L’épilepsie est la deuxième maladie neurologique chronique derrière la migraine. Elle touche 50 millions de personnes dans le monde et 650 000 en France. Comme cette maladie touche le cerveau, elle fait peur. Alors arrêtons avec les préjugés sur l’épilepsie !
Maladie neurologique chronique, l’épilepsie touche près de 50 millions de personnes dans le monde et pas moins de 650 000 personnes en France. Parmi eux, chaque année, 4000 enfants de moins de 10 ans deviennent épileptiques[1]. Neurologues et neuropédiatres sont mobilisés pour soigner les maladies neurologiques de ces jeunes sujets. Grâce à leur travail, aux techniques d’exploration du cerveau et aux nouvelles thérapeutiques, la médecine progresse vite et bien ! La maladie est mise sous contrôle par les médicaments et environ 7 jeunes sur 10 arrivent à en surmonter les difficultés. Mais le combat est loin d’être achevé pour cette noble cause. C’est pourquoi, deux journées sont dédiées à la sensibilisation de l’opinion. Le 11 février, considérée sur le plan européen et le 14 février, dont la portée est internationale. Ces deux rendez-vous sont importants car ils visent à lutter contre les préjugés et les stigmatisations qui entourent les patients, conduisant certains à devoir cacher cette pathologie, de peur d’être rejetés.
Qu’est ce que l’épilepsie ?
Impressionnante lors d’une crise, l’épilepsie est en fait un trouble cérébral qui entraîne des crises épileptiques. Elles sont causées par un fonctionnement anormal, simultané et excessif des neurones. Cela a pour conséquence de provoquer des décharges “électriques” soudaines que l’on appelle aussi décharges épileptiques, qui se traduisent sur le plan clinique par une crise. Lorsqu’elle survient, elle peut être partielle ou concerner une grande partie du cortex cérébral selon les patients. Elle entraîne souvent une perte de conscience mais aussi des secousses musculaires répétées. Le sujet est alors marqué par des ruptures de contact avec son environnement.
Peut-on en guérir ?
Des progrès notables en médecine permettent de réduire la fréquence des crises. Aussi, il est observé qu’un traitement adapté va permettre à 7 personnes sur 10 de faire disparaître les crises[2]. En effet, il est fondamental de traiter cette maladie qui peut mettre en danger la personne qui en souffre. Pertes de connaissance, chutes, traumatismes sont autant de risques qui peuvent survenir lorsqu’une crise se manifeste. De même, il est fondamental qu’un patient puisse mener à nouveau une vie la plus normale possible, visant son autonomie quotidienne : travailler, conduire, avoir une vie familiale et sociale. Il lui sera recommandé de veiller à la qualité de son sommeil, de limiter son stress mais aussi d’éviter les consommations addictives (alcool, drogues).
Le processus de soins peut être composé par la prise de médicaments antiépileptiques (MAE). Ils vont agir sur la communication entre les neurones. Lorsqu’ils ne sont pas efficaces, les hôpitaux proposent des prises en charge chirurgicales. On observe à ce propos que 3 patients sur 10 font toujours des crises bien qu’ils bénéficient d’un traitement médicamenteux. Dans ce cas, la chirurgie permet d’intervenir sur la zone qui déclenche la crise. Selon le mode opératoire et la pathologie, elle est précédée entre autres par des investigations électrophysiologiques, morphologiques et fonctionnelles. Mais aussi d’autres analyses complètes et plus globalement, un protocole important.
Il existe par ailleurs une technique autre que la chirurgie lorsqu’elle est impossible : la stimulation du nerf vague (SNV). Elle est recommandée et administrée par un neurologue et vise l’implantation d’un stimulateur sous anesthésie générale. Ce dispositif, qui nécessite une brève hospitalisation, va être mis en place via des électrodes dont le but sera d’amoindrir le nombre de crises. Les études ont prouvé que 40% des patients implantés dans le monde ont vu une réduction de 50% du nombre de crises[3].
Vaincre les préjugés
Il est donc essentiel de combattre les idées reçues car 300 000 personnes sont par exemple injustement stigmatisées sur le marché du travail[4]. L’épilepsie n’est ni une maladie contagieuse ni une maladie mentale. L’opinion a forgé dans ses projections, les images inexactes d’un patient en crise, marqué par des troubles du comportement ou des gestes automatiques. Ainsi, une confusion s’est installée auprès du grand public, entre la cause et les conséquences. S’il est vrai que les facteurs psychologiques peuvent concourir à la crise, ils se limitent en fait aux émotions, au stress ; éléments déclenchant des crises, mais ils ne peuvent pas en être la cause.
Pourquoi l’épilepsie reste–t–elle encore taboue ?
Parce que la maladie concerne le cerveau, cet organe extraordinaire et complexe qui orchestre tout notre organisme et dont les scientifiques découvrent sans cesse les incroyables capacités, demeure encore mystérieux et fascinant.
