On estime qu’une personne sur 15 000 à une personne sur 25 0002 est atteinte d’acromégalie. Cette maladie touche un peu plus de femmes que d’hommes, et concerne toutes les populations2. Pourtant, elle reste largement méconnue. Alors qu’est-ce que l’acromégalie ? Quelle est sa prise en charge ? Réponses.

L’acromégalie engendre d’importantes complications psychologiques et physiques2, comme une croissance exagérée du visage et des extrémités lorsqu’elle se manifeste après la puberté, ou une très grande taille (gigantisme) lorsqu’elle survient avant la puberté2. Elle est due à une sécrétion excessive de l’hormone de croissance2. Plusieurs comorbidités graves peuvent aussi influer sur l’espérance de vie des patients3.

Le diagnostic de l’acromégalie est d’autant plus complexe qu’elle peut être confondue avec d’autres maladies. Ses caractéristiques morphologiques peuvent aussi être attribuées, à tort, à une descendance génétique ou un trait de famille (grande taille, grandes mains…)2.

Pour soutenir les patients acromégales dans leurs parcours et améliorer leur qualité de vie, l’association de patients « Acromégales, Pas Seulement » et Pfizer travaillent main dans la main, pour développer des outils et mettre en place des actions qui leur sont dédiés, comme le projet de photographie « Belles et Beaux ACROquer ».

Faire connaître cette maladie sans stigmatiser les patients, réduire le délai du diagnostic, et accompagner les patients dans l’acceptation de leur estime de soi, sont les objectifs de la journée mondiale de l’acromégalie qui a lieu le 1er novembre.

Acromégalie et fausses croyances

28% des Français interrogés pensent que l’acromégalie est facile à diagnostiquer1. Pourtant, il faut compter entre 4 à 10 ans entre l’apparition des premiers symptômes et la pose du diagnostic3. « L’acromégalie se manifeste par des symptômes communs à d’autres pathologies, explique le Pr Philippe Chanson, chef du service d’endocrinologie à l’hôpital Bicêtre (Le Kremlin- Bicêtre). Elle peut être associée à des maladies plus fréquentes comme l’hypertension, le diabète, l’apnée du sommeil ce qui la rend encore plus difficile à identifier. Le retard diagnostique pour les patients acromégales est en effet très important. »

Plusieurs éléments font de l’acromégalie une maladie difficile à détecter, car une grande partie de ses symptômes sont courants.

« La fatigue, l’hypertension, le diabète ou encore les douleurs articulaires sont si communs qu’ils n’amènent pas facilement les médecins vers la piste d’une maladie rare… Et c’est la même chose du côté des patients. Ils voient bien qu’il se passe quelque chose, mais n’osent pas aller voir leur médecin pour dire qu’ils changent de taille de chaussure et de bague chaque décennie, ou qu’ils trouvent qu’ils vieillissent mal. »

51% des personnes sondées pensent que l’acromégalie touche l’enfant1. Les premiers symptômes se manifestent plus fréquemment entre 30 et 40 ans, bien que la maladie puisse apparaitre à tout âge2. C’est une pathologie endocrinienne liée à une production excessive d’hormone de croissance par l’hypophyse, causée par une tumeur bénigne appelée adénome hypophysaire2. La maladie se manifeste différemment en fonction de l’âge d’apparition : lorsqu’elle se déclare avant la puberté, elle se caractérise physiquement par une taille importante et on parle alors de gigantisme. Le gigantisme peut être associé ou non à d’autres signes d’acromégalie (on parle alors d’acromégalo-gigantisme). Certains enfants ou adolescents atteints présentent notamment des complications cardiovasculaires et des douleurs aux articulations2.

A l’âge adulte, cette croissance exagérée touche principalement le visage et les extrémités : mains et pieds élargis, épaississement de la peau, nez épais et large, front bombé, traits marqués, menton saillant, etc2.

