Les préparations à base de plantes (phytothérapie) ou d’huiles essentielles (aromathérapie) sont des alternatives aux autres médicaments, dits allopathiques, de plus en plus utilisées pour soigner les animaux. Ce constat est valable y compris pour les animaux producteurs de denrées alimentaires. Si les produits ont une visée thérapeutique, ils sont alors considérés comme des médicaments vétérinaires. Ceci implique de pouvoir garantir l’absence de risque pour les consommateurs de denrées alimentaires provenant d’animaux ainsi traités. Cependant, l’application de la réglementation actuelle pour évaluer ce risque est compliquée pour les médicaments à base de plantes. Face à ce constat, l’Anses s’est autosaisie afin de proposer une méthode d’évaluation adaptée aux médicaments vétérinaires à base de plantes.
L’utilisation de médicaments vétérinaires à base de plantes est de plus en plus plébiscitée par les éleveurs et les vétérinaires. Toutefois, la grande majorité des plantes, préparations de plantes et huiles essentielles fréquemment utilisées en médecine vétérinaire n’a pas fait l’objet de l’évaluation prévue par la réglementation sur les médicaments vétérinaires. De ce fait, ils ne peuvent pas être utilisés à des fins thérapeutiques sur des animaux producteurs de denrées alimentaires. L’impossibilité d’emploi est due notamment à l’absence de limite maximale de résidus (LMR), à savoir la quantité maximale de substances actives contenues dans le médicament que l’on peut retrouver dans les denrées alimentaires d’origine animale, sans que cela ne présente de risque pour la santé des consommateurs. Cette limite, définie au niveau européen, est un prérequis pour pouvoir autoriser la mise sur le marché des médicaments vétérinaires destinés aux animaux producteurs de denrées alimentaires.
La méthode actuelle n’est pas adaptée aux médicaments à base de plantes
« Les méthodes analytiques utilisées dans les dossiers LMR sont complexes à développer pour les médicaments à base de plantes, explique Sophie Barreteau, adjointe au directeur de l’Anses-ANMV (Agence nationale du médicament vétérinaire) en charge du département d’évaluation scientifique. La difficulté repose sur l’identification, pour une substance végétale donnée, des résidus marqueurs (substance parentale et métabolites qui serviront au dosage). Le problème se complexifie lors de l’utilisation d’huiles essentielles étant donné le nombre de composés chimiques qui les composent. De même, l’identification botanique rigoureuse de la plante utilisée est un prérequis. »
Faciliter l’utilisation des plantes en médecine vétérinaire sans risque pour le consommateur
Au sein de l’Anses, l’Agence nationale du médicament vétérinaire a donc mené une expertise pour proposer une méthode d’évaluation adaptée. Celle-ci permettrait de définir une liste de plantes pour lesquelles il n’y a pas besoin de définir de LMR car leur utilisation est considérée sans risque pour le consommateur.
Il s’agit de plantes déjà évaluées dans le cadre d’autres réglementations et pour lesquelles des données sont disponibles : par exemple des plantes habituellement consommées par les animaux ou les êtres humains, des substances végétales par ailleurs autorisées comme compléments alimentaires, ou contenues dans des médicaments autorisés en médecine humaine, ou encore pour lesquelles il existe des données montrant qu’elles ne sont pas toxiques pour l’être humain aux doses utilisées.
« Cette méthode propose une approche scientifique pour évaluer les plantes et vérifier qu’elles ne présentent pas de danger. Une reconnaissance européenne de cette méthode permettrait le classement LMR de nombreuses plantes et éviterait que les utilisateurs aient recours à la phytothérapie et à l’aromathérapie en dehors du cadre réglementaire, comme c’est le cas actuellement. », indique Jean-Pierre Orand, directeur de l’Anses-ANMV.
Par ailleurs, la méthode proposée permet d’identifier les études ou données manquantes pour conclure à l’absence de préoccupation s’agissant de certaines plantes ou parties de plantes. Leur autorisation en médecine vétérinaire devra être évaluée au cas par cas, et des études complémentaires devront être menées. La dernière catégorie prévue est celle des plantes non utilisables en médecine vétérinaire du fait de leur toxicité avérée pour l’être humain et d’un possible risque pour le consommateur.
Une reconnaissance officielle de la méthodologie de l’Anses au niveau européen nécessaire
Afin de valider la méthode développée, le groupe de travail l’a testée sur 21 plantes, huiles essentielles ou substances significativement présentes dans les huiles essentielles couramment utilisées en médecine vétérinaire.
« Attention, les conclusions de l’expertise ne donnent pas le feu vert pour leur utilisation dans des médicaments à base de plantes, précise Sophie Barreteau. Il faudrait pour cela que la méthode soit officiellement reconnue au niveau européen. Nous allons la présenter prochainement à l’Agence européenne du médicament (EMA). Notre travail est un pas en avant vers l’inscription des substances végétales dans une liste adaptée de la réglementation LMR et donc vers la possibilité d’utiliser des plantes et huile essentielles en médecine vétérinaire sans risque pour le consommateur, afin de répondre à la forte attente des éleveurs et des vétérinaires qui souhaitent utiliser des alternatives aux antibiotiques de synthèse. »
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