Parce que tout ce qui a trait au cerveau fait peur par analogie avec les maladies mentales et les maladies neuro–dégénératives.
Parce que l’épilepsie n’est pas toujours expliquée avec simplicité ce qui contribue à la mystifier. Le Pr Fabrice Bartolomei (CHU de Marseille) explique : le cerveau est un organe bioélectrique qui fonctionne avec des rythmes électriques comme le cœur. Les crises correspondent à des interruptions transitoires s’exprimant par des symptômes variés dont les crises sont la principale (mais pas l’unique) manifestation. La particularité de l’épilepsie est l’imprévisibilité des crises.
Parce que l’immense majorité des gens pense que l’épilepsie se résume à des crises convulsives parfois spectaculaires (. À cause de cela de nombreux préjugés restent ancrés dans l’esprit du public : maladie mentale, hystérie, folie, alcoolisme…
Or en réalité, l’épilepsie est une maladie qui s’exprime de multiples manières : par des signes visibles (tremblements, mouvements involontaires, rigidité musculaire, chutes…) ou par des signes peu visibles, voire invisibles (ruptures de contacts (absences), troubles de la mémoire, difficultés de concentration, hallucinations auditives ou visuelles…).
Pourquoi il faut parler de l’épilepsie ?
Pour un diagnostic plus précoce et une prise en charge médicale mieux adaptée.
Parce qu’on ne parle pas des nombreux symptômes – autres que la crise convulsive – qui doivent faire penser à l’épilepsie, le diagnostic est souvent retardé.
Pour que les parents, les enseignants, l’entourage, le grand public puissent contribuer à identifier l’épilepsie, il est nécessaire d’expliquer les nombreuses formes d’expression de la maladie.
De nombreux témoignages de personnes adultes dont l’épilepsie a été diagnostiquée tardivement réalisent que leur maladie était présente depuis de nombreuses années lorsqu’elles se remémorent les situations antérieures de leur vie : parcours scolaire difficile, difficultés d’apprentissage, lenteur, maladresses…
Le diagnostic précoce de leur épilepsie aurait permis une prise en charge et un suivi médical adapté, et évité des situations stigmatisantes qui les ont durablement marqués. Compte–tenu de ces symptômes qu’on évoque peu souvent, d’autres diagnostics sont faussement attribués (malaises vagaux, spasmophilie, dépression…) avec des traitements qui ne correspondent pas à l’épilepsie et maintiennent une potentielle dangerosité (conduite automobile, emploi inadapté, risques pour la personne malade et aussi pour l’entourage…).
Pour que l’épilepsie ne soit plus dissimulée et que cesse la stigmatisation des malades
Dans la vie de tous les jours, les personnes épileptiques sont souvent stigmatisées : enfant dont les « absences » font penser à tort qu’il est constamment dans la lune, ou qu’il ne fait pas d’effort, ou étiqueté comme ayant des difficultés d’apprentissage sans qu’on cherche plus loin à en comprendre les raisons, adulte dont les collègues disent qu’il/elle est lent(e) et peu concentré(e) dans son travail... Ça peut être aussi le doute de l’entourage quant à l’authenticité de la maladie (simulateurs, paresseux…), l’agacement voire des comportements délétères à cause de maladresses récurrentes, étourderies, chutes... Cela conduit à des attitudes stigmatisantes : quolibets, moqueries, rejet… avec pour conséquences fréquentes : isolement social, mise à l’écart (emploi, sport, loisirs…), dépression, suicide…
En réponse à ces situations, les personnes épileptiques cachent fréquemment leur maladie, se mettant dans un positionnement où le cercle vicieux s’installe : dans le monde du travail par exemple, craignant de n’être pas embauchées, elles cachent leur maladie se mettant en danger si une crise survient. Dans d’autres situations, ne pas dire qu’on est épileptique peut conduire à des prises de risques dangereuses pour la
personne elle–même et pour son entourage : accidents, noyades…
Journée mondiale de l’épilepsie le 14 février
L’épilepsie, parlons-en !
pour mieux faire connaître l’épilepsie et ses différentes manifestations
pour combattre la méconnaissance et les préjugés autour de l’épilepsie
La campagne de communication d’Épilepsie-France dénonce le silence qui entoure l’épilepsie et attire l’attention sur la nécessité de communiquer sur la maladie.
– Pourquoi l’épilepsie reste-t-elle encore taboue ?
– Comment lutter contre une image réductrice de l’épilepsie qui fait perdurer les idées reçues, stigmatise les malades et les met en danger ainsi que leur entourage ?
Cyrille Darigade
[1] Source Epilepsie France
[2] Données CHU de Rouen-Normandie
[3] Stimulation du nerf vague, une solution pour les épilepsies* rebelles – CHU de Saint-Etienne – mardi 30 octobre 2007.
[4] Fondation Française pour la Recherche sur l’épilepsie.