10 points clés autour du dépistage du cancer de la prostate-santecoolEn France, comme dans la plupart des pays qui utilisent à bon escient le PSA, la mortalité par cancer de la prostate a chuté de manière spectaculaire depuis 20 ans. Cette baisse de la mortalité semble même s’accélérer puisque sur la période 2005-2011, on observe une diminution de 3,8 % par an, alors qu’elle n’est que de 0,8 % en moyenne sur la période précédente 1980-2005. L’Association Française d’Urologie ne peut que s’en réjouir. Néanmoins ce cancer tue près de 10 000 patients par an et il reste le premier en terme d’incidence chez l’homme. Il ne faut donc pas baisser la garde et continuer à faire progresser sa prise en charge et améliorer la qualité des soins.

 

 

Meilleure connaissance de la carcinogénèse, progrès de l’imagerie et de l’anatomo-pathologie… des publications récentes permettent d’éclairer le dépistage et la prise en charge du cancer de la prostate autour de 10 points clés. 

  1. Plus la maladie est prise en charge à un stade précoce, meilleures sont les chances de guérison. En pratique, la guérison n’est possible qu’en cas d’atteinte localisée. A ce stade de la maladie, le cancer est dans l’immense majorité des cas, asymptomatique. C’est à ce stade, sans manifestation clinique, qu’il est guérissable, c’est pour cette raison que seule une recherche active de ce cancer peut permettre de le « démasquer ».
  2. Le PSA reste un marqueur fiable, économique et reproductible. Il a une bonne sensibilité et même si sa spécificité n’est pas parfaite, il reste la cheville ouvrière du dépistage à condition de savoir l’utiliser. Son interprétation est parfois complexe, mais les urologues sont présents pour aider les médecins généralistes dans cette tache. Il faut noter que les pays qui n’utilisent pas ce PSA dans le cadre de diagnostic précoce ont des taux de cancer de la prostate diagnostiqué au stade d’emblée métastatique (donc incurable) multipliés par 4 ou 5 !

 

