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Le mélanome est un cancer de la peau très agressif. Il est souvent dû à l’exposition prolongée au soleil. Le nombre de nouveaux cas augmente très rapidement en Europe. Ainsi, en 2011, près de 10.000 nouveaux cas ont été observés en France et 1.620 décès étaient imputables au mélanome. Les mélanomes peuvent être détectés lors d’un examen chez le dermatologue. Hélas, cela peut-être trop tardif. Mais il est désormais possible de les diagnostiquer de manière bien plus précoce. Explications.

Les mélanomes peuvent être détectés précocement grâce un examen visuel de l’ensemble de la peau, pratiqué en général par un dermatologue. Cette détection en amont est capitale, car les mélanomes ne sont curables que quand ils sont détectés à un stade précoce et sans métastases. Les méthodes visuelles actuelles diagnostiquent trop tardivement la maladie. La polarisation de la lumière qui fait l’objet de recherches fondamentales au sein du laboratoire Vision de L’ISEN permettrait de surveiller les grains de beauté, de diagnostiquer de manière précoce les mélanomes et d’abaisser le taux de mortalité. Pour le professeur Ayman Al Falou qui dirige le laboratoire Vision de l’ISEN, cette recherche pourrait permettre « de sauver de nombreuses vies. Le mélanome est comme un iceberg, c’est sa face cachée qui en dit plus sur l’étendue de la maladie. Plus le mélanome est détecté précocement, plus nous aurons de chances d’éviter aux malades des traitements lourds et inefficaces et de faire baisser le taux de mortalité lié à ce type de cancer. »

Un diagnostic difficile à faire précocement 

Actuellement, les techniques de diagnostic reposent entre autres sur la détection visuelle du mélanome et sur le prélèvement. Or, l’apparition de tumeurs visibles sur la couche supérieure de l’épiderme est un signe que la maladie est déjà installée avec un risque important de propagation à d’autres organes. L’imagerie polarimétrique qui avait été mise au point par le laboratoire de l’ISEN dans le domaine de la défense pour la détection de mines dans le port de Brest semble trouver là un débouché imprévu mais considérable. « Trouver des mines dans une mer opaque ou détecter un mélanome sous la peau c’est au fond la même chose pour nous chercheurs. Il nous faut juste définir la réflexion d’une peau saine qui sera notre base pour pouvoir ensuite discerner les cellules malades », explique le professeur Ayman Al Falou.

Une recherche prometteuse

mélanomes-santecoolLa polarisation, un paramètre de la lumière, fait l’objet de recherches fondamentales au sein du laboratoire Vision. « Ce que l’on voit d’un objet posé sur la table de son bureau, n’est pas l’objet lui-même mais la réflexion de la lumière sur cet objet. Cela fonctionne de la même façon pour la peau. Selon la couleur (longueur d’onde) et la polarisation, la lumière peut pénétrer plus ou moins profondément à l’intérieur de la peau et ainsi, dévoiler ce qui n’est pas accessible à l’œil nu. Cette méthode permet de repérer des formes et ce, même dans des milieux très obscurs ; en deux mots, elle permet de voir dans l’obscurité », explique le chercheur.

Sur la photo de gauche, ce que l’on peut voir dans des conditions classiques, sans polarisation, à droite ce que l’on peut voir grâce à la méthode de la polarisation. S’il est quasi impossible de repérer l’élément carré implanté sous la peau sur la photo de gauche, ce carré est clairement discernable sur l’illustration de droite, comme cela pourrait l’être avec une tumeur de la peau.

L’équipe du laboratoire de l’ISEN (En particulier le Dr. Isabelle Léonard, Dr. Marwa El Bouz et le Doctorant Angel Bleunven, Pauline Le Vigouroux et Solenn Toupin) a déjà réalisé de multiples expériences sur la peau d’animaux : porc, lotte, pigeon avec des résultats très prometteurs. « Il est essentiel désormais de passer à une autre phase : les essais sur des peaux humaines », précise avec conviction Ayman Al Falou.  Pour ce faire, un laboratoire de culture va être mis en place au sein de l’ISEN et en collaboration avec le CHU (Équipe dirigée par le Prof. Tristan Montier) de Brest où de la peau humaine sera mise en culture à partir de cellules et qui permettra de reproduire sur de la peau humaine les expériences tentées préalablement sur la peau d’animaux. « Ce labo va pouvoir voir le jour car les précédent résultats ont été très encourageants. Ces nouveaux essais sur peau humaine permettront de mettre au point les caractéristiques d’une peau saine puis de détecter les peaux malades pour, d’ici 2 ans, avoir un système de diagnostic de mélanomes fiable. Cette nouvelle technique de détection des mélanomes éviterait les interventions inutiles, intrusives et coûteuses et permettrait de surveiller la peau de manière efficace et peu coûteuse. Ainsi, avec l’image polarisée, le médecin disposerait de données pour comparer l’évolution du mélanome, » analyse Ayman Al Falou.

200 000 euros/an pour sauver des milliers de vies

Pour commencer les essais sur les peaux humaines et mettre au point un appareil de détection opérationnel des mélanomes le laboratoire Vision de l’ISEN est à la recherche de financements pour l’achat de matériel (notamment des polariseurs et des lasers, des cameras… pour rechercher les longueurs d’ondes les plus efficaces) et le recrutement de deux chercheurs (un enseignant-chercheur et un post-doc) et un thésard. L’ISEN investit déjà presque la moitié de cette somme en fonds propres avec l’aide de Malakof Mederic. « Il s’agit donc de réunir 200 K€ via des investissements privés ou publics pour financer ce programme de recherche ambitieux pendant trois ans afin d’espérer faire avancer la recherche technique dans un but médical », conclut Ayman Al Falou.