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Nouvelles recherches pour lutter contre la listéria

Infection grave, d’origine alimentaire, due à la bactérie Listeria monocytogenes, la listériose est associée à des manifestations cliniques sévères et un taux de mortalité élevé chez les individus dont le système immunitaire est affaibli. Des chercheurs de l’Inra(a), en collaboration avec leurs collègues de l’Institut Pasteur(b), mettent en évidence la capacité originale de L. monocytogenes à générer des formes intracellulaires dormantes qui pourraient être hébergées, de façon insoupçonnée, chez leur hôte. Ces résultats sont publiés le 30 novembre 2017 dans la revue PLoS Pathogens.

 

La listériose est une maladie causée par la consommation d’aliments contaminés par la bactérie Listeria monocytogenes. C’est une maladie peu fréquente mais particulièrement dangereuse pour les personnes immunodéprimées, les personnes âgées et les nouveau-nés. Elle affecte également les animaux d’élevage. Le pouvoir pathogène de L. monocytogenes est lié à sa capacité à envahir les cellules de l’organisme, comme les cellules épithéliales de l’intestin, du foie, du cerveau et du placenta. Lorsqu’elle atteint le cytoplasme des cellules, L. monocytogenes s’y multiplie et utilise un réseau de filaments cellulaires – appelé cytosquelette – pour se déplacer et se propager dans les cellules voisines. Cette phase permet à L. monocytogenes de se disséminer dans les tissus.

Afin d’étudier le comportement de L. monocytogenes au cours d’une infection asymptomatique, des chercheurs de l’Inra(a), en collaboration avec leurs collègues de l’Institut Pasteur(b), ont créé un modèle expérimental original in vitro, utilisant des cultures de cellules épithéliales humaines. A la faveur de ce modèle, ils ont découvert que L. monocytogenes a la capacité de changer de style de vie lorsqu’elle infecte plusieurs jours durant des cellules de foie et de placenta. Les bactéries cessent progressivement de produire la protéine ActA, laquelle leur permet de se déplacer en utilisant le cytosquelette des cellules infectées. Elles se retrouvent alors piégées dans des vacuoles. Dans cette niche intracellulaire, elles sont plus tolérantes aux antibiotiques et conservent la capacité de se réactiver vers des formes de dissémination.

Les scientifiques ont également mis en évidence que ces bactéries peuvent aussi parasiter les cellules hôtes au cours des divisions cellulaires, sans que l’on puisse les détecter sur les milieux de culture habituellement utilisés dans les tests diagnostiques. Bien que viables, les bactéries sont donc dans un état physiologique non cultivable.

Ces résultats in vitro révèlent la faculté de L. monocytogenes à générer des formes intracellulaires dormantes, qui pourraient être hébergées, de façon insoupçonnée, chez l’homme ou l’animal. Un tel portage asymptomatique de cette bactérie pathogène pourrait expliquer pourquoi la période d’incubation de la listériose est parfois longue (jusqu’à trois mois). C’est aussi une explication possible de la difficulté à identifier l’aliment contaminé source, dans les cas de listérioses sporadiques, si la maladie survient longtemps après l’ingestion de l’aliment contaminé. Il se pourrait que des formes dormantes de L. monocytogenes se réactivent. Ce mécanisme pourrait également conduire au portage sain de cet agent pathogène chez un animal servant de réservoir à la bactérie.

Autant de conséquences qui appellent à reconsidérer, à la lumière de ces résultats, les connaissances acquises sur la vie intracellulaire de cette bactérie pathogène. Autant de pistes d’investigations susceptibles, à terme, de déboucher sur de nouvelles stratégies thérapeutiques et diagnostiques, et à une meilleure gestion du risque lié à un contaminant alimentaire microbien.

(a) Institut Microbiologie de l’alimentation au service de la santé (Inra, AgroParisTech, Université Paris-Saclay)
(b) Unité Interactions bactéries-cellules (Inra, Institut Pasteur, Inserm)

 

INRA

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