de 80 ans, seulement, sont vaccinées. Un niveau bien inférieur à celui observé chez nos voisins européens. Le médecin alerte aussi sur la couverture vaccinale des personnes atteintes de maladies chroniques (obésité, cancer, diabète ou hypertension) : 14,4 % d’entre elles n’ont pas encore de schéma vaccinal complet. Le décret du 14 juillet 2021, qui a ouvert la possibilité pour les médecins de recevoir la liste de leurs patients non vaccinés, et les efforts de l’Assurance maladie pour sensibiliser et aller vers les publics éloignés, n’ont pas empêché la campagne vaccinale de plafonner.

Le rapport liste plusieurs éléments qui plaident en faveur de l’obligation vaccinale. Le premier précédent est celui de l’obligation vaccinale des personnels soignants, entrée en vigueur le 8 août. Au 21 septembre, selon Santé publique France, 90 % des agents des établissements de santé ont reçu au moins une dose. La part monte à 95,5 % chez les professionnels libéraux. Le rapporteur met en avant l’exemple de la Nouvelle-Calédonie, où elle a été votée le 3 septembre. « La courbe des vaccinations en Nouvelle Calédonie s’est fortement accélérée au début du mois de septembre », note-t-il. Il tire aussi l’expérience de l’extension des obligations de vaccins chez les enfants en 2018. Il y a un an, Santé publique France soulignait que pour les enfants soumis à l’obligation vaccinale nés après le 1er janvier 2018, l’objectif de 95 % pour la première dose du vaccin contre la rougeole, les oreillons et la rubéole était presque atteint. La vaccination obligatoire est « un outil qui produit aussi des résultats », conclut Bernard Jomier.

Guillaume Jacquot – Public Sénat