« Ces signes dysmorphiques apparents sont le plus souvent diagnostiqués de manière trop tardive, car les changements induits par cette pathologie sont si lents et progressifs qu’ils sont très difficiles à constater pour qui côtoie le patient régulièrement. C’est souvent la comparaison des photos du patient, à des âges différents, qui alerte les malades et les familles, poursuit le Pr Chanson.

12% des français interrogés pensent que cette maladie peut se guérir1. Non traitée, l’acromégalie s’aggrave, sans guérison spontanée, entraînant une diminution de 10 ans d’espérance de vie en moyenne2. On peut néanmoins la contrôler. « Des interventions chirurgicales et des traitements restent possibles, mais les déformations osseuses restent irréversibles en cas de diagnostic tardif. », alerte le Pr Thierry BRUE, chef du service d’endocrinologie à l’université d’Aix-Marseille (Marseille).

L’objectif du traitement est double : d’une part, stopper la progression de la tumeur et atténuer les symptômes, et d’autre part normaliser le taux d’hormone de croissance pour enrayer l’évolution de la maladie2.

Il existe trois types de traitements possibles2 :

  • En première intention, la chirurgie pour retirer l’adénome L’opération permet de rétablir une sécrétion normale de l’hormone de croissance chez 80 à 90% des personnes ayant un adénome suffisamment petit pour être ôté par voie nasale (microadénomes). En revanche, ce résultat n’est obtenu que chez 50 à 60% des personnes qui présentent un adénome de grande taille (macroadénome, de diamètre supérieur à 10 mm)2.
  • En cas d’échec, d’impossibilité de la chirurgie ou de récidive, la radiothérapie peut permettre de détruire les cellules de la tumeur ou d’empêcher les résidus de tumeur n’ayant pu être totalement enlevés par chirurgie de croître à nouveau2.
  • Les médicaments, pour réduire le taux d’hormone de croissance, viennent la plupart du temps en association avec la chirurgie et/ou la radiothérapie, notamment quand l’ablation de la tumeur a été incomplète2.

Le terme « guérison » de l’acromégalie est à prendre avec précaution. La guérison est possible seulement après l’exérèse totale de l’adénome dans le cadre d’une chirurgie. Cependant, tout patient même guéri devra être suivi à vie4.

Le saviez-vous ?

  • L’acromégalie est également appelée maladie de Pierre Marie, d’après le nom du médecin qui l’a décrite en 18862.
  • Le premier cas connu de patients acromégale à ce jour serait le pharaon SaNakht, qui vécut en 2700 avant notre ère8.

Une errance diagnostic qui impacte l’estime de soi

Le diagnostic constitue un enjeu majeur pour les malades : ces retards augmentent le risque de complications et conduisent aussi à une détérioration psychosociale5 Chez l’adulte, les modifications corporelles, la fatigue chronique, les troubles sexuels et la tendance au ronflement peuvent être à l’origine de conflits familiaux et d’altération de l’estime de soi, surtout avant que le diagnostic ne soit posé. L’acromégalie a également un impact non négligeable sur la vie professionnelle2.

L’annonce du diagnostic permet aux patients de comprendre et même d’expliquer ce qui leur arrive, mais elle signe dans le même temps le début du traitement chronique. L’annonce de la maladie est une étape qui peut nécessiter un accompagnement psychologique2.

« L’errance diagnostique fait beaucoup de mal aux patients : pendant des années, ils ont ces symptômes insidieux incompréhensibles, des douleurs articulaires inexpliquées. Les patients ne se reconnaissent pas, ne retrouvent pas l’énergie qu’ils ont toujours eu… Cela a des impacts importants sur les relations avec les proches : la fatigue par exemple, peut isoler les patients. L’entourage ne comprend pas car rien n’a été révélé du point de vue médical. Le diagnostic remet souvent le dialogue avec l’entourage, la famille et les amis », raconte Isabelle Pellegrini, psychologue clinicienne au sein du Pôle ENDO de l’hôpital de la Conception, AP-HM (Marseille).