  1.   En cas de cancer découvert au stade tardif métastatique, le traitement de référence est basé sur l’hormonothérapie, c’est-à-dire la castration chimique. Ce traitement a de nombreux effets secondaires : trouble de l’érection, diminution de la libido, syndrome métabolique (diabète, HTA, obésité), ralentissement psychomoteur, perte osseuse allant jusqu’à l’ostéoporose.  Les métastases sont souvent douloureuses et doivent bénéficier de traitements antalgiques parfois très lourds (radiothérapie, morphine…) et les complications peuvent être dramatiques (fracture, paraplégie …). Ce constat renforce les recommandations d’un diagnostic précoce afin d’éviter ces métastases. Fort heureusement, la politique de dépistage a permis, depuis l’utilisation du PSA de diminuer drastiquement le nombre de patients diagnostiqués au stade métastatique.
  2. Il n’y a pas un cancer de prostate mais une mosaïque de cancers différents. Tous ne nécessitent pas d’être traités. En 2014, un tiers de patients (34,1 %) porteurs d’une tumeur de la prostate étaient sans traitement ; pour la plupart, ils étaient suivis par des urologues dans un protocole dit de « surveillance active ». A ce jour, seule la biopsie permet de connaître avec le plus de précision possible le pronostic grâce à l’analyse des pathologistes et l’utilisation des marqueurs histo-pronostiques. C’est donc après ces biopsies de prostate que se décide ou non la surveillance active.
  3.   L’imagerie a connu une révolution en terme de « vision » du cancer de la prostate. Depuis peu (2-3 ans), l’IRM permet de voir les cancers de la prostate, surtout les plus agressifs. Aujourd’hui parler de diagnostic de cancer de la prostate sans inclure l’IRM devient une ineptie. Dans la plupart des cas, l’IRM permet d’avoir une idée, qui devient de plus en plus précise, sur les limites locales de ce cancer.
  4. En fonction de l’âge, du type de cancer (Score de Gleason), de la valeur du PSA et du bilan d’extension, la prise en charge varie. Certains cancers seront surveillés (surveillance active), d’autres seront opérés, d’autres bénéficieront de la curiethérapie, de la radiothérapie ou de technique innovante comme l’HIFU, enfin d’autres pourront rentrer dans des protocoles ou des essais cliniques comme pour la photothérapie ou la cryothérapie. Il est clair qu’il existe des prises en charge validées (recommandations de l’AFU, de l’EAU, du Nice, de l’AUA…) et d’autres en cours d’évaluation. Les patients doivent recevoir une information la plus claire et la plus complète possible sur les possibilités thérapeutiques envisageables pour leur cancer.
  5. Le cancer de la prostate touche essentiellement l’homme de plus de 60 ans. Ce n’était donc pas un problème de santé publique au début du XXèmesiècle car l’espérance de vie était réduite. Mais aujourd’hui l’augmentation de l’espérance de vie rend le cancer de la prostate d’actualité et il le sera de plus en plus : elle atteint 79,2 ans pour les hommes en 2014, soit un gain de 0,8 an par rapport à l’année 2011. L’espérance de vie à 65 ans (nombre d’années moyen qu’il reste à vivre lorsqu’on a atteint à 65 ans) continue également de croître régulièrement, atteignant 19,1 ans pour les hommes (2,4 ans de plus qu’en 2000). Sans surprise, l’accroissement de la durée de vie, impacte le nombre de patients atteints. L’incidence des cancers de la prostate a connu une évolution similaire passant de 24,8 / 100 000 en 1980 à 124,5 en 2005 avant de redescendre ensuite vers 97,7 / 100 000. L’explication de cette évolution récente repose sur des raisons épidémiologiques (après plusieurs années de dépistage, la majorité des cancers prévalents a été diagnostiquée) et sociales (la conscience du diagnostic inutile s’est répandue chez les soignants comme dans le grand public et permet un meilleur ciblage des populations).
  6. Le médecin généraliste, le radiologue, le pathologiste, le radiothérapeute et l’urologue sont les premiers acteurs de la prise en charge des hommes atteints d’un cancer de la prostate. Les décisions thérapeutiques et la coordination des soins sont nettement améliorées avec le plan cancer et la tenue obligatoire des réunions de concertation pluridisciplinaire. Les progrès dans le diagnostic (nouveaux marqueurs et imagerie comme le Tep Choline puis bientôt le PSMA) vont changer les pratiques et il est important que l’ensemble de ces médecins puissent avoir accès a l’information.
  7. La morbidité des traitements pour le stade localisé (radiothérapie, chirurgie, HIFU, curithérapie) diminue, en particulier en terme de continence et de sexualité. A l’opposé, la morbidité des traitements des stades plus avancés restent élevée (syndrome métabolique, sexualité, troubles psychomoteurs…). De nouvelles molécules ont été mises sur le marché par les laboratoires pharmaceutiques investis dans la recherche en oncologie mais ces traitements restent lourds, morbides et très chers (de 3 000 à 10 000 euros par mois). Il est donc important de continuer à promouvoir le dépistage afin d’éviter l’évolution vers la métastase.
  8. L’AFU recommande donc d’informer les patients sur la possibilité d’être dépisté.Comme il n’y a pas (encore) de politique de dépistage de masse sur ce type de cancer, l’information est essentielle ; aujourd’hui l’unique société savante des urologues prône plus que jamais d’utiliser le PSA et l’examen clinique. En cas de doute, l’IRM de prostate devient un élément-clé pour poursuivre les investigations si nécessaires (biopsies de prostate).

En conclusion, il est nécessaire d’informer les patients sur ce dépistage possible en utilisant, à partir de 45-50 ans et jusqu’à 75 ans, le dosage sanguin du PSA et l’examen clinique, en ayant recours a l’IRM de la prostate en cas de besoin.