Une nouvelle étape a été franchie dans la prévention des maladies infectieuses en France avec la possibilité désormais pour les pharmaciens, infirmiers et sages-femmes de prescrire[1] et d’administrer les vaccins non vivants – au-delà de la COVID et de la grippe – à toutes les personnes âgées de 16 ans et plus[2]. Cette extension de compétences à de nouveaux vaccinateurs – en complément du rôle pivot du médecin généraliste dans la vaccination – est une avancée fondamentale pour simplifier le parcours vaccinal en France et soutenir l’augmentation des couvertures vaccinales.
La Haute Autorité de Santé recommande d’étendre les compétences vaccinales à un plus grand nombre de professionnels de santé. Pharmaciens, infirmiers et sages-femmes pourront désormais prescrire et administrer les vaccins non vivants du calendrier vaccinal à toutes les personnes âgées de 16 ans et plus[3] : Diphtérie-Tétanos-Coqueluche-Poliomyélite ; Papillomavirus humains / Pneumocoque ; Hépatite B ; hépatite A ; Méningocoques A, C, W, Y
Cette recommandation intervient dans un contexte de pandémie où la France fait face à un ralentissement important des vaccinations de routine[4]. Ce ralentissement est d’autant plus grave que pour certaines vaccinations, les taux de couverture vaccinale sont largement en dessous des recommandations émises par les autorités.
A titre d’exemple, la couverture vaccinale contre le papillomavirus (HPV) en France est de 32,7% (une des plus faibles d’Europe) pour le schéma complet chez les filles âgées de 16 ans[5] alors que l’objectif fixé par l’Institut National du Cancer est de 80% d’une classe d’âge, garçons et filles, vaccinés contre le HPV à l’horizon 2030[6]. Ce taux de couverture vaccinale encore trop bas ne permet pas d’offrir une protection optimale de la population française face aux infections à HPV, ni d’atteindre l’élimination des cancers liés au HPV.
Or, les pays où la couverture vaccinale HPV est élevée (Suède, Portugal, Royaume-Uni…) sont ceux où les autorités ont mis en place des programmes ambitieux et cette recommandation en est une première étape importante.
Rappelons qu’aujourd’hui, pour se faire vacciner, il faut aller chez le médecin, acheter ensuite le vaccin chez le pharmacien puis revenir chez le médecin pour se faire vacciner ; et cela autant de fois que de doses nécessaires.
« Un parcours vaccinal complexe, qui peut décourager. Si le médecin généraliste est un pivot de la vaccination, son travail doit être appuyé par les autres professionnels de santé en ville pour faciliter la vaccination, à l’image de ce qui est fait pour la grippe et la COVID, et ainsi soutenir l’augmentation des taux de couverture vaccinale », déclare Bruno Julia, pharmacien d’officine à Lherm (Haute Garonne).
« Cette mesure va permettre à l’ensemble des jeunes générations à partir de 16 ans de pouvoir accéder plus simplement à une vaccination HPV, en pouvant ainsi se rendre chez un professionnel prescripteur pour obtenir l’ordonnance et/ou directement la vaccination. C’est un progrès majeur car à ces âges-là les adolescents étant généralement peu malades, ils consultent peu. Chaque opportunité de pouvoir les vacciner avant qu’ils ne sortent du bon créneau des recommandations vaccinales est donc à saisir ! », souligne le Dr Rodolphe Chastel, Médecin Généraliste à Lyon.
Rappelons que l’infection à papillomavirus est une infection sexuellement transmissible très fréquente qui se transmet par simple contact sexuel et qui touche environ 70 à 80% de la population sexuellement active[7] – femmes et hommes confondus. Les conséquences de ces infections peuvent être graves. En France, ~12 nouveaux cas de cancers ano-génitaux liés aux papillomavirus sont diagnostiqués chaque jour chez les femmes et les hommes, soit ~4300 nouveaux cas chaque année[8] (cancers de la vulve, du vagin, de l’anus et du col de l’utérus).
Un sondage datant de juillet 2021 indiquait d’ailleurs que 77% des français seraient favorables à une vaccination chez le pharmacien pour les vaccins de l’adulte et de l’adolescent[9].
« Cette recommandation est une étape majeure dans la mise en place en France d’une politique vaccinale ambitieuse, qui nous permettra de rattraper notre retard et de viser l’élimination des cancers liés au HPV », se réjouit Clarisse Lhoste, Présidente de MSD France. « En tant que pharmacienne, je suis convaincue que la mise en place de nouveaux points de vaccination va simplifier le parcours vaccinal et en tant que parent, je sais à quel point cela sera un facteur clef pour permettre aux adolescents de se faire vacciner. »
L’intégration des moins de 16 ans à la recommandation – la prochaine étape décisive fixée par les autorités
La Haute autorité de santé étudiera dans un second temps l’extension des compétences vaccinales aux trois professions précitées pour les vaccinations proposées aux personnes de moins de 16 ans : cette extension sera importante pour poursuivre la simplification du parcours vaccinal en France et faire bénéficier à l’ensemble des adolescents des mêmes chances dans la prévention de différentes maladies, y compris les cancers provoqués par le papillomavirus.
Sources :
[1] A l’exception des vaccins contre le méningocoque B et la rage
[2] A l’exception des patients immunodéprimés pour lesquels ces professions pourront seulement administrer les vaccins et non les prescrir
[3] A l’exception des patients immunodéprimés pour lesquels ces professions pourront seulement administrer les vaccins et non les prescrire
[4] Covid-19 : usage des médicaments – rapport 6 – EPI-PHARE
[5] Vaccination, BSP édition nationale, Santé publique France, mai 2021, Figure 2 : Couvertures vaccinales (%) départementales contre les papillomavirus humains « schéma complet à 2 doses » à 16 ans, France, cohorte de naissance 2004, https://www.santepubliquefrance.fr/determinants-de-sante/vaccination/documents/bulletin-national/bulletin-de-sante-publique-vaccination.-mai-2021, consulté le 28 janvier 2022
[6] https://www.e-cancer.fr/Institut-national-du-cancer/Strategie-de-lutte-contre-les-cancers-en-France/La-strategie-decennale-de-lutte-contre-les-cancers-2021-2030/Une-demarche-collective-d-elaboration-de-la-strategie/Le-lancement-de-la-strategie
[7] https://www.santepubliquefrance.fr/maladies-et-traumatismes/maladies-a-prevention-vaccinale/infections-a- papillomavirus, accédé le 21 décembre 2020
[8] Shield D. et al. New cancer cases in France in 2015 attributable to infectious agents: a systematic review and meta-analysis. European Journal of Epidemiology. 2017
[9] Sondage IPSOS, réalisé entre mars et avril 2021, auprès d’un échantillon de 1 018 Français de 18 ans et plus, et de 500 professionnels de santé dont 200 médecins généralistes, 200 pharmaciens d’officines et 100 infirmiers