Une prise en charge pluridisciplinaire

L’acromégalie a des retentissements sur de nombreuses parties du corps et organes, avec des conséquences rhumatologiques, cardiovasculaires, respiratoires, gynécologiques, thyroïdiennes et métaboliques3. La présence de comorbidités affecte significativement la qualité de vie des patients et peut réduire leur espérance de vie6. Le risque de mortalité d’un patient acromégale non traité est deux fois plus élevé que celui d’un individu non atteint du même âge.7

Le traitement des complications liées à l’acromégalie doit souvent être initié parallèlement au traitement de l’adénome hypophysaire. La prise en charge des patients atteints d’acromégalie devrait être réfléchie et organisée en comité pluridisciplinaire7.

« En tant que médecin, on peut avoir tendance à être focalisé sur les complications graves de la maladie comme l’hypertension, les problèmes cardiaques, le diabète, alors que souvent pour les patients, ce qui compte le plus c’est la qualité de vie : la modification des traits du visage, la transpiration excessive, la fatigue… C’est pourquoi notre accompagnement évolue. Ne jamais oublier qu’être gêné pour parler, ça peut gâcher une vie ! », précise Thierry BRUE.

Mettre en lumière les femmes et les hommes derrière les patients

Parce que l’acromégalie a de nombreuses répercussions physiques et psychologiques chez les patients, l’association de patients « Acromégales, Pas Seulement » et Pfizer s’unissent pour redonner confiance aux patients, notamment avec le projet « Belles et Beaux ACROquer », démarré en 2019.

Pour offrir aux patients des moments dédiés à l’amélioration de l’image qu’ils ont d’eux-mêmes, des ateliers ont été organisés, avec l’aide de professionnels (discussions autour des modifications corporelles, coaching de développement personnel, partage en groupe, colorimétrie et morphologie, mise en beauté). Une séance photo a également été réalisée dans le but de diffuser les œuvres photographiques pour mieux faire connaître l’acromégalie, au-delà de la maladie et de ses symptômes. Ces photos ont permis de mettre en place une campagne solidaire de sensibilisation et d’information du public via la plateforme GOODEED. Les fonds collectés viennent soutenir le financement de futures initiatives de l’association pour les patients.

« Les patients acromégales sont assez isolés et ont peu d’occasions de parler de leur pathologie avec d’autres. En leur proposant de se rencontrer, ils découvrent qu’ils éprouvent les mêmes difficultés, voient comment chacun chemine avec ça… Il devient plus facile d’accepter sa différence lorsqu’on sait qu’on est plusieurs à être si différents, et lorsque l’on se sait compris. », explique Catherine Lançon présidente de l’association « Acromégales, Pas seulement ».

Il est prévu de renouveler l’opération régulièrement, pour permettre aux patients de bénéficier d’un accompagnement spécifique sur la confiance et l’estime de soi.

Pour en savoir plus : www.acromegalie-asso.org

 

Sources :

1 Etude Ifop pour Pfizer, réalisée par questionnaire auto-administré en ligne, auprès d’un échantillon de 1002 personnes, représentatif de la population française âgée de 18 ans et plus (méthode des quotas), du 8 au 11/06/2021

2 Orphanet – L’acromégalie : https://www.orpha.net/data/patho/Pub/fr/Acromegalie-FRfrPub408.pdf [consulté le 22/10/2021]

3 Acromégalie Philippe Chanson. Janvier 2009

4 Chanson P et al. Consensus sur la prise en charge de l’acromégalie. Annales d’Endocrinologie. 2009

5 Diagnostic delay is associated with psychosocial impairment in acromegaly. Nov. 2012

6 Challenges in the diagnosis and management of acromegaly: a focus on comorbidities. Juin 2016

7 Pr Ag S. Achir – La presse médicale en ligne. « Acromégalie : quand y penser ? » Mai 2018

8 The Lancet Diabetes & Endocrinology: Oldest case of gigantism? Assessment of the alleged remains of Sa-Nakht, king of ancient Egypt. 2017