Quels sont les effets de l’hyperglycémie sur la peau ? Découvrez comment un excès de sucre altère les fibroblastes, la cicatrisation et le collagène.
Hyperglycémie et peau : voilà un lien que l’on commence tout juste à comprendre. De plus en plus de recherches scientifiques confirment que des taux chroniquement élevés de glucose dans le sang ont des effets délétères sur la qualité, l’élasticité et la capacité de régénération de la peau. Une étude conjointe de l’Inserm, de l’université de Bordeaux et de LVMH Recherche dévoile les mécanismes cellulaires précis derrière ce phénomène. En cause : les fibroblastes, cellules-clés de la jeunesse cutanée, profondément affectés par l’hyperglycémie.
Hyperglycémie et peau : un lien désormais prouvé scientifiquement
Le glucose est indispensable à nos cellules, mais en excès, il devient un facteur de dégradation. En cas d’hyperglycémie chronique, le sucre perturbe la respiration mitochondriale, processus fondamental de production d’énergie dans nos cellules, notamment celles de la peau.
« Le blocage de la chaîne respiratoire des mitochondries produit des molécules toxiques pour la peau, impliquées dans son vieillissement », explique Rodrigue Rossignol, directeur de recherche Inserm.
Pourquoi l’hyperglycémie chronique dégrade la qualité de la peau ?
Une équipe de chercheurs a étudié plusieurs modèles, notamment des fibroblastes in vitro, un derme reconstitué, une peau humaine artificielle et une biopsie cutanée. Leur objectif : observer comment l’hyperglycémie affecte la physiologie cutanée. Ils ont découvert que les fibroblastes réagissent mal à une hausse du glucose. La respiration mitochondriale est réduite, les mitochondries se fragmentent et leur dégradation s’accélère.
Conséquence directe : la production d’énergie cellulaire chute, entraînant une peau plus fine, moins élastique, avec une cicatrisation ralentie.
Hyperglycémie et peau : quelles conséquences sur les fibroblastes ?
Les fibroblastes jouent un rôle central dans la production de collagène, la protéine qui donne à la peau sa fermeté et sa capacité à se régénérer. Lorsqu’ils sont exposés à un excès de glucose, leur comportement se modifie.
« En cas de lésion cutanée, le réseau de collagène sert notamment aux fibroblastes à se déplacer dans le derme pour aller réparer les zones abîmées. Nos résultats montrent que, sous l’effet de l’hyperglycémie, ce réseau est défaillant, et la reconstruction cutanée est moins efficace », explique Rodrigue Rossignol.
Comment l’hyperglycémie affecte la production de collagène cutané ?
Lorsque le métabolisme énergétique est altéré, les fibroblastes produisent un collagène moins structuré, moins dense et moins fonctionnel. Cela contribue directement à un vieillissement cutané prématuré et à une moindre capacité de cicatrisation. La peau perd en tonicité, en élasticité, et devient plus vulnérable face aux agressions extérieures.
GDF15 : une piste pour contrer les effets de l’hyperglycémie sur la peau
Les chercheurs ont identifié un acteur clé dans la régulation de l’activité des mitochondries : le facteur GDF15. Cette molécule voit son activité chuter dès les premiers signes d’hyperglycémie. Or, en l’absence de GDF15, la fabrication de nouvelles mitochondries s’effondre.
Mais lorsqu’ils ont supplémenté leurs modèles de peau en GDF15, même en présence de taux élevés de glucose, les chercheurs ont observé une amélioration du métabolisme énergétique cellulaire.
« Nos résultats suggèrent que GDF15 pourrait être au cœur d’une potentielle stratégie pharmacologique ou dermatologique visant à limiter les dommages cutanés causés par le stress métabolique », indique Rodrigue Rossignol. Il tempère néanmoins cette conclusion : « L’inflammation chronique, bien présente en cas d’hyperglycémie réelle, pourrait réduire l’efficacité de ce traitement. »
Hyperglycémie et peau : un enjeu de santé publique sous-estimé
L’Organisation mondiale de la santé (OMS) considère qu’un taux de glucose supérieur à 1,2 g/L constitue une hyperglycémie modérée. Pourtant, beaucoup de personnes ignorent qu’elles sont concernées. Ce déséquilibre métabolique peut passer inaperçu, tout en impactant silencieusement des fonctions vitales comme la réparation de la peau.
Mieux comprendre le lien entre hyperglycémie et peau, c’est aussi mieux prévenir les complications cutanées liées au diabète ou au prédiabète. Et cela ouvre la voie à de nouveaux soins ciblés, alliant santé métabolique et esthétique.
Ce qu’il faut retenir
L’hyperglycémie chronique fragilise les fibroblastes, qui sont essentiels à la réparation et à la fermeté de la peau.
Elle inhibe la respiration mitochondriale, favorise le stress oxydatif et altère la production de collagène.
Le facteur GDF15 apparaît comme une piste prometteuse pour inverser ces effets, mais nécessite encore des validations cliniques.
La prévention et le dépistage de l’hyperglycémie sont donc essentiels, non seulement pour la santé globale, mais aussi pour préserver la qualité de la peau.
Sources :
Repression of oxidative phosphorylation by NR2F2, MTERF3 and GDF15 in human skin under high-glucose stress
1 Inserm U1211, 33076 Bordeaux, France
2 Bordeaux University, 146 rue Léo Saignat, 33076 Bordeaux, France
3 LVMH Recherche, Saint-Jean-de-Braye, France
4 Univ. Bordeaux, Bordeaux Proteome, Bordeaux, France
5 CELLOMET, ADERA, 146 rue Léo Saignat, 33076 Bordeaux, France
6 Inserm UMR 1312, Bordeaux Institute of Oncology (BRIC), Bordeaux, France.
7 Metabolomics facility METATOUL, Toulouse, France
8 Univ. Bordeaux, CNRS, Bordeaux INP, CBMN, UMR 5248, F-33600 Pessac, France
9 RESTORE, UMR 1301-Inserm 5070-CNRS EFS Univ. P. Sabatier, Toulouse, France.
10 Medical Genetics Department, CHU Bordeaux, 33076 Bordeaux (France)
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Redox Biology
https://doi.org/10.1016/j.redox.2025.103613
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