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Comment le microbiome des voies respiratoires aggrave les pneumonies bactériennes

Le microbiome des voies respiratoires influence la gravité des pneumonies bactériennes. C’est ce que viennent de découvrir des chercheurs de l’Institut Pasteur et du CNRS. Explications.

La pneumonie, une infection pulmonaire causée par des bactéries, des virus ou des champignons, est une maladie majeure en termes de morbidité et de mortalité à l’échelle mondiale. Elle représente un véritable problème de santé publique tant clinique qu’économique au niveau mondial. Les voies respiratoires abritent un écosystème microbien appelé microbiome, qui suscite un intérêt croissant parmi les scientifiques en raison de son rôle dans la stimulation du système immunitaire humain et de sa capacité à protéger contre les infections pathogènes. Des chercheurs de l’Institut Pasteur et du CNRS ont récemment examiné comment la composition du microbiome, la présence de pathogènes et les interventions médicales influencent la gravité des pneumonies bactériennes causées par Legionella pneumophila.  Car le microbiome des voies respiratoires aggrave les pneumonies bactériennes.

Impact du microbiome des voies respiratoires sur la pneumonie

L’étude a été menée par l’unité Biologie des bactéries intracellulaires de l’Institut Pasteur, dirigée par Carmen Buchrieser, en collaboration avec Sophie Jarraud, responsable du Centre national de référence de légionelles à Lyon. Les chercheurs ont analysé la diversité et la composition du microbiome des voies respiratoires, y compris les bactéries, les archées, les champignons et les protozoaires, chez les patients hospitalisés pour une pneumonie causée par Legionella pneumophila. Cette bactérie est responsable de pneumonies graves, connues sous le nom de légionelloses, qui sont contractées par l’inhalation d’aérosols contaminés provenant de sources d’eau artificielles telles que les douches, les bains thermaux ou les systèmes d’air conditionné. Le taux de mortalité des légionelloses varie de 5 % à 40 % en fonction du contexte clinique et de la région. Les facteurs de risque comprennent l’âge avancé, les maladies pulmonaires préexistantes, le tabagisme, l’immunodépression, et la majorité des cas signalés affectent des hommes. Les cas confirmés de légionelloses dans l’Union européenne ont augmenté de façon significative, passant de 4 693 cas en 2005 à 10 004 cas en 2021, ce qui pourrait en partie s’expliquer par les effets du changement climatique, notamment des températures de l’eau plus élevées et des inondations plus fréquentes qui favorisent la prolifération de la bactérie et son accès aux environnements humains.

Legionella Pneumophila et les Légionelloses

Les scientifiques ont utilisé le séquençage à haut débit des gènes marqueurs des bactéries, des archées et des champignons, ainsi qu’une approche de quantification, pour étudier l’évolution du microbiome des voies respiratoires des patients tout au long de leur infection et des traitements associés à leur hospitalisation, tels que la ventilation mécanique et la prise d’antibiotiques. Ils ont analysé une cohorte de 38 patients hospitalisés atteints de pneumonie due à Legionella pneumophila.

Carmen Buchrieser, auteure principale de l’étude et responsable de l’unité Biologie des bactéries intracellulaires à l’Institut Pasteur, explique :

« Nous avons découvert une dynamique complexe du microbiome où coexistent des micro-organismes commensaux et pathogènes, et où l’équilibre entre leur quantité influence la guérison ou la dysbiose, c’est-à-dire un déséquilibre de la biodiversité. »

Au début de l’hospitalisation, le microbiome des voies respiratoires de ces patients montre une diminution de sa diversité, et le traitement antibiotique élimine la Legionella pneumophila. Cependant, cet espace vacant est rapidement colonisé par d’autres espèces opportunistes souvent résistantes aux antimicrobiens, un aspect qui doit être pris en compte dans les stratégies de prévention des infections secondaires.

De plus, les microbiomes des voies respiratoires présentant les charges bactériennes et fongiques les plus élevées montrent une diversité réduite et une présence accrue d’agents pathogènes, ce qui suggère que la biomasse élevée pourrait servir de biomarqueur pour les infections secondaires et/ou les co-infections.

Enfin, les scientifiques ont observé que la quantité de Legionella est corrélée à la gravité de la maladie et aux comorbidités, ce qui suggère que la mesure de la présence de cet agent pathogène devrait être intégrée dans le suivi médical des patients. Ainsi, le microbiome des voies respiratoires aggrave les pneumonies bactériennes. De plus, les interventions cliniques telles que la ventilation mécanique et le choix d’antibiotiques ont un impact sur l’évolution du microbiome des voies respiratoires et, par conséquent, sur le pronostic de la maladie.

« Dans cette étude nous avons aussi découvert que les champignons, les archées ou les protozoaires pourraient être des membres résidents et non transitoires dans les voies respiratoires des personnes hospitalisées et pourraient contribuer à la progression de la pneumonie, ce qui nécessite des recherches plus approfondies. Par conséquent, on montre ici que l’interaction entre l’équilibre du microbiome des voies respiratoires, la dynamique de la charge en agents pathogènes et les interventions cliniques jouent un rôle essentiel dans le rétablissement des patients atteints de pneumonie. »

Carmen Buchrieser

Les résultats de cette étude ont été publiés dans la revue Cell Reports Medicine le 25 août 2023.

 

Sources :

The respiratory tract microbiome, the pathogen load and clinical interventions define severity of bacterial pneumonia, Cell Reports Medicine, 25 août 2023

Ana Elena Pérez-Cobas1,2#*, Christophe Ginevra3,4, Christophe Rusniok1,2, Sophie Jarraud3,4, Carmen Buchrieser1,2,3*

1. Institut Pasteur, Université Paris Cité, Biologie des Bactéries Intracellulaires, Paris, France

2. CNRS UMR 6047, 75724, Paris, France ;

3. Hospices Civils de Lyon, Centre National de Référence des Légionelles, Bron, France ;

4. Centre International de Recherche en Infectiologie, Université Lyon 1, UMR CNRS 5308, U1111 Inserm, Ecole Normale Supérieure de Lyon, Lyon, France

# Present address: Department of Microbiology, Ramón y Cajal University Hospital, Madrid, Spain; Ramón y Cajal Institute for Health Research, Madrid, Spain.

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