La médecine en France est une des plus performantes de par la formation des praticiens, la recherche et notre système de santé. Pourtant, répartie par spécialités, les patients et maladies sont trop souvent traitées selon un seul domaine de compétence. Et si le corps était considéré comme un ensemble, est-ce que cela n’aurait pas une incidence différente, et positive, sur notre manière d’aborder la maladie et son traitement ?

CORPS-approche-holistique-santecoolSelon l’Organisation Mondiale de la Santé, les maladies cardiovasculaires sont la première cause de mortalité dans le monde. En France, on dénombre 147.000 décès par an, soit la deuxième cause de mortalité après le cancer qui fait 154.000 morts chaque année. On estime également qu’un patient sur 7 ayant fait un infarctus du myocarde décédera des suites de cet accident cardiaque. Or, on dénombre 125 000 infarctus du myocarde par an en France. 130 000 patients sont atteints par un accident vasculaire cérébral : il s’agit du premier motif de handicap en France…[1]

Face à ce constat alarmant, les praticiens et les autorités de santé reconnaissent l’importance d’une hygiène de vie dans la prévention de ces risques : alimentation équilibrée, pratique sportive, diminution ou arrêt de la consommation d’alcool et/ou de tabac… Le parent pauvre du dépistage semble être le sommeil. Si dans la conscience collective le sommeil est effectivement un des éléments fondamental pour une vie en bonne santé et un corps au top, il est souvent peu étudié et pris en considération dans le dépistage de maladies, telles que les maladies cardiovasculaires.

Pourtant, outre le ronflement, de nombreuses « défaillances » du sommeil sont à déplorer, notamment à cause de leur impact sur la santé générale du patient. Le syndrome d’apnées obstructives du sommeil (SAOS) est un des troubles respiratoires du sommeil les plus communs. Il se caractérise par une répétition d’obstructions complètes ou partielles des voies respiratoires pendant le sommeil provoquant ainsi un arrêt de la respiration. Dans les pays occidentaux, la population touchée oscillerait entre 3 et 28%[2], en France, la population concernée serait de 5 millions de personnes. Or le dépistage est encore peu fréquent laissant ainsi s’installer des pathologies plus lourdes.

En effet, environ 40%[3] des personnes souffrant d’hypertension et plus de 60% des personnes ayant eu un accident vasculaire cérébral (AVC) sont sujettes à des apnées du sommeil. Le risque d’autres pathologies cardiaques sont également multipliés en cas d’apnées du sommeil : par 5 pour l’insuffisance coronarienne[4], par 4 pour la fibrillation auriculaire et par 3 pour la tachycardie ventriculaire[5]

La fréquence élevée du Syndrome d’Apnée Obstructive du Sommeil et l’importance des pathologies associées en font un problème majeur de santé publique ; cependant malgré les conséquences nombreuses et graves du SAOS et sa prévalence importante  le rapport sommeil du Ministère de la Santé en 2006[6],  confirmé par une étude récente de l’Institut Nationale de Veille Sanitaire, estime que seulement 15% des personnes concernées ont été diagnostiquées.

A côté de l’influence bien connu des facteurs classiques (tabac, alcool, stress, obésité) il est donc important d’y intégrer les apnées du sommeil pour que notre corps fonctionne au mieux. Les différentes spécialités médicales ont toute leur place dans le dépistage, le diagnostic et la prise en charge des patients apnéiques. D’autant plus qu’aujourd’hui de nombreux traitements existent.

 

Dr Gérard Vincent

Attaché à l’Hôpital Bretonneau – Assistance Publique des Hôpitaux de ParisService Odontologie – unité sommeil


[1] Beaune J . Carenity.com, bulletin FF de cardiologie 18.9.2007; n°35-36

[2] Young T, Peppard PE, Gottlieb DJ : Epidemiology of obstructive sleep apnea. A population health perspective. Am J Respir Crit Care Med  165 : 1217-39 (2002).

[3] Shahar E, Whitney CW, Redline S, Lee ET, Newman AB, Nieto FJ,

O’Connor GT, Boland LL, Schwartz JE, Samet JM for the Sleep Heart Health Study Research Group : Sleep-disordered breathing and cardio-vascular disease. Am J Respir Crit Care Med 2001 ; 163 : 19-25.

[4] Mooe T, Rabben T, Wiklund U, Franklin KA, Eriksson P : Sleepdisordered breathing in men with coronary artery disease. Chest 1996 ; 109 : 659-63.

[5] Y. Dauvilliers et al. Recommandations pour la pratique clinique du syndrome d’apnées hypopnées obstructives du sommeil de l’adulte. Rev Mal Respir 2010 ; 27 : S124-S136

[6] Rapport sur le thème du sommeil- Ministère de la santé et des solidarités – décembre 2006

 

A lors, quand la médecine va donc s’occuper de notre corps dans sa globalité?