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La gestion durable des forêts, une solution contre la déforestation ?

A l’initiative du programme Fair&Precious, l’Association Technique Internationale du Bois Tropical a organisé un webinaire le mardi 15 mars pour revenir sur ses valeurs, engagements et sensibiliser autour de la gestion durable des forêts tropicales et a donné la parole aux représentants de la société civile pour témoigner de leurs expériences terrain sur le sujet.

 

Face à l’urgence climatique, différents projets européens en lien avec la préservation de l’environnement ont vu le jour ces dernières années. Le Green Deal, initié depuis 2019 et le projet de réglementation sur la déforestation importée publié en novembre dernier (un projet en cours depuis plus de deux ans et demi en France au travers de la SNDI – Stratégie Nationale de lutte contre la Déforestation importée) sont autant d’initiatives qui font écho à la mission de l’ATIBT : tendre vers une consommation « Zéro déforestation ». Le soutien de l’association pour la certification et la gestion durable des forêts s’inscrit pleinement dans la stratégie européenne. La France, qui a une antériorité dans la lutte contre déforestation parmi les pays européens, reconnait les schémas de certification FSC® & PEFC-PAFC, comme des outils capitaux pour lutter contre la déforestation. Les certifications sont également reconnues comme outils d’analyse et de réduction de risque par l’Union Européenne.

Les chiffres clés à retenir :

Concernant la forêt tropicale du Bassin du Congo*

Un des 2 poumons verts de la planète

La gestion durable des forêts une solution pour préserver le second poumon de la planète

Les forêts tropicales jouent un rôle clé dans le bon fonctionnement du système environnemental mondial via notamment leurs fonctions régulatrices du climat par l’absorption et la captation du carbone. Le Bassin du Congo, ou second poumon vert de la planète, apporte aussi des services écosystémiques (ressources médicinales, alimentaires, maintien de la biodiversité…) dès lors qu’il est bien géré.

En outre, pour rappel, la filière bois dans les pays du bassin du Congo est le premier employeur après l’État. Au Gabon par exemple, elle représente 17 à 18 000 emplois (avec une réelle perspective de croissance due à l’avancée de la transformation parmi les métiers du bois dans le pays).

Avec pour ambition de promouvoir la gestion durable des forêts et le bois tropical certifié, l’ATIBT se donne pour mission de sensibiliser et d’apporter de la pédagogie sur leurs enjeux, à travers son programme Fair&Precious. Créé il y a 5 ans, ce programme fixe, à l’attention des gestionnaires forestiers, 10 objectifs de durabilité, alignés avec les Objectifs de Développement Durable des Nations Unies (maintien de la biodiversité, lutte contre l’érosion, contre le braconnage, formation des acteurs de la filière bois…).

Le programme intègre également des engagements environnementaux et humains (comme la nécessité de fournir un emploi décent, rémunérateur et stable aux populations) et entend promouvoir l’initiative de gestion durable autant dans les pays producteurs que dans les pays européens.

Témoignages : qu’en disent les acteurs sur le terrain ?

Edwige Eyang Effa, attachée de recherche à l’Institut de Recherche en Écologie Tropicale basée au Gabon et Norbert Gami, anthropologue basé au Congo, ont témoigné et apporté leur vision sur l’importance de la préservation des forêts tropicales du bassin du Congo.

Norbert Gami a rappelé que le Congo fait partie des premiers pays certifiés FSC® (depuis 2008). « Plus de 2 millions d’hectares de forêts sont certifiées FSC® et répondent à une volonté politique nationale d’avoir une forêt gérée durablement. Aujourd’hui l’exploitation forestière est vue comme destructrice alors qu’au contraire nous avons vu des progrès énormes en termes de conditions humaines et sociales des populations dans les exploitations gérées durablement. Celles-ci permettent un accès aux systèmes d’éducation et de santé, mais ont également permis de légaliser les contrats de travail, apportant ainsi une sécurité de l’emploi. La certification améliore de façon concrète le quotidien des populations locales et autochtones et la prise de conscience de l’importance de la préservation des forêts est réelle parmi les habitants. »

Edwige Eyang Effa, a quant à elle fait part de son expérience quotidienne dans les concessions certifiées, participant à l’accroissement de la biodiversité.

« Les exploitants qui respectent la règlementation durable (via le prélèvement sélectif, la rotation dans la coupe de bois, une politique de conservation des écosystèmes rares avec la mise en place des zones de conservation et la protection des HVC, etc…) participent grandement à la préservation de l’environnement. Le Gabon a, depuis peu, imposé à toutes les concessions forestières des études d’impact environnemental, ce que les concessions certifiées font déjà en profondeur. Elles doivent en effet justifier de participer à la protection de la faune et de la flore (avec un plan de gestion et de préservation pour la protection de la biodiversité et/ou la préservation des communautés qui y vivent). La certification est toujours bénéfique pour l’environnement, sans compter les aspects transversaux (droits des communautés et des travailleurs). »

Une récente étude de WCS a d’ailleurs mis en avant que la population d’éléphants du bassin croît depuis 30 ans grâce à la pratique de conservation et de surveillance des société de gestion forestière.

La préservation des forêts tropicales : un enjeu économique mondiale puissant

Gérer durablement les forêts tropicales, ce n’est pas gratuit. Pour qu’elle soit comprise de tous et mise en place, l’ATIBT aux côtés d’ONG, comme WWF, mais aussi d’organismes de certification, mettent en place des formations auprès de tous les acteurs de la filière, pour continuer de lutter contre le commerce illégal du bois. L’objectif de l’association est de doubler les surfaces certifiées au cœur du Bassin du Congo, mais aussi dans d’autres pays d’Afrique.

« Aujourd’hui la certification est connue mais on ne paie pas le juste prix pour ce bois car il y a une réelle concurrence déloyale des exploitations illégales qui ne respectent pas les règles et mettent à mal l’environnement et la société. » a déclaré Françoise Van de Ven, Présidente de l’ATIBT. « 300 millions d’hectares de forêts ne peuvent pas être sous surveillance au quotidien ! Et sur 51 millions d’hectares de forêt de production, seulement 10% sont certifiés aujourd’hui. C’est en progrès mais beaucoup de travail reste à faire. Avec nos partenaires comme KfW, PPECF, et d’autres qui encadrent les acteurs vers la certification, nous espérons doubler les surfaces certifiées au bassin du Congo mais aussi de manière plus étendue car la question de la certification du bois tropical se pose aussi bien au Liberia, en Sierra Leone… » précise la Présidente.

« Grâce à la gestion durable des forêts, nous pouvons constater un vrai progrès. Nous pouvons compter désormais 95 000 éléphants versus 60 000 il y a quelques années et la majorité de ces mammifères se trouvent dans des concessions forestières! Sur le plan économique, notre ambition est de continuer à valoriser l’initiative Fair&Precious car grâce à cela, nous continuons de préserver les forêts tropicales pour les générations futures, tout en créant de l’emploi en local et en dynamisant la faune et la flore et en stockant du carbone. » conclue-t-elle.

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